tag:blogger.com,1999:blog-22437511870699257412024-02-03T02:43:22.214+02:00ralentir travauxDes mots des images et des sons<br>Le site de Maurice Darmon<br><br>Unknownnoreply@blogger.comBlogger414125tag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-85847548883913662952014-08-29T10:18:00.000+02:002014-08-31T15:03:44.841+02:00Gaidz Minassian: Le monde est désarmé face aux sociétés guerrières<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEikQC8qBWbwEs1C3E3iPcihyTU-KL9Twv2EFuNtOIsbEeuMp0KNithdL0KV5ULIYH7oc-3j_QZmBD9KL8FCoYns41cxT15uWwAomHqsW6o3eR4GaX1BDv6zlcAes_rETXJRRqgF0lvH-A_9/s1600/11septembre_questions(1).jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEikQC8qBWbwEs1C3E3iPcihyTU-KL9Twv2EFuNtOIsbEeuMp0KNithdL0KV5ULIYH7oc-3j_QZmBD9KL8FCoYns41cxT15uWwAomHqsW6o3eR4GaX1BDv6zlcAes_rETXJRRqgF0lvH-A_9/s1600/11septembre_questions(1).jpg" height="271" width="400" /></span></a></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="color: blue; font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i><a href="https://sites.google.com/site/libratextu/2014-08-29-le-monde-est-desarme" target="_blank">Lecture dans dossier cliquer ici.</a></i></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.6399993896484px;"> </i><b>Le monde est désarmé face aux sociétés guerrières. — </b>Le monde vire au gris. De la Mauritanie jusqu'aux confins de la Chine via tout le Moyen-Orient, un épais nuage recouvre lentement mais assurément l'ensemble des États. Sur son passage, la tempête gomme les souverainetés, efface les frontières et détruit l'ordre établi. La désintégration totale et irréversible des États-nations n'y est plus une menace, c'est devenu une réalité.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.6399993896484px;"> </i>Jusqu'aux attentats du 11 septembre, les terrorismes et guérillas qui rongeaient ces sociétés étaient marginalisés, mobilisateurs certes de ressources mais pas vraiment dominants. Une vie normale pouvait s'accomplir à Nouakchott comme à Damas ou encore à Islamabad. Aujourd'hui, le djihadisme s'est diffusé sur l'ensemble du corps social, laissant apparaître des sociétés guerrières solidement établies de la côte ouest de l'Afrique jusqu'aux montagnes d'Asie centrale. Ce n'est plus l'État-nation, même autoritaire, qui est la norme de cet ensemble en pleine déliquescence, mais la religion radicalisée et la violence portée par des sociétés dépourvues de tout autre mode de régulation. Le syndrome afghan, cet État en guerre quasi permanente depuis près de quatre décennies, a proliféré tel un virus foudroyant entraînant dans son sillage la déconstruction de l'État. On a cru pendant longtemps que le reste du monde était à l'abri de ce vieux conflit lié à la guerre froide. À tort. Petit à petit, le modèle de la société djihadiste ou guerrière a contaminé l'État-nation là où il montrait de forts signes de vulnérabilité.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.6399993896484px;"> </i>On a également eu tort de penser que l'État-nation était l'aboutissement logique du développement politique, comme s'il ne pouvait pas y avoir une alternative à ce modèle de souveraineté, comme si l'histoire s'était arrêtée au carcan national et que le postnational n'était que chimère. On n'a pas voulu voir — car l'esprit cartésien l'interdit — que, si l'on n'y prenait pas garde, l'État pouvait être privé de son monopole de la violence légitime au profit de groupes islamistes où chaos et nihilisme font bon ménage.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.6399993896484px;"> </i>Ce qui se passe dans cette région en collier de perles djihadistes vient en fait fermer la parenthèse de Westphalie, cet acte de naissance de la souveraineté délivré en 1648 à la fin de la guerre de Trente Ans. Après plus de trois siècles de construction nationale, le monde se désinstitutionnalise sous nos yeux et à grands pas. La thèse du retour à l'âge médiéval n'a jamais été aussi pertinente qu'aujourd'hui. La modernité de l'État-nation ne fait plus recette, et sa chute commence là où la demande sociale des peuples fragilisés par l'histoire et la géographie n'est plus assouvie et se transforme en désillusions sur place et indifférence sinon mépris de la part de nos sociétés prospères.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.6399993896484px;"> </i>Le système international peut-il arrêter la destruction de sa vieille maison? Aujourd'hui, il ne peut pas grand-chose. Pour deux raisons. D'une part, il est responsable de cette situation, car à force de traiter ces crises par l'usage des moyens militaires, les puissances majeures, garantes de l'ordre mondial, ont fini par décourager les populations prêtes désormais à suivre ou subir les idéologies les plus obscurantistes ne serait-ce que pour essayer de s'en sortir. La nature ayant horreur du vide, en l'absence d'institutions, ces groupes humains se tournent vers ce qui leur semble le plus «sécurisant».</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.6399993896484px;"> </i>D'autre part, le système international est impuissant, car il repose sur des échanges permanents entre interlocuteurs identifiés et légalisés. Or il n'y a plus d'interlocuteurs fiables ni d'autorités incontestables dans la plupart des ces pays: avec qui discuter? Avec qui négocier? Des leaders djihadistes? Des chefs terroristes invisibles dont la seule ambition est de briser le système des souverainetés pour créer un «nouveau monde»? Le système international est désarmé, désemparé, face à la disparition de toutes normes politiques au profit de la norme religieuse. Si le système n'est pas en mesure de mettre un terme à cette anomie, à cette folle spirale du chaos dont le centre nerveux se trouve aujourd'hui sur les ruines de la Syrie et de l'Irak, il est dans l'obligation de s'interroger sur ses capacités de rénovation et de correction de ses difformités au moment où le monde touche à nouveau le fond avec un crime génocidaire en Mésopotamie. Comme tous les génocides, les crimes contre l'humanité commis à l'encontre des yézidis et des chrétiens d'Orient ne relèvent pas du hasard ni du court terme.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.6399993896484px;"> </i>Outre les causes immédiates comme les discriminations religieuses ou les haines raciales, il y a aussi des causes lointaines, comme par exemple la souveraineté excessive des États ou les logiques d'exclusion et de marginalisation. Tant que les puissances n'auront pas réglé les défauts de fabrication du système international, d'autres tragédies sont, hélas! à prévoir en Afrique, au Moyen-Orient ou en Asie.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.6399993896484px;"> </i>Tant que les puissances attendront l'inconcevable pour réagir, alors qu'elles peuvent intervenir dès les premiers signes d'autoritarisme d'un tyran et de ses sicaires, les dictateurs auront un bel avenir devant eux. Bref, il est difficile d'expliquer comment les puissances peuvent d'un côté être en mesure de pulvériser le monde avec leur arsenal nucléaire et de l'autre se montrer incapables de rectifier les défauts d'origine du système mondial générateurs de tragédies et de génocides. — Gaidz Minassian, <i>Le Monde</i>, 24 août 2014.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif; font-size: xx-small;"><br /></span></div>
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<i style="background-color: white;"><span style="color: #222222; font-family: Georgia, Times New Roman, serif; font-size: xx-small;"><span style="line-height: 24.6399993896484px;"> © Photographie: 11 septembre 2001, auteur non identifié, tous droits réservés.</span></span></i></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-23648874932443878522014-07-18T15:14:00.000+02:002014-07-18T15:36:06.917+02:00Arno Klarsfeld: Dans les rues françaises<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhtPvJlfzBH76V30s7S2U5fTjzvwwRvRQ-4dAoqcLKszS96nkINTgfobZIj78Iyr4sneYGqNGrzZxwhNVYP3vQMnlhg5KoJabeQoY5424Ys8zeM6UOLe8Ye_2XgVPXH6Q_tVvLBzP1HNx7d/s1600/rue-des-rosiers-sign.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhtPvJlfzBH76V30s7S2U5fTjzvwwRvRQ-4dAoqcLKszS96nkINTgfobZIj78Iyr4sneYGqNGrzZxwhNVYP3vQMnlhg5KoJabeQoY5424Ys8zeM6UOLe8Ye_2XgVPXH6Q_tVvLBzP1HNx7d/s1600/rue-des-rosiers-sign.jpg" height="320" width="240" /></a></div>
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<div style="text-align: center;">
<span style="background-color: white; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"><span style="color: blue;"><a href="https://sites.google.com/site/judaiecas/2014-07-arno-klarsfeld-dans-les-rues-francaises" target="_blank">Lecture dans dossier, cliquer ici.</a></span></span></div>
<b><i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"><br /></i></b>
<b><i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Ne pas tolérer l’antisémitisme dans les rues françaises. —</b> L'opération «Bordure protectrice» et les tirs de roquettes sur le territoire israélien depuis Gaza créent une situation explosive au Proche-Orient. Mais l'escalade a aussi des répercussions en France, où des synagogues ont été attaquées à la fin d'une manifestation de soutien aux Palestiniens. Comment éviter la contagion?</div>
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<br /></div>
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<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>À la veille du 14 juillet, au pied du Génie de la Bastille, des centaines de jeunes se sont rués rue de la Roquette et dans les rues avoisinantes, armés de barres de fer, à la recherche de juifs à lyncher. Ils ont tenté de pénétrer dans la synagogue de la rue de la Roquette, et si de jeunes juifs courageux n'étaient parvenus à tenir l'entrée, aidés par la suite par les forces de l'ordre, on peut imaginer le sort réservé aux fidèles présents à l'intérieur...</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Jamais un tel événement ne s'était produit en France depuis le Moyen Âge. Jamais. Certes, il y avait eu les attentats contre les synagogues, commis par la Cagoule en 1941, mais ils avaient été perpétrés par un petit groupe d'individus afin que l'on crût que la population française était antisémite — ce qui n'était pas le cas. Mais jamais des centaines d'individus de nationalité française n'avaient tenté, en France, de prendre d'assaut une synagogue. C'est inédit, et nulle part ailleurs actuellement en Europe cela ne se produit.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>La situation aujourd'hui est paradoxale: la France n'est pas antisémite, mais le noyau dur de l'extrême droite l'est vigoureusement, comme une partie de l'extrême gauche, qui déteste Israël, et une partie de la jeunesse des banlieues, qui, hier, à la Bastille, fournissait le gros des troupes.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Non, la France n'est pas antisémite, les juifs en France peuvent accéder, selon leurs mérites, à tous les postes et à tous les honneurs, et les gouvernements de droite ou de gauche ont toujours les formules qu'il convient pour dénoncer et fustiger l'antisémitisme. Mais cette mobilisation verbale ne suffit pas, ne suffit plus, pour endiguer le mal.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>J'avais dit il y a plus de trois ans qu'une vague fondamentaliste traversait le monde musulman, et que cette vague touchait aussi la France par endroits. Combien de reproches m'ont alors été adressés! Depuis, il y a eu <a href="https://sites.google.com/site/judaiecas/antisemitisme/2012-03-ce-que-sait-l-homme-de-toulouse" target="_blank"><span style="color: blue;">Merah</span></a>, les soldats de la République, les enfants juifs assassinés à Toulouse et <a href="https://sites.google.com/site/judaiecas/antisemitisme/2014-06-un-nouveau-djihadisme?pageMoved=Antis%C3%A9mitismes" target="_blank"><span style="color: blue;">la tuerie du Musée juif de Bruxelles par un tueur islamiste français</span></a>.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>De nombreux «bien-pensants» admettent que l'on dénonce l'antisémitisme, mais à la condition qu'il provienne de l'extrême droite. Or tous les attentats meurtriers commis en France ces dernières décennies ont été commis soit par des islamistes, soit par des terroristes venus du Proche-Orient.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Ceux qui assassinent les juifs aujourd'hui en Europe — les islamistes comme <a href="https://sites.google.com/site/judaiecas/antisemitisme/2012-03-ce-que-sait-l-homme-de-toulouse" target="_blank"><span style="color: blue;">Mohammed Merah</span></a> ou <a href="https://sites.google.com/site/judaiecas/antisemitisme/2014-06-un-nouveau-djihadisme?pageMoved=Antis%C3%A9mitismes" target="_blank"><span style="color: blue;">Mehdi Nemmouche</span></a> —, ceux qui maltraitent les enfants juifs dans les écoles de la République, agressent les juifs dans les transports en commun ou dans la rue parce qu'ils portent une kippa, lancent des cocktails Molotov contre des synagogues, ne le font pas sur ordre d'un État ou d'une entité: ils le font de leur propre initiative, poussés par la haine antijuive qui leur a été inoculée.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>La haine antijuive des islamistes est profonde et puissante. Elle prend sa force dans une pulsion religieuse absolument intolérante. Elle s'alimente dans le refus d'un Etat d'Israël — État juif libre et fort au Proche-Orient — qui est vécu comme une tumeur par une partie des musulmans. Elle s'alimente aussi d'une haine de l'Occident, dans lequel ils estiment que les juifs jouent un rôle de démiurges.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Cette propagande antijuive, qui prend sa source au Proche-Orient et qui trouve ses relais en Europe, fait que des jeunes issus de l'immigration maghrébine peuvent assassiner, en en tirant des motifs de joie et de fierté, des enfants juifs à Toulouse ou des touristes juifs à Bruxelles. D'autres jeunes issus eux aussi de l'immigration peuvent prendre comme cible de leur crime de droit commun un jeune juif comme <a href="https://sites.google.com/site/judaiecas/antisemitisme/2009-04-juif-donc-riche-ilan-halimi" target="_blank"><span style="color: blue;">Ilan Halimi</span></a>, torturé pendant des jours et des nuits parce que la victime est un juif, et que le juif c'est l'ennemi: il est riche et soutient Israël.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Si on considère l'Histoire d'un point de vue logique, l'avenir est sombre en France pour les juifs, pris en tenaille entre une population musulmane qui s'accroît, et parmi laquelle s'accroît l'antisémitisme, et une extrême droite qui gagne en influence en raison de la crise et chez qui l'antisémitisme est toujours présent parmi nombre de ses cadres et dans le tréfonds de son idéologie.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Mais l'Histoire n'est pas toujours logique. Et ce n'est pas parce qu'une situation est périlleuse qu'elle se révélera catastrophique. L'Histoire est ce qu'en font les hommes.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Que faire? Il convient de restaurer l'autorité de l'État, mise à mal dans de nombreuses banlieues, et montrer que la République sera inflexible face à l'intolérance, qu'elle mobilisera ses forces — et pas seulement ses mots. Que le pouvoir soit de droite ou de gauche, cela est indifférent. Si l'on s'est trompé, il n'y a pas de mal à corriger. Si une idéologie n'est plus en phase, il convient de l'adapter.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>La France n'est pas raciste, ou pas plus et certainement moins que d'autres nations. Les Français saluent les vertus du métissage, les sangs qui se mélangent, le renouveau que cela apporte, le brassage des cultures, l'énergie qui s'en développe, mais ils veulent que cela se fasse sur des valeurs communes. Ces valeurs sont le respect du pays dans lequel on arrive pour s'y installer, le respect des femmes, celui des traditions, une manière discrète de pratiquer sa religion, et surtout la tolérance.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Et puis il faudra trouver des solutions audacieuses pour intégrer non pas seulement les étrangers, mais des Français issus de l'immigration qui, non seulement en veulent aux juifs, mais en veulent à la France, alors que la France est un pays généreux comparée à beaucoup d'autres pays sur la planète. Si de réelles mesures ne sont pas prises, il est évident que les juifs qui peuvent quitter la France le feront; un certain nombre l'a déjà fait. Plutôt partir que vivre dans la peur et dans la honte.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Quant au conflit israélo-palestinien, ce qu'il faut, c'est un compromis, car, dans l'absolu, aucun camp n'a raison et aucun camp n'a tort. Mais un compromis est-il possible pour le moment? Les Palestiniens, et plus généralement le monde arabe, sont-ils prêts à accepter au Proche-Orient un État à caractère juif?</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Le mieux que l'on puisse espérer, comme dans tout conflit tragique entre deux peuples, c'est un long processus d'adaptation psychologique, en enseignant dès le plus jeune âge la tolérance, le respect de la dignité humaine à la lumière des méfaits commis sur soi par les autres, mais aussi, et peut-être surtout, à la lumière des méfaits que l'on a soi-même commis sur l'autre.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Mais aujourd'hui, à Gaza, c'est le Hamas qui cherche à nourrir le feu de la haine. Aujourd'hui, un manuel d'histoire commun pour les lycéens français et allemands existe. Il suffit de feuilleter un manuel d'instruction civique français des années 1920 pour mesurer le chemin parcouru. À cette époque, les Allemands étaient dépeints comme des tueurs d'enfants français avec lesquels aucune réelle paix ne serait jamais possible.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Ainsi, si la paix a été possible entre ces deux peuples malgré les nombreuses guerres et les millions de morts de chaque côté, elle devrait l'être entre les Israéliens et les Palestiniens, dont les conflits sont loin d'avoir été aussi sanglants qu'entre la France et l'Allemagne.<i> — Arno Klarsfeld, ancien avocat des Fils et filles de déportés juifs de France, publié dans </i>Le Monde<i>, 17 juillet 2014.</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-78122906391199657072014-06-14T15:00:00.001+02:002014-06-14T15:06:00.971+02:00Alain Touraine: réinventons le politique<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj2d-5YQ8PTpNp08rDLExD5pJGccbnEU3oCpO2E-dEALwysShmOrIU0mkNsVQQqUgitzbvEnlBRxpckWd8Npkd78yqJe-G_lqRuF2KMOipizQk0cvo-GoXOCPnoqlTFle-9BpdXT1yboo68/s1600/Hercules-and-the-Hydra.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj2d-5YQ8PTpNp08rDLExD5pJGccbnEU3oCpO2E-dEALwysShmOrIU0mkNsVQQqUgitzbvEnlBRxpckWd8Npkd78yqJe-G_lqRuF2KMOipizQk0cvo-GoXOCPnoqlTFle-9BpdXT1yboo68/s1600/Hercules-and-the-Hydra.jpg" height="265" width="400" /></a></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"><br /></i></span></div>
<div style="text-align: center;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: blue; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"><a href="https://sites.google.com/site/libratextu/libertes-pour-le-present/2014-06-alain-touraine" target="_blank">Lecture dans dossier, cliquer ici.</a></span></span></div>
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<span style="color: #222222; font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"><br /></span></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i><b>Réinventons le politique. — </b>Les récentes élections montrent avant tout un écroulement de notre système politique. Ce qui frappe l'opinion est la montée rapide du Front national. Nous avons vécu pendant un siècle dans une société industrielle, dans laquelle les acteurs politiques correspondaient aux acteurs sociaux les plus importants. Or nous en sommes sortis. Ce n'est plus en termes sociaux qu'on peut comprendre les conduites politiques ou culturelles. Et le fait premier est la mondialisation.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>La France est divisée entre ceux qui vivent dans les zones de communications mondialisées et ceux qui sont rejetés à la périphérie, qui croient être attirés par la vie rurale et qui se trouvent isolés dans les zones sans emploi ni service public, où le prix de l'essence les jette vite dans la misère. Grand renversement. Ces catégories populaires ne se battent plus contre les riches. Elles se battent pour leur survie et pour ce mot qui porte toutes les catastrophes et tous les crimes: leur identité.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>La droite parlementaire n'a presque jamais été dominée par les libéraux, en dehors de la présidence de Giscard. Elle a été dominée par les gaullistes. Mais la droite n'est pas au service du développement économique dans un pays où Thomas Piketty vient de nous rappeler que l'héritage est un chemin plus sûr vers la richesse que l'entreprise et le travail.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>La droite est une coalition de notables régionaux, alors que les noyaux centraux de l'économie passent aux mains de la finance internationale ou restent liés à l'État. Nicolas Sarkozy, en se rapprochant de l'électorat du FN à la fin de sa présidence, a compromis les chances de son parti, car le FN est plus unifié et plus dynamique que les écuries présidentielles qui forment l'UMP.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>À gauche, la situation est assez simple à définir. Depuis 1936, elle a été dominée par le Parti communiste, qui a gardé une position dominante pendant la longue guerre froide. François Mitterrand, en bon tacticien, a pensé qu'il devait passer par le PCF pour arriver avec les socialistes au pouvoir. Il y est parvenu en 1981 avec un programme de nationalisations presque révolutionnaire. Illusion d'optique qui a été vite contredite par les faits.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>En 1983, l'économie gérée par François Mitterrand s'écroule et c'est Jacques Delors qui la sauve de la catastrophe. Ce qui permettra à Michel Rocard de devenir premier ministre, mais surtout ce qui convaincra vite le président qu'il doit se débarrasser de son premier ministre, qui avait compris, lui, qu'on ne peut mener une politique économique et une politique sociale qu'associées l'une à l'autre et non pas en guerre l'une contre l'autre. Après l'élimination de Michel Rocard, la gauche n'est plus jamais revenue à la direction du pays, au moins jusqu'à 2012, et encore sans projet et sans débat.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Cet épuisement d'un système politique n'a rien de catastrophique par lui-même; il n'est pas étonnant que, dans un monde où tout change, les catégories politiques doivent se transformer elles aussi.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Ce qui rend le problème plus difficile est que les Français ont essayé de trouver de nouvelles solutions. À gauche, ce sont les Allemands qui ont fait naître un parti écologiste vigoureux et novateur, mais qui a connu rapidement le déclin. En France, les écologistes ont toujours été divisés, avec une forte composante gauchiste, et au total se sont moins occupés de l'écologie que de leur accès au pouvoir. Comme les socialistes, les écologistes ont eu des dirigeants très innovateurs, mais, dans les deux cas, ceux-ci ont été éliminés, Michel Rocard chez les socialistes, Daniel Cohn-Bendit chez les écologistes.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>C'est donc après l'épuisement des acteurs politiques des sociétés industrielles et après l'échec secondaire des nouveaux acteurs, les écologistes et les centristes, que le caractère inévitable d'un renouvellement profond s'est imposé.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>L'Espagne, durement touchée par la crise, est aussi ce pays où ceux que Stéphane Hessel avait appelés «les indignés» ont créé un nouveau parti de gauche. Cas plus complexe, la France a toujours donné la priorité aux problèmes politiques sur les problèmes économiques et sociaux. Marx l'a dit en 1848. Il n'a jamais été démenti et le «succès-échec» de François Mitterrand est la meilleure preuve de cette définition politique de la France. Ce pays fut fier d'être appelé «la grande nation» et il est toujours resté plus attaché à l'héritage de ses révolutions qu'aux problèmes internes de la société industrielle.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>La France n'a jamais atteint le niveau d'industrialisation de la Grande-Bretagne ou de l'Allemagne, mais elle a constamment joué dans la politique, dans les idées et même dans la guerre le premier rôle. C'est cette domination des orientations politiques et nationales sur les orientations sociales qui a toujours conduit la majorité des historiens français à résister à l'idée, si brillamment exposée par Zeev Sternhell, que le fascisme était une invention française, et c'est pour cette même raison que ce type d'analyse m'apparaît une erreur d'interprétation et donc une erreur politique face à la montée du FN.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">La montée puissante du FN ne veut pas dire que cette montée soit irrésistible. Le problème central est au contraire celui-ci: la gauche, plutôt que la droite, qui me semble manquer d'une orientation générale, est-elle capable de sortir du monde imaginaire où elle s'égare, et peut-elle réussir le grand saut qui lui redonnera la vie en la plaçant dans la réalité du monde, tel qu'il existe au début du XXI<span style="font-size: xx-small;">e</span> siècle?</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Le renouvellement de la gauche suppose en premier lieu que celle-ci transforme sa vision des acteurs économiques. A la fois parce que l'économie est mondialisée et parce que sa capacité d'entreprise est de plus en plus associée à la science et à l'innovation et non plus au capitalisme financier, il est indispensable de défendre en bloc les intérêts du travail contre toutes les formes de profit qui ne sont pas liées à la création économique.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Le redressement de notre économie après la guerre n'a été possible que parce que le thème de la modernisation a été associé à celui de la justice sociale et à celui du redressement national. Nous savons tous que n'importe quel gouvernement dans les années qui viennent sera jugé sur sa capacité de parvenir à retrouver la croissance et de faire reculer le chômage.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Toute l'Europe peut attendre de la France et aussi de l'Italie que ces pays, au lieu de faire tourner leurs politiques jusqu'alors sociales-démocrates vers la droite, comme le firent les Anglais et les Allemands, réunissent les objectifs économiques et sociaux, en remettant en marche la mobilité sociale et en transformant l'enseignement. Nous savons que la France n'est pas sur le plan de la science et de l'innovation un pays en retard comme le sont tant de pays européens.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Il est plus difficile de demander aux Français, et en particulier à la gauche, de transformer leur conception des acteurs sociaux que leur représentation du système économique. Nous sommes entrés dans un monde où, le capitalisme s'étant répandu partout, on assiste à une poussée de l'individualisme consommateur. Nulle ne songe à faire l'éloge de la pauvreté aujourd'hui, mais l'individualisme, qui attire en particulier la jeunesse de gauche, n'est pas orienté vers la consommation mais vers l'exigence de dignité, mot qui me semble porter autant de puissance de changement que le mot de solidarité, il y a cent cinquante ans, ou même le mot de fraternité le jour de la fête de la Fédération, le 14 juillet 1790. C'est ici que nous rencontrons le principal terrain de lutte de l'esprit démocratique aujourd'hui. Nous avons imposé les droits de la majorité; nous devons maintenant faire respecter les droits des minorités.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Qui ne souffre pas de voir la froideur ou, au mieux, la tiédeur avec lesquelles on parle des problèmes de la jeunesse, à l'école, dans l'université, sur le marché du travail? Nous voyons monter partout dans le monde l'obsession de l'identité, la peur de l'autre, l'assassinat des minorités. Contre ce triomphe glacial de la mort et de l'interdit, seule la passion de la diversité, mais fondée sur la croyance en l'universalisme des droits fondamentaux, peut nous faire choisir l'ouverture au lieu de la fermeture, l'innovation au lieu du refus.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Qu'on ne me reproche pas de fuir les problèmes les plus concrets par un saut dans les idées trop générales. Rien n'est plus concret que l'animation de la vie politique et des institutions par les espoirs, les revendications et la conscience des droits. Les politiques en creux, qui ne parlent que d'exclusion, d'interdiction, de privilèges, ont rompu toute communication avec les exigences du corps et de l'esprit que doit mobiliser l'action politique pour renverser les barrières élevées par les intérêts et les préjugés. Contre la montée du FN, l'erreur la plus grave qu'on puisse commettre est d'armer la police, de créer un nouveau 6 février 1934.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Chacun l'a bien senti au cours des récentes élections: c'est le même mouvement, c'est la même faiblesse du système politique, le même vide de la pensée et de l'action qui conduisent les uns vers l'abstention et les autres directement vers le FN. Et ce n'est pas en traitant une partie importante de l'électorat comme une masse inférieure qu'on redonnera vie à l'exigence de liberté et de dignité sans laquelle la démocratie n'est plus qu'un chapitre dans un manuel de droit.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </i>Nous avons besoin de décisions, de réformes, d'innovations, mais beaucoup plus encore, et de manière urgente, de volonté et de capacité d'agir pour empêcher les ruptures et la violence et apprendre à nouveau à vivre ensemble. <i>— Alain Touraine, </i>Le Monde <i>des 8 et 9 juin 2014.</i></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> Fondateur du Centre d'analyse et d'intervention sociologique de l'EHESS à Paris (CADIS), Alain Touraine a suivi et étudié le mouvement antinucléaire, la démocratisation en Amérique latine, et la Pologne communiste aux côtés du syndicat Solidarnosc. </i><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;">La fin des sociétés</span><i style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> est son dernier ouvrage, paru aux éditions du Seuil en 2013. </i><i style="background-color: white; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"><span style="color: blue;"><a href="http://alaintouraine.blogspot.fr/" target="_blank"><span style="color: blue;">Il anime régulièrement ici son propre blog</span></a>.</span></i></span><br />
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"><br /></i></span>
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: 24.639999389648438px;"><span style="font-size: xx-small;"> © Hercule et l'Hydre de Lerne, non identifié.</span></span></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-14942575489805476132014-06-12T17:38:00.000+02:002014-06-12T20:06:29.282+02:00Jean-Luc Godard: Le cinéma, c'est un oubli de la réalité<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<br /></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiAPAQwEAo1DCXwwpOCR_80WTCR-vQaQNPtEH0-WyDFbm948uYYjPdLfTusb97BCyiein2aQk33agkn42i6bEzCY93uJE_OwAHfZhqnepDgu0UhIHAYtFDoLhy3hOg7dMn1jExjh0GXhlr7/s1600/Adieu-Au-Langage-Screens-4.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiAPAQwEAo1DCXwwpOCR_80WTCR-vQaQNPtEH0-WyDFbm948uYYjPdLfTusb97BCyiein2aQk33agkn42i6bEzCY93uJE_OwAHfZhqnepDgu0UhIHAYtFDoLhy3hOg7dMn1jExjh0GXhlr7/s1600/Adieu-Au-Langage-Screens-4.jpg" height="265" width="400" /></a></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<br /></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://sites.google.com/site/dossierjeanlucgodard/4-documentation/2014-oubli-du-cinema" target="_blank"><span style="color: blue;">Lecture dans dossier, cliquer ici.</span></a></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<text-align: justify=""><i> </i></text-align:><i>Le Monde</i>, 12 juin 2014. Deux heures d'entretien, réalisé à Paris mardi 27 mai, au domicile de son assistant, Jean-Paul Battaggia, avec Philippe Dagen et Franck Nouchi.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><br /></i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><i>Le Monde. — Comment analysez-vous ce qui se passe actuellement en Europe? Vous avez peut-être envie de mettre votre grain de sel</i><i>...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Oui, j'ai mon opinion<i>...</i> J'espérais que le Front national arriverait en tête. Je trouve que Hollande devrait nommer — je l'avais dit à France-Inter, mais ils l'ont supprimé — Marine Le Pen premier ministre.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Pour quelles raisons?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Pour que ça bouge un peu. Pour qu'on fasse semblant de bouger, si on ne bouge pas vraiment. Ce qui est mieux que de faire semblant de ne rien faire<i> (rires)</i>. Du reste, on oublie toujours que le Front national avait deux sièges au Conseil national de la Résistance. À l'époque, c'était une organisation paracommuniste. N'empêche qu'elle s'appelait Front national<i>...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Ce n'est qu'une synonymie...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Non. Si on dit que ce n'est qu'une synonymie, on reste dans les mots, pas dans les faits. C'est un fait. Vu l'importance de la nomination, et de nommer, bien sûr, que c'est une synonymie<i>...</i> Le premier ministre du Luxembourg s'appelle Juncker. C'était aussi le nom d'un bombardier allemand <i>[Junkers]...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Un </i>Junker<i>, c'est aussi un aristocrate prussien...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Les hobereaux allemands de l'époque. Encore faut-il s'intéresser à la linguistique<i>...</i> Je ne sais pas si vous connaissez un petit film de Michel Gondry, très joli, une conversation avec Chomsky. C'est un travail incroyable qui, à la longue, devient un peu répétitif<i>...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Tous ces votes, un peu partout, en France, au Royaume-Uni, au Danemark, ça traduit quoi?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Ça traduit mon cas. Je ne suis pas pour eux. Il y a longtemps, Jean-Marie Le Pen avait demandé que je sois viré de France. Mais j'ai juste envie que ça bouge un peu<i>...</i> Les grands vainqueurs, ce sont les abstentionnistes. J'en fais partie depuis longtemps.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Pourquoi cette incapacité à bouger?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Ils sont soit trop vieux, soit trop jeunes. C'est comme ça. Regardez ce prix donné à Cannes, à moi et à Xavier Dolan que je ne connais pas. Ils ont réuni un vieux metteur en scène qui fait un jeune film avec un jeune metteur en scène qui fait un film ancien. Il a même pris le format des films anciens. Au moins qu'on dise ça<i>...</i> Pourquoi ils ne bougent pas? C'est bien fait pour eux. Ils veulent un chef, eh bien, ils ont un chef. Ils veulent des chefs, ils ont des chefs. Et, au bout d'un moment, ils en veulent au chef de ne pas bouger, alors qu'eux-mêmes n'y arrivent pas. J'ai appris, il y a longtemps, qu'il y a un seul endroit où on peut faire changer les choses: c'est dans la façon de faire des films, disons dans le cinéma. C'est un petit monde. Ce n'est pas un individu seul, c'est une cellule vivante de société. Comme cette fameuse cellule qui sert à tout le monde, la <i>Bacteria...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </b><i>Le Monde. — </i>Escherichia coli<i>...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Voilà! Si l'on faisait une métaphore sociologique, je n'aime pas tellement le mot sociétal qu'on emploie aujourd'hui, ce serait la naissance, l'adolescence, puis la mort d'un film. Ça se passe sur trois quatre mois, maximum cent personnes pour une grosse production, trois pour nous<i>...</i> C'est le seul endroit, vu qu'il y a peu de monde, où on pourrait changer au moins la façon de vivre de cette petite société<i>...</i> Eh bien, non<i>...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; font-style: italic;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </b><i>Le Monde</i>. <i>— Si, la preuve: vous...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Un individu, de temps en temps. Mais l'individu ne suffit pas non plus. C'est ce que disait cet Allemand qui s'était fait élire à la Convention, le baron de Klootz — il a été guillotiné. Il disait: «<i>France, protège-toi de l'individu.</i>» Le cinéma, c'est le seul endroit où quinze, vingt, cent personnes pourraient décider de faire leur propre travail autrement…</div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </b><i><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde</i>. <i>— La cellule Godard...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Il n'y a pas de cellule Godard, non. Il y a toujours le désir qu'un petit groupe arrive à changer les choses. Ç'a été un petit moment — la Nouvelle Vague. Un tout petit moment. Si j'ai un peu de nostalgie, c'est ça. Trois personnes, Truffaut, moi et Rivette, certains oncles comme Rohmer, Melville, Leenhardt… C'étaient trois garçons qui avaient quitté leur famille. Rivette, comme Frédéric Moreau, était parti de Rouen. François, moi, on recherchait une autre famille que la nôtre.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Est-ce que vous aviez le sentiment d'avoir quelque chose en commun tous les trois? Et est-ce que vous pouviez le nommer?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Non. Ce qui est bien, c'est qu'on ne le nommait pas.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Ça s'éprouvait, mais ça ne se disait pas...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — On était bien sûr influencés plus ou moins chacun par les siens, moi par la littérature, je pense, à cause de ma mère, qui lisait beaucoup et qui me permettait de piocher dans sa bibliothèque. Enfin, pas tout<i>...</i> Pas <i>Autant en emporte en vent</i>, qui était un ouvrage trop subversif<i>...</i> Je me souviens que, chez ma grand-mère, en France, les ouvrages de Maupassant, parce qu'il y avait des figures de femmes nues en couverture, on les mettait tout en haut de la bibliothèque. Je lisais des revues comme <i>Fontaine</i>, <i>Poésie 84</i>, des auteurs comme André Dhôtel — c'est un bon romancier, avec un côté Ramuz français —, Louis Guilloux, <i>Le Sang noir</i>, des choses comme ça<i>...</i> Même si on divergeait sur plein de choses, on s'entendait sur deux ou trois trucs<i>...</i> Notre ambition, c'était de publier un premier roman chez Gallimard. Ce qu'avait fait Schérer — Éric Rohmer — avec son premier roman<i>...</i> C'était très lié aux découvertes que nous faisait faire la Cinémathèque.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Et puis vous aviez envie, tous les trois, de faire découvrir un certain cinéma américain...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — On se rendait compte qu'il y avait aussi un côté capitalistes contre certains metteurs en scène qu'on aimait… Don Siegel, Edgar George Ulmer, d'autres encore, qui faisaient des films en quatre jours, et dans lesquels il y avait des choses que n'avaient pas les autres. On les a soutenus, on les a encensés, même exagérément, à une époque où ils étaient vomis. C'était l'époque des accords Blum-Byrnes. Rivette et François étaient plus mordants que moi à l'époque. J'étais plus prudent, plus paresseux. Dans cette sorte de caverne d'Ali Baba d'Henri Langlois, il y avait un monde qui pouvait être à nous, vu qu'il n'était à personne.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — À quand remonte votre passion du tennis?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — J'en avais fait, jeune. Quand je suis venu à Paris, en 1946-1947, j'ai tout arrêté. Puis j'ai repris, par période, petit à petit, en me rendant compte que c'était le seul endroit où quelqu'un me renvoyait la balle — dans les autres endroits, on ne me la renvoie pas, ou alors ils jouent avec, mais ils ne me la renvoient pas<i>...</i> Même en psychanalyse <i>(rires)</i>!</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Serge Daney disait que vous étiez le seul cinéaste qui, en conférence de presse, renvoyait toujours la balle...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Oui, oui, j'essayais de prendre la sottise que pouvait me dire une journaliste, sud-coréenne ou je ne sais quoi, pour aller voir s'il n'y avait pas quelque chose<i>...</i> D'inventer par rapport à ça. En football, aussi, on pourrait peut-être un petit peu changer les choses<i>...</i> Mais ils n'ont pas les moyens intellectuels, culturels. Ils ne jouent qu'avec leurs pieds. Tandis que, dans la petite cellule du cinéma, il y a de tout, des moyens, de la culture, de l'argent, de l'amour, de la création artistique, de l'économie<i>...</i> Les gens disent «le cinéma», mais en fait ils veulent dire «les films». Le cinéma, c'est autre chose. Il y a une anecdote, je ne sais pas si elle est vraie, sur Cézanne. Il peint pour la centième fois la montagne Sainte-Victoire. Quelqu'un passe et lui dit: «<i>Oh, elle est belle, votre montagne!</i>» Cézanne: «<i>Foutez-moi le camp, je ne peins pas une montagne, je peins un tableau.</i>»</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Dans </i>Adieu au langage<i>, à un moment, il y a une boîte de couleurs, de l'aquarelle. Faut-il en déduire que, pour vous, peindre, c'est un des derniers langages qui existent?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — J'avais fait cela en espérant que quelqu'un, pour lui-même, penserait qu'il y a là quelqu'un qui a un encrier et de l'encre — le noir, l'impression —, et puis, de l'autre, il y a une boîte de couleurs. Penserait que, d'un côté, il y a le texte, et de l'autre, l'image. Ici, si on était tous les deux, je prendrais plutôt une boîte de couleurs, et puis, vous, je vous laisserais l'encrier. Les gens me demandent ce que ça veut dire. Moi, je filme un état de fait.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Dans les </i>Cahiers du cinéma<i>, vous aviez interrogé Robert Bresson sur l'importance de la forme. La première chose qu'il vous a dite, c'est: «</i>Je suis peintre<i>»...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Il était peintre, oui. Je n'ai jamais vu ses peintures.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Vous êtes d'accord avec lui sur l'importance première accordée à la forme?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Non, je dirais qu'il y a un aller et retour. J'aime utiliser l'image de plonger et de remonter à la surface. On part de la surface et on va au fond. On remonte ensuite<i>...</i> Des choses comme ça<i>...</i> Bresson a écrit un petit bouquin, très bien, qui s'appelle Notes sur le cinématographe. Il disait: « Sois sûr d'avoir épuisé tout ce qui se communique par l'immobilité et le silence.» Aujourd'hui, je ne suis pas sûr qu'on l'ait épuisé!(Rires.)</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Pialat aussi avait pensé qu'il allait devenir peintre...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Son <i>Van Gogh</i> est un très très beau film. Le seul, sans doute, qu'on ait pu faire sur l'art. Je n'aime pas tout chez lui, et puis il était difficile de caractère. Souvent, quand les cinéastes essaient de filmer les peintres, c'est une catastrophe!</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Sans regret pour Cannes de ne pas être venu?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Ça n'existe plus.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Ça ne sert à rien, les festivals?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Ça ne devrait pas être fait comme ça. Encore un endroit où on devrait faire autrement.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Comment?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Je ne sais pas, on pourrait faire en sorte — au conseil des ministres aussi, d'ailleurs — que les délibérations du jury ne soient pas secrètes. On pourrait faire que les films ne passent pas que dans une seule salle<i>...</i> Regardez la liaison entre ça, le spectacle et la manière de gouverner. Cette idée du sauveur suprême<i>...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Vous voulez dire que la structure ultra-hiérarchisée du Festival de Cannes mime la société française?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — C'est l'histoire de la nature et de la métaphore. La métaphore n'est pas une simple reproduction, une image, c'est autre chose.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Ça peut en être l'aggravation...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Je ne sais pas. On ne peut pas remplacer un mot par un autre. Le mot «parole» en français n'existe pas dans d'autres langues. Je regrette de ne pas savoir plus de langues, mais pour ça, il faut voyager. Et il ne faut pas voyager trop jeune non plus; et puis après, ça devient un peu tard, c'est difficile<i>...</i> Mais, par exemple, le mot «parole» n'existe ni en allemand ni en anglais. En chinois, je ne sais pas; en finlandais ou en hongrois, je ne sais pas non plus. J'aimerais bien savoir<i>...</i> Les Allemands disent <i>sprechen</i>, qu'on traduit par «la langue». Mais la langue n'est pas la même chose que la parole. Qui elle-même n'est pas la même chose que la voix. Comment c'est apparu? Qu'est-ce qui vient en premier? Un ensemble de cris et d'images je crois<i>...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Adieu au langage...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — J'ai lu quelques critiques. Ils croient que ça prend un caractère biographique! Or, pas du tout.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — «Adieu», en Suisse, c'est aussi une manière de dire bonjour...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Ça, c'est dans le canton de Vaud, tout à fait. Il y a les deux sens, forcément.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — En sculpture ou en peinture, on peut laisser une part au hasard. Au cinéma aussi?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Oui, tout à fait.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Le système n'est pas trop contraignant?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Il n'y a pas de système. Enfin, il y en a un, mais si vous quittez l'autoroute, vous pouvez prendre les chemins de traverse dont parlait Heidegger.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Votre chien, Roxy, n'est pas avec vous. Vous l'avez laissé en Suisse?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — On ne peut pas voyager avec lui. Il a son monde. On ne va pas le déplacer, lui faire connaître d'autres mondes<i>...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Que vous apporte Roxy?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Un lien, entre deux personnes. Le lien dont parlait ce vieux philosophe qui était le prof de ma mère, Léon Brunschvicg. C'était une des sommités de la philosophie française à l'époque. J'ai lu un petit livre de lui qui s'appelait Descartes et Pascal lecteurs de Montaigne. Descartes, je sais, Pascal, je crois, et Montaigne, je doute. Il disait l'un est dans l'autre et l'autre est dans l'un. Je trouve intéressante, très vivante, cette sensation de trois personnes. J'aime au cinéma, non pas l'image contre le texte, mais ce quelque chose d'avant le texte, qui est la parole.</div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Le langage, c'est, pour employer le verbe «être», parole et image. Non pas la parole, la voix ou la parole de Dieu, quelque chose d'autre qui ne peut pas vivre sans l'image. Dans l'image au cinéma, il y a autre chose, une espèce de reproduction de la réalité, une première émotion. La caméra est un instrument comme, chez les scientifiques, le microscope ou le télescope. Vient ensuite l'analyse des données — on dit les données, mais elles sont données par qui? <i>(Rires.)</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </b><i>Le Monde. — En fait, ce dont vous parlez, ce serait une sorte d'état premier de la perception...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — De la réception, de la perception, de la réfraction. J'ai toujours été intéressé par ceux qui étaient en marge de ça, des philosophes comme Canguilhem ou Bachelard. Un petit bouquin comme <i>La Philosophie du non</i>, Bachelard l'écrit à l'époque où de Gaulle était à Londres. Moi, je fais toujours un rapport. Ensuite, est-ce que celui à qui il envoie la balle accepte, lui, de considérer cette balle comme un rapport? De faire son rapport à lui? Et de m'envoyer un autre rapport?</div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Je suis toujours surpris quand l'État demande des rapports. Il n'y a jamais même une photo dans un rapport. On ne rit jamais en lisant un rapport! Il faut essayer de comprendre un peu, à sa façon, ce que Heisenberg a pu trouver, ses disputes avec Bohr au début de la mécanique quantique<i>...</i> J'ai essayé de faire un film avec Ilya Prigogine… J'ai fait une fois un interview de René Thom sur les catastrophes. Il était très sympathique. Aujourd'hui, il doit être considéré comme un <i>has been</i><i>...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Ça peut-être aussi un commencement. Regardez par exemple Jacques Monod...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Un demi-oncle à moi<i>...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Avec François Jacob, ils ont découvert le code génétique, l'alphabet de la génétique. Cet alphabet, aujourd'hui encore, on s'en sert...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Tout à fait. Je me souviens d'une émission sur RTL, «Le Journal inattendu». Monod m'avait invité, à la fois en tant que petit cousin et cinéaste. Et il parlait d'ADN, d'ARN<i>...</i> Il disait que ça va dans un sens, de l'ADN vers l'ARN. Et moi, je lui avais dit que ça pouvait aussi aller dans l'autre sens. Il avait dit: «<i>Jamais!</i>» Quelques années après, un nommé Howard Temin a découvert la transcriptase inverse!</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Il a eu le prix Nobel pour ça!</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — J'étais très fier d'avoir trouvé ça. <i>(Rires.)</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Le virus du sida a été découvert de cette manière. En postulant qu'il pourrait être un rétrovirus, fonctionnant à l'envers...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Ah bon? Anne-Marie dit que, sur ma tombe, elle écrira: «Au contraire». <i>(Rires.) </i>On peut enregistrer au moins des choses comme ça dans un film. Après, les gens en font ce qu'ils veulent. On pourrait faire ça, mais on ne le fait pas. Dans un petit monde, qui ne fait de mal à personne, on pourrait. Mais on préfère un grand monde qui fait du mal à beaucoup de gens.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Dans </i>Godard au travail<i>, l'ouvrage d'Alain Bergala, on comprend que votre méthode de travail est différente selon les films. Quelle fut-elle sur </i>Adieu au langage<i>?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Mais il n'y a pas de méthode. Il y a du travail.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Vous voyez pourtant ce que je veux dire...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Oui, mais si on le voit, ça ne peut presque plus se dire. Il faudrait sinon arriver à dire autrement ce que le film ne peut pas dire. Le journaliste pourrait arriver à le dire, mais il ne le fait pas. Il pourrait publier d'autres photos, d'autres choses<i>...</i> À force de jeux de mots, on peut petit à petit trouver une méthode de travail. Au tennis, il y a le contre-pied, en boxe, le contre. Tout ça, ce sont des images qui disent que Roland-Garros pourrait être fait autrement. Or ce n'est pas filmé. On ne suit pas le jeu, on ne suit pas le match. Il faut être au moins sur place pour arriver à suivre. Ce que fera Dany Cohn-Bendit, dans le football, au Brésil, c'est nul. Pauvre Dany!</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Pourquoi? Ça peut être bien?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Mais il ne peut pas. Il ne voit pas. Il a fait 68, il l'a un peu créé. Ensuite il a écrit <i>Forget 68</i>, et il est allé au Parlement européen. Et quand l'Europe, son Europe, va mal, il quitte le bateau. C'est triste.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Les caméras, à Roland-Garros, vous les mettriez où?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — On a essayé<i>...</i> On ne pouvait pas, on n'avait pas le droit d'aller sur le terrain, même déguisés en ramasseurs de balles. J'aurais évidemment fait le film d'un ramasseur de balles. Je voulais voir autrement<i>...</i> Sur la peinture, les textes de Sartre m'ont beaucoup intéressé. Il m'a fait connaître des tas de peintres comme Fautrier, Rebeyrolle, le Tintoret<i>...</i> Les textes critiques de Sartre sont magnifiques, tout comme certains textes de Malraux ou encore de Sollers. Je cite souvent Philippe quand on critique mon goût des citations. Les citations sont des preuves. Il sous-titrait l'<i>Olympia</i> de Manet: «<i>Portrait d'une anarchiste</i>». Vous n'êtes pas d'accord? Discutons<i>...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Cette interprétation de l'</i>Olympia<i>...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Mais ce n'est pas une interprétation<i>...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — À partir du moment où vous mettez ces mots sous le tableau, vous forcez le regard à aller dans une certaine direction...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Tout à fait. Mais ensuite on peut aller dans bien d'autres directions<i>...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Il y a chez Sollers une manière de prendre possession...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Tout à fait<i>...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span>Le Monde. — ... de la peinture d'une façon qui s'intègre à son propre système...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Oui, mais à un moment, il voit des choses<i>...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — De manière très péremptoire...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Je me souviens d'un article de lui sur Mauriac qui faisait une conférence<i>...</i> À une femme qui lui parlait, Mauriac disait quelque chose comme: «<i>Rangez votre petit sac, madame.</i>»Sollers avait vu ça. Il y avait là tout à coup un point de vue, et non pas un point d'écrit, si j'ose dire.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Pour en revenir à Roxy, ce serait absurde de penser que vous aimeriez voir le monde avec ses yeux?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — C'est ça, en partie. Avec Anne-Marie, c'est ce qu'on fait un peu à l'aide d'un déluge de preuves, qui viennent de Rilke, de Buffon, de ceci et de cela. Les trois quarts des phrases que j'utilise, je ne sais plus d'où elles viennent et je ne m'en préoccupe plus. La liste des gens au générique est plus ou moins vraie, ou plus ou moins fantaisiste. Je note juste la phrase. Par exemple: «<i>Il n'y a pas de nudité dans la nature. L'animal n'est pas nu parce qu'il est nu.</i>» Si j'étais critique, je dirais que je ne comprends pas très bien. Ou que je ne suis pas sûr de comprendre. Pas nu parce que nu<i>...</i> Mais en même temps, ça fait divaguer un peu, ça fait glisser, ça suffit<i>...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Vous êtes déjà en train de réfléchir à votre prochain film?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Ah non, pas du tout. Peut-être que je n'en ferai pas, ou sinon des petits films, comme la Lettre à Gilles Jacob. C'était une lettre privée, mais il a décidé de la rendre publique. C'était pour dire: voici comment avec un simple petit appareil du commerce, moi qui sais à peine m'en servir, on peut écrire et envoyer une lettre. Ce que les gens ne font pas. Ne fût-ce que joindre une photo, une image, une légende, à votre bonne amie, sur votre vie privée. Un échange. Mais même si je fais ça, on ne me renvoie pas la balle.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — C'est-à-dire?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Eh bien, la bonne amie ne me répond pas. Gilles Jacob ne m'a pas répondu. Qu'est-ce que vous voulez qu'il dise? Ça ne l'intéresse pas. Ou il ne voit pas. Il ne voit même pas que je me souviens qu'il avait une revue qui s'appelait Raccords. Je lui dis: «<i>J'espère que tu trouveras un bon raccord avec ta prochaine destinée.</i>»</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Dans le film, à de nombreuses reprises, vous faites des expérimentations techniques sur l'image. Ce que font les artistes vidéo, ça vous intéresse? Bill Viola, vous allez le voir au Grand Palais?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Non, je déteste. Tout comme Bob Wilson. C'est du scénario. Du texte écrit, mis en image, souvent brillant<i>...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Il y a des cinéastes, aujourd'hui, qui vous épatent...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Les neuf dixièmes, je ne les connais pas. À Paris, je n'ai plus envie de rôder dans les rues pour aller voir un film. Juste peut-être le film syrien montré à Cannes, et puis le film de Sissako, j'avais vu <i>Bamako</i> en DVD<i>...</i> Mommy, je n'irai pas. Je sais ce que c'est. Les trois quarts des films, on sait ce que c'est juste par le petit récit qu'il y a dans <i>Pariscope</i>. «Un aviateur aime une dentiste<i>...</i>»</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Vous pensez que la démocratie est morte?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Non, mais elle ne devrait pas s'exercer comme cela. Il y a peut-être d'autres moyens. C'est souvent à la naissance des choses qu'on peut les voir. C'est pour ça que c'est intéressant, souvent, de revenir en arrière. Récemment, j'ai eu envie de relire, de Malraux, <i>Les noyers de l'Altenburg</i>. Je l'ai trouvé dans La Pléiade. Dans le même volume, il y a un immense texte, <i>Le Démon de l'absolu</i>, consacré par Malraux à Lawrence d'Arabie. Je ne le connaissais pas, c'est assez différent de livres comme <i>L'Espoir </i>ou <i>La Condition humaine</i>. Ne pas oublier non plus ce texte qui s'appelle De la Vistule à la Résistance, dans lequel Malraux décrit une attaque par les gaz sur le front polono-russe. Ne pas oublier non plus que Sartre a écrit <i>Morts sans sépulture</i>, qui traite des problèmes sans solution de la Shoah. Et que Malraux a tourné <i>L'Espoir</i> avant de l'écrire. Il avait besoin de faire plus qu'un livre. De faire autre chose. De faire un film. Un des premiers textes qui m'ait aidé, c'était <i>Esquisse d'une psychologie du cinéma</i>, écrit en 1946, mais que j'ai lu dans <i>Verve</i>, la revue de Tériade.</div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Malraux, Sartre, pour moi, ce sont des demi-dieux protecteurs. Quel est l'équivalent masculin de «muses»? Il n'y a pas de mot. J'aime beaucoup <i>Clio</i>, de Péguy. Clio, la muse de l'Histoire. Il disait: «<i>Nous n'avons que du livre à mettre dans un livre...</i>» Je l'ai mis dans <i>Histoire(s) du cinéma.</i> Le cinéma, ce n'est pas une reproduction de la réalité, c'est un oubli de la réalité. Mais on si enregistre cet oubli, on peut alors se souvenir et peut-être parvenir au réel. C'est Blanchot qui a dit: «<i>Ce beau souvenir qu'est l'oubli.</i>»</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Documentaire ou fiction, c'est un problème pour vous?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — C'est la même chose. On l'a dit à l'époque de Rouch, c'était évident. Même si Resnais, très vite, a eu besoin d'un scénario, d'un texte. Pareil pour Straub. Certains de ses films, magnifiques, viennent de Pavese ou de la Résistance… J'ai aimé Warhol quand il a fait un film de trois jours sur manger ou sur dormir. Je ne tenais pas une heure devant, mais quand même, quarante minutes, c'est déjà bien…</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — Lanzmann dit qu'il voudrait faire un film sur ce problème de la dialectique entre documentaire et fiction...</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — C'est un scénariste. On s'est un peu disputés quelquefois lui et moi. Mais c'était avec des mots. Dans un de mes films, j'ai mis une scène de lui, celle où il fait rejouer le coiffeur d'Auschwitz. C'était dans <i>Shoah</i>. C'était quelque chose! Ce n'était pas une mise en scène qui partait d'un texte, je vais faire ci, je vais le mettre là, et je vais parler de ça. Ça n'avait jamais été fait<i>...</i> <i>Le Chagrin et la Pitié</i>, d'Ophuls, c'est intéressant aussi. Il l'a fait au moment où il fallait le faire, même si ce n'est pas son plus beau film.</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </b>Le Monde. — C'est Hôtel Terminus?</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Jean-Luc Godard. — Oui. Avec son côté Groucho Marx quand il va interroger les gens!</div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-size: xx-small;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-size: xx-small;">© Photogramme: Jean-Luc Godard, <i>Adieu au langage</i>, 2014.</span></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-46303152665854348122014-06-03T16:59:00.000+02:002014-06-03T23:05:38.828+02:00Gilles Kepel: Le nouveau djihadisme<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhm28AEzQrQk8HVPaC8Ftct2U0YePEWb2bLck1TM9WvAZdJtWZ6lfcBX6SgdFNeKEkWkOZsDc0xK-lNgBDKg5W4qh3qHkqO47Zhcr2xTVIKvGk60mcHPTslhhyphenhyphenISUZir-yddC5BAfAaJca0/s1600/SRkQIIf.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhm28AEzQrQk8HVPaC8Ftct2U0YePEWb2bLck1TM9WvAZdJtWZ6lfcBX6SgdFNeKEkWkOZsDc0xK-lNgBDKg5W4qh3qHkqO47Zhcr2xTVIKvGk60mcHPTslhhyphenhyphenISUZir-yddC5BAfAaJca0/s1600/SRkQIIf.jpg" height="196" width="242" /></a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjG9F4azHshelB9ZaY38mAhNg7Lkt6fyiMLrzKEbdHhB3Lp7ZuD-CBoV3lcOZGoi8i_6h-bu4c_WE-y_Q9H5ulpAlzpKAHjRmIE4YHSyhIQKdJkqAcHcch4qu3uUz4JPiR4tGQQ4JZADHlM/s1600/tueur-bruxelles.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em; text-align: justify;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjG9F4azHshelB9ZaY38mAhNg7Lkt6fyiMLrzKEbdHhB3Lp7ZuD-CBoV3lcOZGoi8i_6h-bu4c_WE-y_Q9H5ulpAlzpKAHjRmIE4YHSyhIQKdJkqAcHcch4qu3uUz4JPiR4tGQQ4JZADHlM/s1600/tueur-bruxelles.jpg" height="196" style="cursor: move;" width="262" /></a></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"><br /></span>
<br />
<div style="text-align: center;">
<span style="background-color: white; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"><span style="color: blue;"><a href="https://sites.google.com/site/judaiecas/antisemitisme/2014-06-un-nouveau-djihadisme?pageMoved=Antis%C3%A9mitismes" target="_blank">Lecture dans dossier, cliquer ici.</a></span></span></div>
<br />
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><b>De Roubaix à Marseille, la cause syrienne fédère le nouveau djihadisme. — </b>En décembre 2013, au terme d'une enquête d'une année dans les cités de Marseille, Tourcoing et Roubaix, j'appris la mort de Sofiane — un enfant des quartiers populaires du Nord parti combattre en Syrie. Un coup de fil à la mosquée salafiste qu'il fréquentait avait annoncé qu'il était tombé en <i>chahid</i> (en «martyr») dans ce qui est devenu le principal camp d'entraînement des djihadistes d'Europe, et l'un des périls majeurs pour la cohésion de notre société.<br />
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Étudiant les voix des cités, à l'occasion de la première vague significative de candidats, aux législatives de juin 2012, issus de l'immigration maghrébine, j'y avais entendu à la fois la promesse largement majoritaire de l'intégration républicaine, mais aussi des paroles dissidentes qui incriminaient avec virulence l'impiété de la France. Elles faisaient fond sur un discours de rupture avec notre civilisation, dénoncée comme mécréante et islamophobe.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Après trois décennies d'enquêtes de terrain à travers les divers âges de l'islam de France, j'avais été frappé en 2013 par la prégnance du salafisme. Les affidés de cette doctrine, en <i>djellaba</i> raccourcie, barbe surabondante, souvent accompagnés de femmes en voile intégral, ou <i>niqab</i>, font désormais partie du paysage humain des cités — quand ils ne paradent pas au centre-ville, comme à Roubaix. Ce dogme établit une barrière étanche entre la communauté des adeptes, seuls détenteurs de la vérité assimilée à une lecture rigoriste de l'islam sunnite inspirée par certains oulémas saoudiens, et les «égarés» — <i>kuffar</i> (infidèles) ou «apostats» (tout musulman qui ne partage pas leur vision du monde), voués aux gémonies.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>À la base, la rupture salafiste n'est pas nécessairement violente — elle incite à partir vivre le «vrai islam» au Moyen-Orient ou au Maghreb, et à fuir la France. Mais elle est poreuse au <i>djihad</i> armé, pour peu qu'un <i>ouléma</i> de quartier, parfois autoproclamé, parfois instruit par Internet, mette ses fidèles sur cette voie, ou qu'un prédicateur des réseaux sociaux poste un <i>selfie</i> où on le voit depuis la Syrie, Kalachnikov en main, appeler en français populaire entremêlé d'arabe coranique à venir soutenir leurs Frères dans le djihad, avant de retourner les armes contre l'Occident, jusque dans la ville où l'on a grandi.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Ce fut le parcours, dès avant la Syrie, d'un Mohamed Merah à Toulouse, des frères Tsarnaïev à Boston. Le modèle de l'endoctrinement par les idéologues du nouvel âge du djihad est toujours identique: ils ne donnent plus une feuille de route précise à leurs sicaires, contrairement à Ben Laden qui, au début du siècle, missionnait ses tueurs sur des cibles prédéterminées, et finançait toute l'opération.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Les djihadistes de la deuxième décennie du siècle sont formatés et entraînés au maniement d'armes par leurs mentors — dont le plus prolixe est un ingénieur syrien formé en France, auteur de milliers de page en ligne, Abou Moussab Al-souri. Ils sont renvoyés dans leur Europe natale pour y faire imploser les sociétés pluralistes, y attaquer des cibles de proximité, peu défendues, afin de minimiser les coûts, et fortement chargées symboliquement, pour maximiser l'effet médiatique.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Le nouveau djihad post-moderne est un djihad de pauvres, qui veut rafler la mise. Grands rassemblements de foules, casernes, mais surtout lieux communautaires juifs, représentent les objectifs de prédilection pour l'effet de terreur qu'ils inspirent et leur immense chambre d'écho. Dans les manuels des doctrinaires, on escompte de la multiplication de ces violences et de leur médiatisation une crispation des sociétés occidentales contre l'ensemble des musulmans d'Europe, afin de susciter chez ceux-ci victimisation et solidarité face au sentiment «d'islamophobie», propice à augmenter la clôture communautaire et à déclencher, à terme, des guerres de religion sur le Vieux Continent, aboutissant à la constitution d'enclaves.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>La tuerie du Musée juif de Bruxelles s'inscrit point par point à la fois dans l'épure des nouveaux djihadistes, et dans le tissu social déchiré des cités à la dérive de la France d'aujourd'hui. Le suspect, natif de Roubaix et élevé dans le quartier de la Bourgogne à Tourcoing, où les mosquées salafistes sont particulièrement actives, a été interpellé fortuitement par les douanes en gare routière de Marseille, porteur d'armes semblables à celles du crime, et d'une vidéo où il revendique l'acte.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
Dûment signalé aux services spécialisés, il leur avait échappé peu après sa sortie de prison, parcourant le monde de l'Angleterre à la Thaïlande, et passant onze mois auprès du groupe salafiste djihadiste de l'Etat islamique en Irak et au Levant. Mais il avait pris, avec sa panoplie meurtrière, un autocar connu pour véhiculer des petits dealers d'Amsterdam à Marseille, particulièrement surveillé à ce titre. Le contraste entre le sang-froid du tueur présumé et ce comportement de pied nickelé est typique de ce nouveau djihadisme.</div>
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<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>La confusion du professionnalisme et de l'amateurisme, qui facilite l'arrestation, n'a pas d'importance, tant les petits soldats du djihad sont destinés au sacrifice sur le bûcher médiatique qui assure une extraordinaire publicité à la cause. Il en va de même de la confusion entre les mondes réel et virtuel, le carnage et un <i>war game</i>, les êtres humains et les avatars, entre lesquels la caméra GoPro, censée filmer les tueries pour en diffuser les images macabres sur les sites de partage, établit le lien. Mohamed Merah était sûr de susciter ainsi des milliers de «<i>like</i>» et d'adeptes djihado-numériques.</div>
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<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Comme lui, le suspect n'était pas connu pour sa piété, mais avait embrassé en prison – l'un des principaux incubateurs du djihadisme – une foi radicale et prosélyte. Toutefois, dans les deux cas, un environnement local ou familial où prévalaient les normes salafistes préexistait à l'incarcération, des cités de La Bourgogne à celles du Mirail. Et à Toulouse comme à Bruxelles a été visée une cible juive de proximité, comme il est recommandé dans l'Appel à la résistance islamique mondiale d'Abou Moussab Al-souri.</div>
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<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Mais un nouveau pas, particulièrement préoccupant, a été franchi. Merah ne pouvait se réclamer d'une cause très claire, et, en dépit du nombre de ses fans sur Facebook, il fut accusé d'être manipulé par des services obscurs. Aujourd'hui, le djihad en Syrie est devenu une grande cause, qui permet de recruter des sympathisants bien au-delà de la mouvance islamiste, voire du monde musulman. Après tout, la plupart des démocraties occidentales réclament l'élimination de Bachar Al-Assad — sans s'en être donné les moyens.</div>
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<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Certains historiens pressés ont même fait de ce pays «notre guerre d'Espagne». Mais dans ce vide immense entre les paroles vaines et l'action, le djihadisme s'est engouffré et a proliféré sur place — parfois sans doute manipulé par le régime pour faire imploser l'opposition. Comme si la chute du président syrien, ironiquement donné réélu ce 3 juin, n'était plus qu'un prétexte, comme si l'Europe n'avait plus à trouver, dans ce pays devenu le plus grand incubateur du djihad à son encontre, que son chemin de Damas. —<i> Gilles Kepel, politologue,</i> Le Monde<i>, 3 juin 2014.</i><br />
<i><br /></i>
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-size: x-small;">© Enregistrements vidéo du tueur entrant </span><span style="font-size: x-small;">au Musée juif de Bruxelles le 24 mai 2014,</span><span style="font-size: x-small;"> puis en sortant, après y avoir tué quatre personnes en moins de deux minutes.</span></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-36544505584750397962014-05-06T00:30:00.000+02:002014-05-06T09:36:49.656+02:00Philippe Méziat: The Fear, de Richard Cottan, 2012<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiPqg2vqZWfB_unE3SpvT-plb0k29MkJ4-0WbIUoderaIi1dKQ_sfiy_vqjLIky2LXvMtuOnbMCYxmAgtpKl8qCJoT-8AQwUplE8D2q7msTEIy4_DSxj05KDWwdC8W-l_vIssj2Ccby9714/s1600/Visuel+The+Fear+%E2%88%8F+DR-06.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiPqg2vqZWfB_unE3SpvT-plb0k29MkJ4-0WbIUoderaIi1dKQ_sfiy_vqjLIky2LXvMtuOnbMCYxmAgtpKl8qCJoT-8AQwUplE8D2q7msTEIy4_DSxj05KDWwdC8W-l_vIssj2Ccby9714/s1600/Visuel+The+Fear+%E2%88%8F+DR-06.jpg" height="266" width="400" /></a></div>
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<a href="https://sites.google.com/site/lestrainsdelumiere/zoo-des-series/2012-the-fear" target="_blank"><span style="color: blue;">Lecture dans dossier, cliquer ici.</span></a></div>
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<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><b>The Fear. —</b>Une mini-série qui en vaut largement une autre tant, parmi les maxi-, l’hypertrophie du temps peut provoquer des étirements propices à la fatigue, si ce n’est au sommeil. Passons. Mais c’est déjà un (bon) point acquis. Car avec <i>The Fear</i> on n’a pas toujours peur, mais on ne s’ennuie pas. Quand on aura dit que l’interprétation du personnage central (Richie Beckett) est confiée à l’excellent Peter Mullan, on aura déjà indiqué au lecteur l’un des arguments qui incite à la vision. Mais il y en a d’autres, et pas des moindres.</div>
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<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Sur la côte sud est de l’Angleterre, Brighton est une station balnéaire très fréquentée, connue pour ses monuments quelque peu extravagants, et pour une jetée actuellement en friche, suite à un incendie aux causes mal connues. C’est justement là que commence le film (on peut assimiler en effet la série à un film qui durerait plus de trois heures, ce qui n’a rien d’exceptionnel), quand Richie Beckett exhibe le gros chèque qu’il vient de signer pour le projet de reconstruction de la jetée. Sorte de parrain de la pègre locale, il est à la fois à la tête de commerces légaux florissants, et touche sa dîme sur l’ensemble de ceux qui le sont moins, drogue et prostitution entre autres. Trente ans que ça dure: une situation bien assise, une femme qui touche à l’art contemporain par une galerie en vue, deux fils qui se la coulent douce, évidemment bâtis sur deux modèles opposés: Matty, doué, intelligent, réfléchi, obéissant, et Cal, tête en l’air, fonceur, frondeur, passablement obsédé par les femmes et néanmoins marié et père de famille. Ils ont emprunté chacun des traits au père, et ce dernier ne peut donc renier aucun de ses deux rejetons. C’est la coexistence de ces traits opposés qui va poser problème, à la fois entre les frères, et dans l’âme et le corps de Richie lui-même.</div>
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<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>L’affaire se noue quand on comprend qu’il présente de curieux symptômes d’oubli du passé immédiat, ainsi qu’une fâcheuse tendance à la violence incontrôlée, qui ne vont pas tarder à se préciser et prendre forme d’une démence précoce, dont la forme — classique de nos jours — est celle de la maladie d’Alzheimer. Tout pourrait aller vers une fin triste mais banale si d’inquiétants nouveaux arrivants (kosovars, ou albanais) ne venaient semer le trouble en réclamant une part du gâteau, au motif qu’ils viennent d’arriver et que leur fraîcheur physique et leur capacité de nuire mérite bien une compensation pour être tenue en respect. Formant avec la triade de base une sorte de miroir, c’est leur insistante brutalité qui va faire avancer l’intrigue. Et si Cal — qui a imprudemment engagé avec eux des tractations (au nom du père!) et a laissé son ADN sur le corps d’une prostituée dont on lui renvoie la seule tête afin de lui faire entendre qu’il doit tenir parole — hésite entre leur rentrer dans le lard <i>manu militari </i>et passer des accords avec eux pour le business, Matty comprend vite qu’il faut traiter si l’on veut survivre, et agit en ce sens auprès de Richie. Lequel, je l’ai dit, est divisé en lui-même comme le sont ses fils entre eux, et ne peut donc rien décider de sûr et de constant. Sans compter sa maladie naissante, qui ne va pas tarder à s’aggraver, et le faire replonger dans un passé vieux de trente ans, où les souvenirs incertains se bousculent, où des gestes regrettables lui reviennent en mémoire, quand ce ne sont pas les compromissions illégales qui l’ont conduit à sa fortune, et à son règne de roi de la pègre locale. Rien ne viendra arranger les choses, si ce n’est l’issue fatale dont je vous laisse le plaisir de la découverte, car quand on croit avoir tout compris, reste quand même une part d’inconnu non négligeable!</div>
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<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Série attachante pour de très nombreuses raisons. La plus importante étant que la «confusion» (titre des deux tableaux que la femme de Richie songe à acheter à son amant, et qu’elle installe dans leur maison afin de juger de leur valeur in situ) est rendue dans le jeu de Peter Mullan d’une façon très exceptionnelle. En effet, en de nombreux moments, il parvient à transmettre au spectateur l’indécision dans laquelle se trouve le héros, à un point tel qu’on ne sait pas si Richie joue le jeu de celui qui a perdu la mémoire, ou si réellement il est atteint des symptômes d’Alzheimer. Autrement dit nous sommes, comme le héros lui-même, divisés entre la certitude que tout ne va pas bien dans sa tête, et l’idée que finalement ça ne va quand même pas si mal que ça. Ce <i>fading</i> est restitué avec brio et il nous «déplace» à de nombreuses reprises, nous renvoyant dans les cordes quand nous croyons avoir saisi quelque chose de la supposée vérité. La question sous-jacente ici est celle de la rationalité des actes: les héros de romans, de films, sont-ils supposés agir selon des motivations rationnelles (qui expliquent qu’on puisse les comprendre, donc nous identifier à eux) ou bien sont-ils les jouets de passions folles, ce qui les rendraient imprévisibles, et en un sens les éloigneraient de nous? Les règlements de comptes mafieux sont-ils soumis à des calculs rationnels, ou sont-ils du registre de l’irruption de la folie dans les comportements humains? Au-delà, on peut étendre la même question à la vie réelle: ceux qui nous gouvernent, ceux qui sont en place de maîtres, ont-ils en tête quand ils agissent des motifs rationnels comme ils tendent à le faire croire, ou sont-ils, en puissance ou en acte, des malades mentaux? On touche là à des questions que Shakespeare avait constamment abordées dans son théâtre, et parfois la question ontologique d’Hamlet rejoint celle de la quiddité beckettienne. «Qui suis-je?» se demande Richie (Beckett), quand Hamlet, plus radical, se questionne quant à son être même. Le point commun étant qu’il y a bien quelque chose de pourri dans le fonctionnement politique des cités, des républiques. Et des monarchies constitutionnelles.</div>
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<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Bien que la trame narrative du film ne laisse place qu’à un suspens léger, les questions posées par l’évolution du personnage central tiennent en éveil. Ajoutons une qualité d’attention à l’histoire du cinéma non négligeable, même si les allusions à Hitchcock, manifestes à la moindre scène de douche ou à l’escalade du moindre escalier sont un peu appuyées. On a dit que les «Albanais» (je ne peux m’empêcher de penser à Mozart et à <i>Cosi fan tutte </i> quand il est question d’Albanais) avaient été traités de façon grossière. Ils sont en effet présentés comme tout uniment violents, et leurs relations familiales ne sont pas analysées avec la même attention que dans le cas de la famille Beckett. Mais leur rôle dramatique les place en position de révélateurs des contradictions de ce qui se passe chez les nantis, et on ne leur demande pas plus, sauf à transformer la série en documentaire sur les migrations en Europe au XXI<span style="font-size: xx-small;">e</span> siècle! L’image est soignée, les cadrages serrés sur Richie Beckett, souvent répétés, restituent quelque chose de l’angoisse qui le traverse à l’idée qu’il est en train de se perdre, et, de-ci de-là, de belles utilisations de l’architecture de la ville, comme cette célèbre grande roue, qui ne manque pas de tourner. Et en effet, c’est bien là la question. <i>— Philippe Méziat.</i></div>
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<i><br /></i></div>
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<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><i>Série de quatre épisodes, réalisée par Richard Cottan, diffusée sur </i>Channel Four<i> en 2012, et interprétée par Peter Mullan, Anastasia Hille, Harry Lloyd, Paul Nicholls. Deux DVD, éditions Montparnasse, sortie le 6 mai 2014, 20 euros.</i></div>
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<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-size: xx-small;">© Visuel: Peter Mullan, dans <i>The Fear </i>de Richard Cottan, 2012. Éditions Montparnasse.</span></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-11174788139515890362014-04-03T13:39:00.002+02:002014-04-03T13:56:45.481+02:00Gaël Brustier: Penser une reconquête culturelle à gauche<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgDm-IxeitJ32g9WYVumcs5kYRHpyphto5lUh2qmaPOBsbCvYZdpk__gB0SDNfP4elDkyM0YsZmK7OrJQdWe8pZtKJmndActPfXRoCYS9nOkxgl_R_Nlvf-TnJ890HgaxqT63GAjNZp3zZu/s1600/Roman-mosaic-know-thyself.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgDm-IxeitJ32g9WYVumcs5kYRHpyphto5lUh2qmaPOBsbCvYZdpk__gB0SDNfP4elDkyM0YsZmK7OrJQdWe8pZtKJmndActPfXRoCYS9nOkxgl_R_Nlvf-TnJ890HgaxqT63GAjNZp3zZu/s1600/Roman-mosaic-know-thyself.jpg" height="262" width="400" /></a></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"><br /></span></span></div>
<div style="text-align: center;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: blue; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"><a href="https://sites.google.com/site/libratextu/libertes-pour-le-present/1" target="_blank">Lecture dans dossier, cliquer ici.</a></span></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"><br /></span></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><b>Penser une reconquête culturelle à gauche — </b>Le bilan des élections municipales est catastrophique pour la gauche. L’évidence est désormais là: les gauches semblent de plus en plus impuissantes à se faire élire, et davantage encore à imposer un agenda propre ou à lutter contre des représentations collectives de droite. Les résultats des élections municipales françaises (et néerlandaises!) de ce mois de mars le démontrent. La gauche française et européenne — radicale ou sociale-démocrate — parlent politiques publiques et bonne gestion quand les droites tirent parti d’un univers d’images, de symboles et de représentations. Il n’est donc pas étonnant devoir le «socialisme municipal» laminé par la vague droitière de ce dimanche. Si l’activité économique est bien au cœur des recompositions de l’imaginaire collectif, celui-ci intègre bien d’autres dimensions comme les questions civiques ou culturelles. Toutes ces dimensions transcendent l'opposition entre social et sociétal. Il est temps de prendre conscience de la multiplicité des champs de bataille où la gauche doit s’engager. Des réponses nouvelles, qui ne peuvent s’entendre que comme une simple négation ou réplique aux thèses des droites, sont urgentes. Là est la clé du sursaut pour la gauche. Faute de quoi, elle risque de disparaître.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Une des idées persistantes et erronées émanant d’une partie de la gauche consiste à analyser les droites comme les représentantes exclusives des classes dominantes. Cette thèse se heurte à la réalité des faits et à la complexité des mutations culturelles. Que l’on se tourne vers le thatchérisme, le berlusconisme ou le sarkozysme — trois des expressions que la droite a prises sur notre continent —, on constate vite qu’aucune de ces formes politiques n’a bénéficié d’abord de la promotion ou de la mise en place de politiques publiques ou d’une évidente meilleure compétence économique. Et pour cause! Si les droites, dans leur grande diversité, ont su à la fois s’adapter au monde, c’est parce qu’elles ont utilisé un univers d’images, qui fait appel à l’expérience quotidienne de nos concitoyens et qui est bien plus puissant que l’énoncé de mesures techniques ou le descriptif de politiques publiques, si bonnes soient-elles. Les droites ont combiné l’ancien et le nouveau, la nostalgie et l’adaptation au monde naissant…</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>L’actuelle mutation du monde, et notamment l’accroissement des interdépendances entre États et individus, laisse croître dans nos sociétés l’idée du déclin. La mutation du monde correspond à la nouvelle phase de mondialisation des échanges, au défi énergétique et environnemental ainsi qu’à la dramatisation des enjeux migratoires. Ce sont ces mutations qui donnent force à l’idée d’un déclin. Cette dernière idée trouve une expression sporadique dans les paniques morales qui sont les véritables et puissants accélérateurs de la recomposition idéologique, sociale, culturelle de nos pays. Les paniques morales contribuent à liquider les consensus hérités du passé – au premier chef le consensus social-démocrate – et portent le spontanéisme droitier que la gauche gouvernementale subit si violemment. C’est ce qui vient de se produire et de provoquer la perte de centaines de villes et d’agglomérations par la gauche.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Le centre de gravité du monde a donc basculé de l’Atlantique au Pacifique entraînant un profond bouleversement idéologique. Dans ce contexte, le rappel au monde ancien ne suffit pas. Le consensus social-démocrate, basé notamment sur le plein-emploi et la cogestion avec les syndicats, est mort et ne reviendra pas… On ne peut faire abstraction de la puissante matrice droitière qui fonctionne à plein, redonnant désormais localement (d’Hayange à Béziers, de Bobigny à Montceau-les-Mines) sens à un monde en pleine mutation.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Le succès des droites ne doit qu’à la défaillance de projet et d’imaginaire à gauche. Psalmodier les recettes de 1981 dans le monde de 2014 est un geste aussi impuissant que la soumission aux idées économiques libérales de l’air du temps. Faire plus à gauche pour faire plus à gauche serait inopérant.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>En revanche, définir un autre projet, une autre réponse, donner une autre explication du monde que celles véhiculées par les droites est urgent. L’intérêt des classes populaires n’est pas donné. Il se construit culturellement, idéologiquement, socialement. Ce travail a été abandonné. Les gauches sont en panne de projet, en panne de vision, en panne d’optimisme.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>L’idée que la mutation actuelle du monde amènerait presque mécaniquement à un retour aux recettes antérieures est un puissant frein à la rénovation idéologique de la gauche. L’idéologie de la crise — l’idéologie du déclin — combine des projets, des intérêts, des envies différents. Des gens aux conditions matérielles radicalement différentes adhèrent pourtant à une même vision du monde. C’est à chaque fois la force des droites que de s’insinuer dans l’expérience des gens et de contribuer à lui donner un sens nouveau. Des droites conservatrices aux nouvelles droites populistes, toutes les familles de droites parviennent à capter l’imaginaire collectif, à le façonner ou à en tirer profit. C’est encore ce qu’elles viennent de démontrer lors de ces élections municipales.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Penser l’hégémonie est devenu un impératif vital pour les gauches. Aussi bien la social-démocratie que la gauche radicale sont dans la nécessité de repenser leur projet et l’imaginaire qu’elles entendent construire dans le monde qui vient. Que l’on ne se trompe pas, le problème n’est ni le Front national ni le retour de Nicolas Sarkozy, le problème c’est la capacité de la gauche à gagner, demain, la guerre culturelle qui est en cours… pour changer le monde.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif; font-size: xx-small;"><span style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>© Gaël Brustier, chercheur associé au Centre d'étude de la vie politique, Université libre de Bruxelles, <i>Le Monde</i>, 2 avril 2014.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif; font-size: xx-small;"><span style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> © </i></span>Image: <i>Gnothi seauton / Connais-toi toi-même</i>, mosaïque au Couvent de San Gregorio, via Appia, Rome, 1er siècle.</span></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-7288278894168210582014-03-17T21:10:00.002+02:002014-05-10T11:07:20.689+02:00Françoise Coursaget: Les terres d'Isabelle<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEharbkpjarTWG_tOSALv0WxgS8MOBUS4BgCHNiRgoub_YJG_JtcJxDXsMidrwe4vsPg1fIYyYjLyu2pZRIHY7JpcJbTPXB502UHgNL6Kz9avkYmjfS99s_f4UqzPBbseXVAV5_en3fEvDzL/s1600/michel-dieuzade-2-036.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEharbkpjarTWG_tOSALv0WxgS8MOBUS4BgCHNiRgoub_YJG_JtcJxDXsMidrwe4vsPg1fIYyYjLyu2pZRIHY7JpcJbTPXB502UHgNL6Kz9avkYmjfS99s_f4UqzPBbseXVAV5_en3fEvDzL/s1600/michel-dieuzade-2-036.jpg" height="300" width="400" /></a></div>
<div style="text-align: justify;">
<br />
<div style="text-align: center;">
<a href="https://sites.google.com/site/penserparimages/arts-graphiques/roux-isabelle" target="_blank"><span style="color: blue;">Lecture dans dossier, cliquer ici.</span></a></div>
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><i>Isabelle Roux est céramiste et artiste plasticienne. <a href="http://isabellerouxceramiste.wordpress.com/"><span style="color: blue;">On peut la retrouver sur son site.</span></a></i></div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Funambule, le travail d’Isabelle Roux maintient ferme l’équilibre fragile entre la perfection idéale et l’humaine imperfection.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Grande puissance de l’élan, mais toujours légère déformation par rapport à la forme géométrique pure vers laquelle la pièce tend: non pas cercle, mais arrondi mollement incertain. Non pas cône inversé, mais évasement, presque symétries, faux-plats, courbes doucement changeantes. Plus l’hésitante régularité des gravures. Flammées à peine. Pigments délicats soufflés à la pipette, révélés seulement parfois. Vie.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Aucun geste lisible dans le travail d’Isabelle Roux ne semble arrêté. Fugues qui s’élèvent et continuent à s’élever sous le regard. Incertitude des bords si fins qu’ils semblent fondre diminuendo. Suite invisible suggérée qui élève le cœur du regardeur.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Chant des baleines. Ultrasons que l’on n'entend pas mais que l’on sent. Dialogue. Invitation contemporaine, comme on l’a dit, à suivre la ligne, à la poursuivre dans le vide, mais aussi dialogue avec les voix si lointaines et pourtant parfaitement claires des céramiques coréennes préhistoriques.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Et dialogue plus sourd avec la nature. Terre. Pièces presque noires au trou profond qui fait un peu peur. Matrice et mort. Lumière et ombre. Pièces qui vivent dans les herbes. Sous la glycine, avec le thym. Au bord de l’eau. Au pied des montagnes. Sous la neige. On n’en finit pas.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Conversation encore des pièces entre elles. Air de famille. Grand air. La petite carrée aux angles pointus dit quelque chose à la grande ronde. La faiblesse de la presque effondrée informe la plus raide. Les grandes stèles de porcelaine bossues, lacunaires, blanches du deuil japonais, s’enroulent tant bien que mal sur elles-mêmes, comme pour lécher leurs plaies, mais se consolent aussi de leur déchirement en s’inclinant légèrement les unes vers les autres. Forêt d’Ents.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>Pour les aventuriers, les céramiques d’Isabelle Roux sont à découvrir comme de nouvelles terres pleines de secrets. </div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-size: xx-small;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; line-height: 24.639999389648438px;"> </span><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: 24px;"><i> </i></b>© Texte: Françoise Coursaget. Photographie: <i>Poterie H: 48cm, L: 62cm,</i> Michel Dieuzaide.</span></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-87021412999179354192014-02-21T14:54:00.003+02:002014-02-21T15:09:39.469+02:00 Pierre-Louis Rémy: La gauche pour la famille<div style="text-align: justify;">
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEijOCvSmBB9l_2sKAcWBNkyfF-C_2kdn4qMmL1aDxFd7P-re-vO6n9V1TVHFbxTCCGe3CQjZnH0t69Vk05IyNtas2oOKBXUPtscAH-5gpUiPWqiUsO_UJbDO298_t35I7qAwa9UBXC_CAhX/s1600/05407621_PVI_0002_HOME.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEijOCvSmBB9l_2sKAcWBNkyfF-C_2kdn4qMmL1aDxFd7P-re-vO6n9V1TVHFbxTCCGe3CQjZnH0t69Vk05IyNtas2oOKBXUPtscAH-5gpUiPWqiUsO_UJbDO298_t35I7qAwa9UBXC_CAhX/s1600/05407621_PVI_0002_HOME.jpg" /></a></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<span style="color: blue;"><br /></span></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://sites.google.com/site/libratextu/libertes-pour-le-present/2014-02-pierre-louis-remy-la-gauche-pour-la-famille" target="_blank"><span style="color: blue;">Lecture dans dossier, cliquer ici.</span></a></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<br /></div>
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><b>La gauche ne doit pas laisser les valeurs familiales à la droite. — </b>Les enquêtes d'opinion année après année, comme l'expérience quotidienne de chacun, en témoignent, la famille est la valeur préférée des Français. Il faut s'en réjouir, car la famille est un espace privilégié de solidarité. C'est également le premier lieu de construction de repères pour l'enfant. Que serait aujourd'hui notre société, si ces deux fonctions essentielles venaient à se tarir?<br />
<br />
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px; text-align: justify;"><i> </i></b>Comment, dès lors, ne pas être atterré de la façon dont la famille est traitée, aujourd'hui, dans le débat politique? Le discours politique de la gauche comme les initiatives législatives du gouvernement sont, tout entiers, tournés vers les «nouvelles familles»… laissant la droite se poser en défenseur généraliste de la famille, alors même qu'on chercherait, en vain, dans les années récentes où elle a exercé le pouvoir, une réelle impulsion au service des familles.<br />
<div style="text-align: justify;">
<br />
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px; text-align: justify;"><i> </i></b>La question de la procréation médicalement assistée (PMA) pour les femmes homosexuelles occupe le devant de la scène des discours et des commentaires, que ce soit pour la mettre en avant ou pour la rejeter, comme si c'était un des sujets les plus urgents et importants d'une politique familiale.<br />
<br />
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b>La famille traditionnelle, un père, une mère et leurs enfants, apparaît presque comme un vestige du passé, bien éloigné de la modernité, que chacun est invité à prendre pour idéal. Et pourtant elle représente encore la situation très majoritaire dans notre pays: plus des trois quarts des enfants vivent avec leurs deux parents.<br />
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px; text-align: justify;"><i> </i></b>Bien sûr, il était juste de donner aux couples, quelle que soit leur orientation sexuelle, des droits équivalents à la mesure de leur engagement réciproque; bien sûr, il est nécessaire de donner aux familles recomposées un cadre juridique qui assure le meilleur intérêt de l'enfant; bien sûr, il faut lever l'anonymat pour permettre aux enfants nés sous X d'avoir accès à leurs origines; mais cela constitue-t-il le cœur d'une politique familiale, d'une politique familiale de gauche?<br />
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px; text-align: justify;"><i> </i></b>Comme j'aimerais que la gauche nous parle de la famille, en reprenant les termes du préambule de la Convention internationale des droits de l'enfant: la famille, unité fondamentale de la société et milieu naturel pour la croissance et le bien-être de tous ses membres, et en particulier des enfants.<br />
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px; text-align: justify;"><i> </i></b>Comme j'aimerais qu'elle souligne son rôle essentiel de solidarité et d'éducation. Comme j'aimerais qu'au cœur de la politique familiale de la gauche il y ait ce souci de reconnaître et d'aider les familles, toutes les familles, dans leur fonction éducative. Ce pourrait par exemple être un élément du pacte de responsabilité d'encourager les entreprises à favoriser l'articulation entre vie professionnelle et vie familiale, avec la même vigueur qu'est mise en avant l'égalité hommes-femmes.<br />
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px; text-align: justify;"><i> </i></b>Comme j'aimerais que la gauche se rappelle que, chaque fois que c'est possible, et c'est heureusement la situation la plus fréquente, un enfant est heureux de vivre avec les parents qui l'ont engendré, ce qu'exprime également la Convention internationale des droits de l'enfant dans son article 7.<br />
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px; text-align: justify;"><i> </i></b>Comme j'aimerais que la gauche ose dire que la famille traditionnelle reste la référence, même si, naturellement, il faut adapter le droit et la politique de la famille à la diversité des situations familiales, dans l'intérêt de l'enfant.<br />
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px; text-align: justify;"><i> </i></b>C'est ce que nous avons essayé de faire à la délégation interministérielle à la famille, sous l'autorité de Martine Aubry, sous le gouvernement Jospin, avec le souci prioritaire d'aider les familles dans le concret de leur vie quotidienne. C'est, je crois, ce que souhaitent un grand nombre de nos concitoyens, en particulier de beaucoup de ceux qui se reconnaissent dans la gauche. C'est le sens profond d'une politique de gauche, qui ne discrimine personne et qui s'adresse à tous. <i>— Pierre-Louis Rémy, ancien délégué interministériel à la famille (1998-2000). Publié dans </i>Le Monde <i>du mercredi 19 février 2014.</i><br />
<i><br /></i>
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: 24px;"><span style="font-size: xx-small;"> © Photographie: Caisse d'Allocations Familiales de Paris.</span></span><br />
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
</div>
</div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-9986778088545848712014-02-17T15:26:00.004+02:002014-02-17T23:31:28.615+02:00Nadejda Tolokonnikova (2): Le «petit peuple»<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<br /></div>
<div>
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg1mN7vJJZ1rJmzAtSA9hoGMrw6xA2UfMBv4FhpeETwyZmlIaK0m8qvF7X6EgblfHs3F4H6XNC-fWrumtsYdXtINenW77NLgYUETgqioWwDw6ZT7sFVgBpAmiRD6YfD7VT4feRmKZh_BxuA/s1600/220px-Nadezhda_Tolokonnikova_(2012-02-04;_Denis_Bochkarev).jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em; text-align: center;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg1mN7vJJZ1rJmzAtSA9hoGMrw6xA2UfMBv4FhpeETwyZmlIaK0m8qvF7X6EgblfHs3F4H6XNC-fWrumtsYdXtINenW77NLgYUETgqioWwDw6ZT7sFVgBpAmiRD6YfD7VT4feRmKZh_BxuA/s1600/220px-Nadezhda_Tolokonnikova_(2012-02-04;_Denis_Bochkarev).jpg" height="400" width="266" /></a><br />
<div style="text-align: center;">
<a href="https://sites.google.com/site/libratextu/hommes-et-femmes-libres/lettre-de-mordovie?pli=1" target="_blank"><span style="color: blue;">Lecture dans dossier, cliquer ici.</span></a></div>
</div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i><br /></i></b></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Pendant ma détention, j'ai croisé à maintes reprises ce soi-disant «petit peuple» qui, comme on nous l'a souvent dit et répété, serait prêt à embrasser le nombril de Vladimir Poutine et détesterait les Pussy Riot et autres sodomites.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Il s'est avéré que cet amour pour Vladimir Poutine a été inventé par l'appareil de Vladimir Poutine tout comme la haine contre les Pussy Riot. Une multitude de gens sont irrités par la gouvernance de Poutine, son irrépressible soif de pouvoir et son manque d'appétit pour de réels changements positifs pour les Russes.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Il y a beaucoup moins d'authentiques staliniens exaltés en Russie qu'il n'est convenu de le croire. Les Russes aimeraient qu'on les respecte en tant qu'êtres humains, qu'on soit à l'écoute de leurs besoins et de leurs valeurs. Et ce «petit peuple», créé de toutes pièces par la télévision fédérale conservatrice, juge en fait avec lucidité et ironie la gouvernance de Poutine. Et ce petit peuple est prêt à soutenir et même à respecter celles qui ont réussi à se moquer de ce Poutine par la bouffonnerie, bouffonnerie si grande qu'elles en ont pris pour «deux ans» de camp. Ils ont eu beau bourrer le crâne du petit peuple à travers les médias fédéraux, celui-ci ne croit pas que tout va pour le mieux dans la nation.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Il ressent dans sa chair que tout va mal. Le seul problème est que les gens ne disposent pas de méthode pour se plaindre que tout va mal. Le problème, c'est que dans le «monde de la vie», il n'existe pas de réelles voies de contestation. Il n'y a pas de bouton sur un tableau de bord qui permettrait de manifester son mécontentement envers le travail des fonctionnaires.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Et comme ce bouton n'est pas disponible, alors, la contestation se cantonne chez le Russe dans le domaine de la métaphysique. Parce que celui qui ose s'exprimer contre le système administratif actuel est pris pour un kamikaze. On le considère, qui comme un fol-en-Christ, qui comme un fou, qui comme un radical et un ermite. C'est pourquoi la politique en Russie procède toujours un peu de l'art et toujours de la philosophie. Cette situation est romantique, mais mal commode. Elle est mal commode en tout premier lieu pour l'État.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Les gens vivent dans l'attente de l'Apocalypse politique. Sachez que nous pourrons un jour nous retrouver du même côté des barricades, m'a dit un membre de la milice dans une des prisons de Mordovie. Je tente d'ironiser: par curiosité, de quelle façon, avec vos épaulettes sur votre uniforme? Mais le milicien est déjà dans le registre de la sincérité, et la causticité ne l'atteint pas, il croit en ce qu'il dit. Tout simplement. Je n'ai pas prêté serment d'allégeance à l'État. Je ne leur dois plus rien. Je vais me débarrasser de mes épaulettes et partir avec vous. Quand? Quand ce sera l'émeute. L'impitoyable rébellion russe.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Et c'est toujours comme ça avec les Russes. Une de mes compagnes de cellule, une ancienne juge d'instruction, a eu la révélation au moment du procès des Pussy Riot, de l'avènement de ce qu'a évoqué Jean l'Evangéliste pour nettoyer la Russie de la souillure poutinienne. Toute plaisanterie mise à part, c'est une vision très typiquement russe de la manière dont doit se passer une protestation politique.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Nous attendons le Messie, nous attendons un prophète. Attendez les gars, c'est tout de même bien plus facile que ça. Laissez la métaphysique pour créer un bon cinéma russe. Le gouvernement, ce sont des fonctionnaires, des employés de bureau que nous payons. Ce ne sont pas nos maîtres. Pas de transcendance. Pas la moindre.Le commandant du camp n'est pas notre «maître», comme on l'appelle maintenant. C'est un fonctionnaire, dont le devoir est d'agir conformément à la loi, et on peut porter plainte à tout moment contre ses agissements. Et si cette plainte est fondée, le fonctionnaire perdra sa place. Et ce n'est que justice.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Avec notre organisation «Zone de droit», nous sommes en train de créer une instance de protestation dans les camps. En premier lieu, dans les camps de femmes, puisqu'elle n'y existe pas. Nous apportons notre soutien à ceux qui sont prêts à se battre pour leurs droits. Nous procurons des informations, des avocats, et cette marge de sécurité que confère un contrôle public.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Nous commençons par les camps, mais nous sommes persuadés que, si nous aidons les condamnés à trouver un moyen légal pour protester contre leur asservissement, alors, nous pourrons également faire beaucoup plus pour ces nombreux citoyens russes qui veulent exprimer leur mécontentement dans le cahier de doléances du système politique de Poutine, mais qui en sont encore privés d'accès.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif; font-size: xx-small;"><b style="background-color: white; color: #222222; font-style: italic; line-height: 24px;"> </b>Le Monde<i>, 13 février 2014, traduit par Isabelle Chérel.</i></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif; font-size: xx-small;"><i><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"> </b>© Photographie: auteur inconnu, tous droits réservés.</i></span></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-68637515322290432472014-02-16T15:14:00.000+02:002014-02-17T23:29:56.090+02:00Nadejda Tolokonnikova (1): La vie à la colonie pénitentiaire IK-2<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: 24px;"><i><br /></i></b></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhRtzSuA80X3mS-fJaIbOcTKP-TMq2K0iE-bLX6etBctSw-8WAQjSADN7rowq_eI8qnujMOMAU8iSC_YmHN0arOY1W6NF3yTe5KhOFpzKG_M4nDJu00V9JVCb1cGUXjOEXTA06xMf4Y4tX5/s1600/nadejda_tolokonnikova.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhRtzSuA80X3mS-fJaIbOcTKP-TMq2K0iE-bLX6etBctSw-8WAQjSADN7rowq_eI8qnujMOMAU8iSC_YmHN0arOY1W6NF3yTe5KhOFpzKG_M4nDJu00V9JVCb1cGUXjOEXTA06xMf4Y4tX5/s1600/nadejda_tolokonnikova.jpg" height="266" width="400" /></a></div>
<div>
<br /></div>
<div style="text-align: center;">
<a href="https://sites.google.com/site/libratextu/hommes-et-femmes-libres/lettre-de-mordovie?pli=1" style="background-color: white; color: #dd8766; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24.639999389648438px; text-decoration: none;" target="_blank"><span style="color: blue;">Lecture dans dossier, cliquer ici.</span></a></div>
<div style="text-align: center;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">La société Vostok-Service occupe la cent-cinquante-septième place des deux cents entreprises privées les plus importantes dans le monde, d'après le magazine <i>Forbes</i>. Vostok-Service appartient à Vladimir Golovnev, ex-député de Russie unie (le parti de Vladimir Poutine) à la Douma. L'entreprise de Golovnev dépasse les 18 milliards de roubles (379 millions d'euros) de chiffre d'affaires annuel. Sa production représente un tiers du marché des vêtements de travail en Russie. Golovnev dirige le Comité russe pour le renforcement de la responsabilité sociale des entreprises et porte le titre honorifique d'«entrepreneur émérite de la Russie».</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Un rouleau adhésif estampillé Vostok-Service, la marque du commanditaire de la production, est entouré autour de cette lourde matraque de bois familière à toute condamnée en Mordovie. L'administration du camp l'utilise pour frapper les couturières qui ne parviennent pas à atteindre la norme de rendement pour une journée de travail d'une durée de seize à vingt heures.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Grâce au soutien de la matraque Vostok-Service, les femmes produisent 250 tenues de travail par jour et génèrent des revenus faramineux à M. Golovnev. La nuit du 28 au 29 décembre 2013, dans la zone de production de la colonie pénitentiaire IK-2 de Mordovie, une femme est morte. Selon les témoins oculaires, on a retiré son corps du tapis roulant. Cette femme était gravement malade et n'aurait jamais dû travailler plus de huit heures par jour. Mais l'administration du camp a besoin de milliers de vêtements pour Vostok-Service.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Les détenues travaillent en deux équipes, de trois heures du matin à minuit, et de six heures du matin à trois heures du matin. Sept jours sur sept. Les femmes s'endorment sur leur machine à coudre et se piquent les doigts. Et meurent. Aucune des prisonnières de l'IK-2 ne peut résister efficacement à cet asservissement, dans la mesure où l'administration du camp s'est dotée d'un mécanisme bien huilé de répression de la protestation. Le protestataire est dépouillé de tout. Le camp entier se dresse contre lui.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Il peut sembler que l'on n'ait rien à perdre dans un camp. Ce n'est pas le cas. Dans un camp, il existe un système très élaboré de privilèges que le prisonnier peut perdre s'il décide de critiquer l'administration. Comme de pouvoir porter son fichu d'une manière non réglementaire, cinq centimètres de plus que la norme. Ou de pouvoir boire du thé à une heure non imposée, à dix-sept heures. Pouvoir se laver les cheveux non pas une fois, mais deux fois par semaine.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Les détenus tiennent à toutes ces petites choses qui constituent leur ordinaire. La thèse de Marx selon laquelle les travailleurs n'ont rien à perdre, hormis leurs chaînes, c'est n'importe quoi. Paradoxalement, la propension à prendre des risques quand on vit littéralement dans les fers est très faible. Le zek enchaîné est très prudent et craintif.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Les gens ne protesteront que lorsqu'ils seront convaincus de la réussite potentielle d'un comportement qui s'écarte de la norme. Quand ils auront le sentiment qu'en élevant des protestations, ils ne se condamneront pas à la solitude, à l'incompréhension et à la stigmatisation, mais qu'ils se raccrocheront à quelque chose de bien plus grand que leur sursaut individuel désespéré, à quelque chose qui pourra les soutenir et les protéger dans leurs actes de protestation.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Cette chose qui peut convaincre une personne que sa révolte est possible, nous l'appelons un institut public de revendications. C'est ce que nous, les condamnées de la colonie IK-14 de Mordovie, et Julia Kristeva appelons «la culture de la rébellion». Les colonies de femmes dans leur ensemble se distinguent par l'absence totale d'instance de revendications. Chez les hommes, des modèles de comportement alternatifs se sont forgés depuis des décennies sous l'effet d'une culture hiérarchique sans failles, relayée par les membres des gangs, pour donner naissance à une «société civile» spécifique aux camps. Dans les camps de femmes, un tel système n'existe tout simplement pas.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Et l'administration du camp, dont le mot d'ordre est «diviser pour régner», cultive l'atomisation et le cloisonnement de la collectivité. Si un camp d'hommes représentait la France, où les gens sont capables de protester, alors le camp de femmes serait une société post-totalitaire comme la Russie, où l'on préfère avaler toutes les iniquités des fonctionnaires et les rigueurs du régime.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-size: xx-small;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: 24px;"><i> </i></span><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: 24px;">Le Monde, </span><i style="color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: 24px;">12 février 2014, traduit par Isabelle Chérel, suivi d'une deuxième partie, ci-dessus.</i></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: 24px;"><i><span style="font-size: xx-small;"> © Photographie: auteur inconnu, tous droits réservés.</span></i></span></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-46083105721017076002013-12-12T12:48:00.000+02:002014-11-22T17:08:40.834+02:00Lettre 27: automne 2013<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiSsZoj0rxLj8YI24QkOCRacOTohn2G2Au1wYJ-5flpcDcd8vwnnozP2g7ReR7q4pHaBikG5I3LKd-GKsFJMHpe-LzS6_TNWAvt4fkQUAc_y_rBKYK-eJqpqZPVOkttz_2xMbur0yUMAVkP/s1600/05.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><br class="Apple-interchange-newline" /><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiSsZoj0rxLj8YI24QkOCRacOTohn2G2Au1wYJ-5flpcDcd8vwnnozP2g7ReR7q4pHaBikG5I3LKd-GKsFJMHpe-LzS6_TNWAvt4fkQUAc_y_rBKYK-eJqpqZPVOkttz_2xMbur0yUMAVkP/s400/05.jpg" height="300" width="400" /></a></div>
<div style="text-align: justify;">
<div style="text-align: center;">
<div style="text-align: justify;">
<div style="text-align: center;">
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia;"><br /></span><i style="font-family: Georgia;"> </i><span style="font-family: Georgia;">— Nous avons le plaisir d'ouvrir un nouveau dossier thématique: <b><a href="https://sites.google.com/site/margueritedurascineaste/" target="_blank"><span style="color: blue;">Le cinéma de Marguerite Duras</span></a></b>. De nombreux documents et présentations sont déjà organisés. Et une première note sur ses deux entretiens, cf. ci-dessous dossier 13.</span><span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;"><i> </i>— Ensuite, nous continuons <b>nos films</b>, tous archivés sur Youtube dans </span><a href="http://www.youtube.com/user/The202productions/videos?view=0" target="_blank"><span style="color: blue;"><b>Notre cinéma © 202 productions</b></span></a><span style="color: black;">. Ici une sixième sélection pour <i>Ralentir travaux</i> visible en plein écran réunira les neuf films constituant le cycle de Venise.</span></span><br />
<br />
<div style="margin-left: 40px;">
<span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;"><b>• 25. </b></span></span><b style="font-family: Georgia;">Venise 1. <span style="color: blue;"><a href="http://maurice-darmon.blogspot.fr/2013/10/venise-1-crystal-serenity-615.html" target="_blank">Crystal Serenity</a></span> (6'15)</b><span style="font-family: Georgia;"><br /><b>• 26. Venise 2. <a href="http://maurice-darmon.blogspot.fr/2013/10/venise-2-cendrillon-411.html" target="_blank">Cendrillon</a> (4'11)</b></span><span style="font-family: Georgia;"><br /><b>• 27. </b></span><b style="font-family: Georgia;">Venise 3. <a href="http://maurice-darmon.blogspot.fr/2013/10/venise-3-requiem-pour-les-galeriens-540.html" target="_blank">Requiem pour les galériens</a> (5'39) </b><br />
<span style="font-family: Georgia;"><b>• 28. </b></span><b style="font-family: Georgia;">Venise 4. <a href="http://maurice-darmon.blogspot.fr/2013/11/venise-4-la-nuit-de-ton-nom-732.html" target="_blank"><span style="color: blue;">La nuit, de ton nom</span></a> (7'32)</b><br />
<span style="font-family: Georgia;"><b>• 29. Venise 5. <a href="http://maurice-darmon.blogspot.fr/2013/11/venise-5-la-grande-odalisque-1821-muet.html" target="_blank">La grande odalisque</a> </b></span><b style="font-family: Georgia;">(18'21, muet)</b><br />
<b style="font-family: Georgia;">• 30. Venise 6. <a href="http://maurice-darmon.blogspot.fr/2013/11/venise-6-noces-marines-6.html" target="_blank">Noces marines</a> (5'59)</b><br />
<b style="font-family: Georgia;">• 31. Venise 7.<a href="http://maurice-darmon.blogspot.fr/2013/11/op-87-venise-7-letoffe-du-diable-2012.html" target="_blank"> L'étoffe du diable</a> (20'12)</b><br />
<b style="font-family: Georgia;">• 32. Venise 8. <a href="http://maurice-darmon.blogspot.fr/2013/12/venise-8-souvent-la-foule-1319.html" target="_blank">Souvent la foule</a> (13'18)</b><br />
<b style="font-family: Georgia;">• 33. Venise 9. <span style="color: blue;"><a href="http://maurice-darmon.blogspot.fr/2013/12/venise-9-la-cite-interdite.html" target="_blank">La cité interdite</a></span> (7'21)</b><br />
<b style="font-family: Georgia;"><br /></b></div>
</div>
</div>
</div>
</div>
</div>
<b></b><br />
<div style="text-align: center;">
<span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;"><b>Dossiers thématiques modifiés ce trimestre</b></span></span></div>
<span style="font-family: Georgia;"><br /></span><span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;"><b>Notre delta fertile:</b></span></span><br />
<div style="margin-left: 40px; text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia;"><b><span style="color: black;">1.<a href="http://www.google.com/url?q=http%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Flibratextu%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzfiVMHEeDmO5WIeOp_64oGiZFEpXQ" target="_blank"><span style="color: blue;"> </span></a></span><a href="http://www.google.com/url?q=http%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Flibratextu%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzfiVMHEeDmO5WIeOp_64oGiZFEpXQ" target="_blank"><span style="color: blue;">Liber@ Te</span></a></b>: 1. <span style="color: blue;"><a href="https://sites.google.com/site/libratextu/hommes-et-femmes-libres/lettre-de-mordovie" target="_blank"><span style="color: blue;">Nadedja Tolokonnikova: Lettre de Mordovie.</span></a></span></span><br />
<span style="font-family: Georgia,"Times New Roman",serif;"><span style="font-family: Georgia,"Times New Roman",serif;"><b><span style="color: black;">5.</span> <a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fpourmaximilienvox%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEze3Uc7ICGQ6SaO3pTX4DKulgXzviw" target="_blank"><span style="color: blue;">Pour Maximilien Vox</span></a>:</b></span></span><br />
<i style="font-family: Georgia;"> </i><span style="font-family: Georgia,"Times New Roman",serif;"><span style="font-family: Georgia,"Times New Roman",serif;">Autres dossiers: </span></span><b style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"><span style="color: black;">2.</span> <a href="http://sites.google.com/site/mesitalies/" target="_blank"><span style="color: blue;">Italiana</span></a></b><span style="color: black; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">: — </span><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"><b>3.<a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fjudaiecas%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzc29LBEurPaAbMDHxP3XhCMhuSIAQ" style="color: black;" target="_blank"> </a><span style="color: blue;"><a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fjudaiecas%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzc29LBEurPaAbMDHxP3XhCMhuSIAQ" target="_blank"><span style="color: blue;">Judaïca</span></a><span style="color: black;"> — </span></span></b></span><b style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"><span style="color: black;">4. </span><span style="color: blue;"><a href="http://sites.google.com/site/manhattapple/" target="_blank"><span style="color: blue;">Manhattania</span></a>.</span></b></div>
<span style="font-family: Georgia;"><b><br /><span style="color: black;">Notre cinéma:</span></b></span><br />
<div style="margin-left: 40px; text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia;"><b><span style="color: black;">6. </span><a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Flestrainsdelumiere%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzeIjcRHQKkPCxn3ZpbMR8YHlXwbNQ" target="_blank"><span style="color: blue;">Les Trains de Lumière</span></a></b>, site général:<br /><b><span style="color: black;">9. </span></b><b><a href="https://sites.google.com/site/dossierjeanlucgodard/" target="_blank"><span style="color: blue;">Pour Jean-Luc Godard</span></a></b>:<br /><b><span style="color: black;">12.</span> </b><b><a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fpourfrederickwiseman%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEze4OkO__zOVqPoazi7aIcL0xiHVrA" target="_blank"><span style="color: blue;">Pour Frederick Wiseman</span></a></b><b><span style="color: black;">:</span></b> 1. Maurice Darmon: <a href="https://sites.google.com/site/pourfrederickwiseman/fw-chroniques-americaines-pur-2013" target="_blank"><span style="color: blue;">Frederick Wiseman / Chroniques américaines</span></a>, PUR, 2013.</span><br />
<span style="color: black; font-family: Georgia;"><b>13. </b></span><b style="font-family: Georgia;"><a href="https://sites.google.com/site/margueritedurascineaste/" target="_blank"><span style="color: blue;">Le cinéma de Marguerite Duras</span></a></b><span style="color: black; font-family: Georgia;"><b>:</b> 1. </span><a href="https://sites.google.com/site/margueritedurascineaste/2-ses-participations/1993-l-aviateur-ecrire" style="font-family: Georgia;" target="_blank"><span style="color: blue;">Benoît Jacquot: Ses deux derniers entretiens</span></a><span style="color: black; font-family: Georgia;">. — </span><span style="font-family: Georgia;"><br /><b>14. </b><a href="https://sites.google.com/site/nosfilms202productions/" target="_blank"><span style="color: blue;"><b>Notre cinéma © 202 productions</b></span></a><span style="color: black;">. Tous nos films sur un site dédié.</span></span><br />
<span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;"><br /></span></span>
<i style="font-family: Georgia;"> </i><span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;">Autres dossiers: </span></span><b style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;">7. </span><span style="color: blue;"><a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fpourbrunodumont%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzdWmqwVF49__J-21_fnPuWXxfyTdA" target="_blank">Pour Bruno Dumont</a> — </span></b><b style="font-family: Georgia;">8. </b><b style="font-family: Georgia;"><span style="color: blue;"><a href="https://sites.google.com/site/pourpaulcarpita/" target="_blank"><span style="color: blue;">Pour Paul Carpita</span></a> — </span></b><b style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;">10. </span><span style="color: blue;"><a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fdossierraphaeelnadjari%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzfR2eqIIUrZi2ln8cK3IkIrEkwEXw" target="_blank"><span style="color: blue;">Pour Raphaël Nadjari</span></a> — </span></b><b style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;">11.</span> <span style="color: blue;"><a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fstraubethuillet%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzca6WFLhO80l4ZV_JOsKmI6dCgOLg" target="_blank">Pour Jean-Marie Straub et Danièle Huillet</a>.</span></b><br />
<br /></div>
<span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;"><b>15. </b></span><b><a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fpenserparimages%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzdY2LrMNW4ZUi3JlWRIcTjikQdAyA" target="_blank"><span style="color: blue;">Penser par images et par sons</span></a>:</b></span><br />
<div style="margin-left: 40px; text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia;">• <a href="https://sites.google.com/site/penserparimages/photographie/maurice-darmon" target="_blank"><span style="color: blue;">Table complète des diaporamas</span></a>.<br /><span style="color: black;">• </span><a href="https://sites.google.com/site/penserparimages/arts-graphiques/eveline-lavenu" target="_blank"><span style="color: blue;">Éveline Lavenu</span></a><span style="color: black;"> complète régulièrement ses albums d'acryliques et gouaches.</span></span></div>
<span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;"><br /></span><b><span style="color: black;">16. </span><a href="http://sites.google.com/site/reuniondesgouts/" target="_blank"><span style="color: blue;">Les goûts réunis</span></a></b><span style="color: black;">: Nos recettes de cuisine.</span><br /><br /><b><span style="color: black;">17. </span><a href="http://sites.google.com/site/editsetinedits/" target="_blank"><span style="color: blue;">Édits et Inédits</span></a><span style="color: black;">:</span></b></span><br />
<div style="margin-left: 40px; text-align: justify;">
<i style="font-family: Georgia;"> </i><span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;">• Plusieurs textes souvent assez longs, publiés ou non, qu'il convient d'imprimer selon les envies, dont on retrouvera<a href="http://www.google.com/url?q=http%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Feditsetinedits%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzdMPaOemElnrPDRIDHp1fDV73RMmg" target="_blank"><span style="color: blue;"> </span></a></span><a href="http://www.google.com/url?q=http%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Feditsetinedits%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzdMPaOemElnrPDRIDHp1fDV73RMmg" target="_blank"><span style="color: blue;">la liste en accueil</span></a>.</span><br />
<i style="font-family: Georgia;"> </i><span style="font-family: Georgia,"Times New Roman",serif;">• Une section de notre site est consacrée à <a href="https://sites.google.com/site/editsetinedits/une-revue-le-cheval-de-troie" target="_blank"><span style="color: blue;">notre revue Le cheval de Troie</span></a>, comportant une présentation, les sommaires intégraux, quelques articles disponibles en lien avec nos actuels intérêts, et des notes de lectures sur quelques livres.</span><br />
<br /></div>
<span style="font-family: Georgia;"><b>18. <a href="https://sites.google.com/site/letheatreetapres/" target="_blank"><span style="color: blue;">Le Théâtre et après. C'est-à-dire à quoi ça sert? Mais aussi après le théâtre, il y aura quoi?</span></a></b></span><br />
<div style="margin-left: 40px; text-align: justify;">
<a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fstraubethuillet%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzca6WFLhO80l4ZV_JOsKmI6dCgOLg"></a></div>
<br />
<br />
<div style="text-align: justify;">
<i style="font-family: Georgia;"> </i><span style="font-family: Georgia;"><b>Dossiers complets: <a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fpourmaximilienvox%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEze3Uc7ICGQ6SaO3pTX4DKulgXzviw" target="_blank"><span style="color: blue;">Pour Maximilien Vox</span></a></b> — <a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fpourbrunodumont%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzdWmqwVF49__J-21_fnPuWXxfyTdA" target="_blank"><span style="color: blue;"><b>Pour Bruno Dumont</b></span></a> — <a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fdossierraphaeelnadjari%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzfR2eqIIUrZi2ln8cK3IkIrEkwEXw" target="_blank"><span style="color: blue;"><b>Pour Raphaël Nadjari</b></span></a> — <a href="https://sites.google.com/site/libratextu/8-ralentir-travaux" target="_blank"><span style="color: blue;"><b>Pour une petite histoire de Ralentir travaux</b></span></a>.</span><br />
<span style="font-family: Georgia;"><br /></span><i style="font-family: Georgia;"> </i><span style="font-family: Georgia;"><b>Rappel: </b></span><span style="font-family: Georgia;">Parution aux Presses Universitaires de Rennes de notre dernier travail: </span><b style="font-family: Georgia;"><i><a href="https://sites.google.com/site/pourfrederickwiseman/fw-chroniques-americaines-pur-2013" target="_blank"><span style="color: blue;">Frederick Wiseman / Chroniques américaines</span></a></i></b><span style="font-family: Georgia;">, dans l'importante collection </span><i style="font-family: Georgia;">Le Spectaculaire / Cinéma</i><span style="font-family: Georgia;">. </span><a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fwww.facebook.com%2Fpages%2FFrederick-Wiseman-Chroniques-am%25C3%25A9ricaines-un-livre-de-Maurice-Darmon%2F355955454498187&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzdJ3hCtCQNuFd7SGZutGYJSHquNMQ" style="font-family: Georgia;" target="_blank"><span style="color: blue;"><b>Une page Facebook qui suit l'actualité de cette parution</b></span></a><span style="color: black; font-family: Georgia;"> donne tous compléments (filmographie, comment voir les films, essais d'autres auteurs, entretiens, etc.) Nous vous invitons à mentionner votre passage en aimant la page, comme dit Facebook.</span></div>
<br />
<span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;"><i> </i>© Photographie: Maurice Darmon: <a href="http://picasaweb.google.fr/maurice.darmon/Safari/photo#s5038494957991891202" target="_blank"><span style="color: blue;">Safari</span></a>, 2005.</span></span><br />
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<span style="font-family: Georgia;"><br /></span></div>
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<b>En librairie</b></div>
<span style="font-family: Georgia;"></span><br />
<div style="margin-left: 40px; text-align: justify;">
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<span style="font-family: Georgia;"><b><br /></b></span></div>
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<div class="separator" style="clear: both;">
<img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiSvozzIum9_6VLZ7WMps0MzS5SwFw9xCS1Oe1L-0ao6W5GbaDWVFta9x6SUeasuz_Q2h8mjnQ3rq60U4B8fzOHXP8Boh4mV054A_e9mZOt1G7wEJaElDhlgnAJ3No0hyJLBWnNaeSRwrFK/s200/9782753522084.jpg" height="134" width="103" /> <b style="font-family: Georgia;"><span style="font-family: Georgia;"><span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;"><a href="http://www.google.com/url?q=http%3A%2F%2Fwww.letempsquilfait.com%2FPages%2FPages%2520livres%2FPage%2520nouv.553.html&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzdVORmwrdbUr3wwNbcCtIc6Ejieng"><img alt="" border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgrscrjM7aDegGUaMxzkpp-KRvPouYkFh_OzQhl54dqTbmckzGbMxei-CpwMOg41VSUmYmUL2Wa6zQgf74MV4p6C8odOXfawUTgvZEDGauiDtHCLSSgCmU0RTJeNMvQ6rptQBTJygHl_qgI/s400/Godard+%2528C%2529.jpg" style="height: 134px; width: 103px;" /> </a></span><span style="color: black;"><a href="http://www.google.com/url?q=http%3A%2F%2Fwww.letempsquilfait.com%2FPages%2FPages%2520livres%2FPage%2520nouv.552.html&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzf3nX0dL3c_5k8ZMDvYB3HVOXvkpQ"><img alt="" border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEik33edNlXsIAL0niotKSipL9bi5jf21VdKh8Y0JqLPsY2wClpsi-0c33Kko_Efy8oaH5JrWR_VCY6tXZAx13VoQTdLWu3GHHvHeTtDs0UwuMfPa19kuNu8891ThtlTvLACF3z_UtXlttk2/s400/Cassavetes+%2528C%2529.jpg" style="height: 134px; width: 103px;" /></a></span></span></span></b></div>
</div>
</div>
<span style="font-family: Georgia;"><b><span style="font-family: Georgia;"></span></b></span><br />
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<br />
<b>Liens vers les éditeurs</b><br />
<b><br /></b><span style="color: blue; font-family: Georgia;"><a href="http://www.google.com/url?q=http%3A%2F%2Fwww.letempsquilfait.com%2FPages%2FPages%2520livres%2FPage%2520nouv.553.html&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzdVORmwrdbUr3wwNbcCtIc6Ejieng">La question juive de Jean-Luc Godard</a></span></div>
<div style="text-align: center;">
<a href="http://www.google.com/url?q=http%3A%2F%2Fwww.letempsquilfait.com%2FPages%2FPages%2520livres%2FPage%2520nouv.552.html&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzf3nX0dL3c_5k8ZMDvYB3HVOXvkpQ"><span style="color: blue; font-family: Georgia;">Pour John Cassavetes</span></a></div>
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<div>
<span style="color: blue;"><a href="http://pur-editions.fr/detail.php?idOuv=3200" target="_blank">Frederick Wiseman / Chroniques américaines</a></span></div>
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</div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-45578881138389849282013-12-05T19:34:00.004+02:002023-09-21T08:27:44.183+02:00Robert Bresson: Une femme douce, 1969<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<br /></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif; margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg45hNGWZZmDM1PFZrf7pci34CxK9mXDO7MV-jIwQUxV0knrz2X8h8hKc76rMQva-NfIUK53DaL9ixGXuRsb9kw863_sbUBWdDTr87nv6OSQvMpAloJ5CfdAWuCnkLEbUiQzNc0cYIwPCsl/s1600/robert-bresson-une-femme-douce-affiche-video-dominique-sanda-photo-2.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg45hNGWZZmDM1PFZrf7pci34CxK9mXDO7MV-jIwQUxV0knrz2X8h8hKc76rMQva-NfIUK53DaL9ixGXuRsb9kw863_sbUBWdDTr87nv6OSQvMpAloJ5CfdAWuCnkLEbUiQzNc0cYIwPCsl/s640/robert-bresson-une-femme-douce-affiche-video-dominique-sanda-photo-2.jpg" width="435" /></a></span></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><br /></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">Tourné à l'automne 1968, après le triomphe en juin de la droite parlementaire et au plein de la normalisation tchécoslovaque, </span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">Une femme douce</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> est le neuvième film de Robert Bresson, sur les treize qu'il tourna durant quarante ans entre </span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">Les anges du péché</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> (1943) et </span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">L'argent</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> (1983). Il a soixante-sept ans et dans les dix années précédentes — </span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">Pickpocket</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">, </span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">Le Procès de Jeanne d'Arc</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">, </span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">Au hasard Balthazar</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">, et </span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">Mouchette </i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">dont, pour la petite histoire, </span><a href="http://sites.google.com/site/dossierjeanlucgodard/" style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;" target="_blank"><span style="color: blue;">Jean-Luc Godard</span></a><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> fit une bande-annonce — les moins cinéphiles se surent convoqués à des chefs-d'œuvre. L'opérateur Ghislain Cloquet — de </span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">Nuit et Brouillard</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> </span><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">(1955) </span><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">d'Alain Resnais à </span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">Tess</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> (1979) de Roman Polanski, en passant par </span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">Nathalie Granger</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> (1972) de <a href="https://sites.google.com/site/margueritedurascineaste/" target="_blank"><span style="color: blue;">Marguerite Duras</span></a> ou </span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">Guerre et amour</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> (1975) de Woody Allen — avait assuré les splendides noir et blanc des deux derniers films. C'est à lui que Bresson confia son premier film en couleur.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">À partir du négatif original pour la nouvelle sortie de ce film invisible depuis plus de quarante ans, les laboratoires Éclair ont apporté tous leurs soins au filtrage et à la stabilisation de la palette réfléchie entre Bresson et Clocquet. Et, si importante dans le cinéma bressonnien, la bande son a été entourée des mêmes compétences techniques, historiques et artistiques pour que gronde cette circulation, vrillent ces klaxons, crissent ces pneus et ces freins, ceux de la fin des années Soixante.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </span><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Éclats des néons rouges et jaunes, des éclairages publics et des phares des voitures, le film est documentaire des nuits de Paris. Et dans les extérieurs de rues et de parcs, l'automne impose ses délicates transparences et ses ocres soutenus. Plaisirs furtifs du <i>Eastmancolor</i>, puis le monde du magasin d'achats d'objets — prêteur sur gages dans <a href="http://fr.wikisource.org/wiki/Krotka%C3%AFa#" target="_blank"><span style="color: blue;">Krotkaïa, la nouvelle de Dostoievski</span></a> (1876) —, et l'appartement petit-bourgeois du couple sont gris ou beiges, étriqués comme leurs ternes vêtements de confection courante, ou le marron rayé d'une cravate de convention. Longtemps peintre, il fuit la peinture dans ses films: «<i>J'ai horreur du cartepostalisme</i>». De la couleur, Bresson attend qu'elle apporte «<i>une plus grande puissance d'expression ou de conviction de l'image. On peut frapper fort avec la couleur. Mais si la couleur n'est pas juste, alors on tombe dans l'horrible réalité du faux</i>». S'il voulait rejoindre la peinture, le cinéaste ou le photographe que Bresson fut aussi aurait davantage à attendre du noir et blanc: «<i>le vert d'un arbre qu'il suggère est plus proche du vrai vert que le faux vert photographique dans un film en couleur</i> <b><span style="color: red;">(1)</span></b>». Autant de garde-fous pour les étalonneurs numériques de la copie neuve.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i><span style="color: #222222;"> </span> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">En 1986, <span><i>Thérèse </i>d'Alain Cavalier</span> aura retenu la leçon. Déjà nécessaire pour les blancs des draps et des nappes, la couleur existe pour la terrible tache de sang sur le visage de Dominique Sanda, dix-sept ans et premier film: «<i>Elle paraissait seize ans, Anna, tu te rappelles?»</i>. Bresson l'aurait choisie pour le bombé unique de son front, s'il n'avait été conquis par sa voix au téléphone, sans l'avoir jamais vue. Visage indemne et sang rouge sur le trottoir, ineffaçable malgré les serviettes rougies dans la cuvette par l'ultime toilette de la morte sur son lit pliant de quatre-vingt-dix, répudiée dans le salon devant le piano à queue, pour ses nuits de femme douce.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">En amont aussi, Bresson reçoit tout le cinéma. Plans sur les mains et les corps et, </span><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">à l'opposé de toute idée de flashback,</span><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> </span><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">une «</span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">confrontation de la mort et de la vie </i><b style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;"><span style="color: red;">(2)</span></b><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">» dans les </span><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">entremêlements de divers présents</span><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">, comme déjà on les vit dans </span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">Hiroshima mon amour</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> d'Alain Resnais (1959) et <i>L'année dernière à Marienbad</i> (1961), </span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">Une femme mariée</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> de <a href="http://sites.google.com/site/dossierjeanlucgodard/" target="_blank"><span style="color: blue;">Jean-Luc Godard</span></a> (1964), </span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">Shadows</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> (1961 en France) ou </span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">Faces</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> (1968) de <a href="https://sites.google.com/site/lestrainsdelumiere/cassavetes-john" target="_blank"><span style="color: blue;">John Cassavetes</span></a>, en noir et blanc en effet. Couleur? voilà jumelle l'histoire tout entière de </span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">Marnie</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> (1964), triomphe du rouge dans le mariage forcé, vu par Alfred Hitchcock. Et quant aux mots, à l'instant de l'irrémédiable, ils éclatent et se dérobent dans les escaliers et les portes: «</span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">En une seconde tout son visage a changé. La douceur a fait place au défi, à la révolte</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">». Reviennent le regard de Camille livrée par son mari Paul à la décapotable rouge de Jeremy Prokosch, puis celui, charbonneux et silencieux, dans le parc de la villa romaine — même œil froid de la femme douce vers son mari dans sa décapotable, noire celle-là, avant de jeter la brassée de marguerites. Camille encore, descendant la cage de l'escalier de leur appartement: «</span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">Je te méprise</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">».</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Sidérante rencontre du «<i>Je t'aime je te désire</i>», mot pour mot contemporain dans le livre et le film de </span><a href="https://sites.google.com/site/margueritedurascineaste/" style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;" target="_blank"><span style="color: blue;">Marguerite Duras</span></a><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">, <i>Détruire dit-elle</i> (1969): qui rencontre l'autre?<b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></i></b></div>
<div style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px; text-align: justify;">
<blockquote style="border: none; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px;">
<b style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; font-size: 18px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px;"> </span><i style="color: black; font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; line-height: normal;">Je pense que Bresson a introduit la plus grande nouveauté qu'on pouvait, à l'heure actuelle, introduire dans le cinéma, c'est celle de la pensée. Et cette pensée n'était pas immédiatement apparente. C'est-à-dire que j'étais débordée par le spectacle et, en même temps, je ne pouvais pas mettre le doigt exactement sur ce que je voyais</i><span style="color: black; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: normal;"> </span><b style="color: black; font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; line-height: normal;"><span style="color: red;">(3)</span></b><span style="color: black; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: normal;">.</span></blockquote>
</div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </span><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i>Détruire dit-elle</i> où, par l'intercession d'Alissa, son mari Max Thor et un couple conformiste et petit-bourgeois font en quelques heures des pas de géant dans la perception du monde, de la vie, de leurs propres personnes. Ainsi, le promoteur immobilier Bernard Alione est le jumeau de Luc, le mari de la femme douce, tous deux en chemin douloureux vers les lointaines douceur et renoncement à la possession. Ainsi</span><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> leur découplage entre l'amour et le désir que Dostoievski n'avait pas envisagé non plus: alors que s'aggrave la mésentente, «</span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">ce soir-là, comme chaque soir, nous avons tiré de grands plaisirs l'un de l'autre</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">». Ainsi enfin </span><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">sur l'écran de télévision allumé pour personne, ces images d'archives de l'</span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">Adlertag</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> en vue de la «<i>destruction totale</i>» de la </span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">Royal Air Force</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> en 1940</span><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">.</span><br />
<span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"><br /></span>
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </span><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">Après tout, ne suffisait-il pas de se souvenir de </span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">La Prisonnière</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> de Marcel Proust, matrice de </span><i style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;">La captive</i><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> de Chantal Akerman (2000)? Et </span><a href="https://sites.google.com/site/dossierraphaeelnadjari/films" style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif;" target="_blank"><span style="color: blue;">pour son premier film, <i>The Shade</i></span></a><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> (1999), <a href="https://sites.google.com/site/dossierraphaeelnadjari/" target="_blank"><span style="color: blue;">Raphaël Nadjari</span></a> offre aux spectateurs de la fin du siècle une adaptation semblable de la même nouvelle, mais à Greenwich Village, en évident hommage à l'un de ses maîtres en cinéma.</span></div>
<div style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px; text-align: justify;">
<blockquote style="border: none; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span class="Apple-tab-span" style="color: black; line-height: normal; white-space: pre;"><br class="Apple-interchange-newline" /></span></span><b style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; font-size: 18px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="color: black; line-height: normal;">Ce que les hommes faisaient jusqu'ici de la poésie, de la littérature, Bresson l'a fait avec le cinéma. On peut penser que jusqu'à lui, le cinéma était parasitaire, il procédait d'autres arts. Et qu'on est entré, avec lui, dans le cinéma pur. Et d'un seul</i><span style="color: black; line-height: normal;"> </span><b style="color: black; line-height: normal;"><span style="color: red;">(3)</span></b><span style="color: black; line-height: normal;">.</span></span></blockquote>
</div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </span><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Duras s'entretenait alors du film précédent, <i>Au hasard Balthazar</i>. <i>Une femme douce</i> est justement ce manifeste, politique, esthétique, c'est-à-dire moral, où Bresson situe le cinéma par rapport à tous les autres arts.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"> </span><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">«<i>Nous irons au cinéma quand tu voudras. Presque pas au théâtre, c'est trop cher</i>», ce sont les premiers mots de Luc au premier matin: «<i>J'ai jeté de l'eau froide sur cet enivrement</i>». Abandonnant pour un soir la télévision, au Paramount-Élysées ils regardent <i>Benjamin ou les mémoires d'un puceau</i> de Michel Deville (1967) que Bresson choisit tard et par commodité puisqu'il était aux catalogues des mêmes producteurs et distributeurs. Mais pas seulement: ce film est alors</span><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"> le dernier gros succès de Mag Bodard, sa productrice</span><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">, un film séduisant, chatoyant et servi par des vedettes comme Michèle Morgan, Catherine Deneuve, Michel Piccoli et Pierre Clémenti, photographiés par Ghislain Cloquet en costumes du XVIII<span style="font-size: xx-small;">e</span> siècle dans un parc splendide, toutes reconstitutions spectaculaires que Bresson refuse pour adapter la «<i>nouvelle bâclée</i>» de Dostoievski: «<i>Je ne me vois pas faisant un film de neige, de troïkas, de coupoles byzantines, de pelisses de fourrure et de barbes </i><b><span style="color: red;">(2)</span></b>».</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Mais on drague trop les femmes au cinéma. Alors Luc se met en chemin et s'affranchit de ses propres règles. Les voilà au théâtre, devant une représentation bruyante et ferraillante de <i>Hamlet</i>. Elle sait la trahison par omission et, au retour, furieuse et sûre de sa mémoire, elle lit le passage (III, 2) coupé par le vulgaire metteur en scène «<i>pour pouvoir crier pendant toute la pièce</i>», où — théâtre dans le théâtre — Hamlet dirige le premier comédien.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px; text-align: justify;">
<blockquote style="border: none; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px;">
<b style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; font-size: 18px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">HAMLET, au premier comédien: — </span><i style="color: black; font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; line-height: normal;">Dites vos répliques du bout des lèvres, comme je les ai prononcées moi-même. Si vous les hurlez comme beaucoup de nos acteurs font, j'aimerais mieux donner mon texte au crieur public. Ne sciez pas l'air avec votre main. Car, dans le torrent, la tempête, l'ouragan de la passion il fait toujours user de mesure et acquérir même une certaine douceur.</i></blockquote>
<br />
<b style="font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; font-size: 18px;"><i> </i></b><span style="color: black; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: normal;">Exactement comme Bresson dirigera Dominique Sanda et Guy Frangin. L'une consentante, l'autre contre son gré, il les voulait ainsi.</span><br />
<span style="color: black; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; line-height: normal;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Le couple se rend aussi dans trois musées, histoire de dresser l'inventaire d'autres conduites culturelles. Une courte visite au Louvre: «<i>Les Vénus, les Psyché nues qu'elle admirait au Louvre me faisaient plutôt voir la femme comme un instrument de plaisir</i>», au regard de ces mots de Bresson: «<i>Si le nu n'est pas beau, il est obscène</i> <b><span style="color: red;">(2)</span></b>». Une galerie d'art moderne où sont exposées des œuvres cinétiques, qu'elle semble seule à apprécier. Le muséum d'histoire naturelle du Jardin des Plantes pour conserver l'animalité dans la grâce: «<i>C'est la même matière première pour tous, mais arrangée différemment pour une souris, pour un éléphant, pour un homme</i>», dit-elle sur une sonate de Mozart en feuilletant un livre d'art, arrêtée sur <i>La blonde aux seins nus</i> de Manet, quelque temps après cette première promenade dans la Ménagerie où il avait forcé sa mise en cage au milieu des rugissements des fauves et des chants d'oiseaux: </span></div>
<blockquote style="border: none; color: #222222; line-height: 24px; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px; text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span class="Apple-tab-span" style="color: black; line-height: normal; white-space: pre;"><br class="Apple-interchange-newline" /></span><span style="color: black; line-height: normal;">LUI. — </span><i style="color: black; line-height: normal;">Et vous? Que désirez-vous?</i> </span></blockquote>
<blockquote style="border: none; color: #222222; line-height: 24px; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px; text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">ELLE. — <i>Je ne sais pas. Autre chose, de plus large. Le mariage légal m'assomme.</i></span></blockquote>
<blockquote style="border: none; color: #222222; line-height: 24px; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px; text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">LUI. —<i> Réfléchissez, des centaines de milliers, des millions de femmes le désirent.</i></span></blockquote>
<blockquote style="border: none; color: #222222; line-height: 24px; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px; text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">ELLE.— <i>Peut-être. Mais il y a aussi les singes.</i></span></blockquote>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Il faudrait détailler davantage. D'autres séquences questionnent d'autres arts pour entrer «<i>avec lui, dans le cinéma pur. Et d'un seul</i>»: la musique et la littérature par exemple, dans leur fonction d'édification personnelle et d'urgence vitale en même temps que dans leur statut d'objets de consommation: «<i>Elle voulait dire: "Je ne m'attendais pas à trouver en vous un homme instruit"</i>». Lui le Grand prix de Monaco pour bande son tandis qu'elle se prépare à sa joyeuse nuit de noces, ou les courses hippiques à la télévision, elle l'électrophone à même le sol, ce sol où tombent, où sont jetées avec rage ou indifférence les livres et les fleurs. Car le ciel appartient au chant des oiseaux et à l'écharpe de la défenestrée lorsqu'à terre elle aussi, elle n'a plus cru à l'envol.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Commentant son film <b><span style="color: red;">(1)</span></b>, Bresson cite Paul Claudel: «<i>Je suis ici, l'autre est ailleurs et le silence est terrible</i>». Une note retrouve opportunément le reste de ce poème, <i>Ténèbres</i>, 1915:</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<blockquote style="border: none; color: #222222; line-height: 24px; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px; text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="color: black; line-height: normal;">Je souffre et l'autre souffre, et il n'y a point de chemin</i> </span></blockquote>
<blockquote style="border: none; color: #222222; line-height: 24px; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px; text-align: justify;">
<i style="color: black; line-height: normal;"><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Entre elle et moi, de l'autre à moi point de paroles ni de main.</span></i></blockquote>
<br />
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, "Times New Roman", serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Cérémonie secrète, cette scène muette où Luc ramasse la savonnette tombée à terre pour la tendre à sa femme dans la baignoire: pas un mot et les yeux dans les yeux les mains tendues s'évitent. Et secret de tout le cinéma de Robert Bresson: jeu de pistes qu'il faut suivre si nous voulons espérer ramasser une clé. Parmi d'autres car — magie de Bresson, magie de la pensée «<i>non immédiatement apparente</i>» — selon que, personne devant <i>Une femme douce</i>, vous serez seule, accompagnée d'ami de l'un ou l'autre sexe, une ou plusieurs ou à côté de votre conjoint, vous ne serez pas «<i>débordée</i>» par le même film, et votre doigt se posera alors en plus d'un endroit, dont vous finirez par savoir mieux quelque chose.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif; font-size: x-small;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Notes.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif; font-size: x-small;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b><b><span style="color: red;">1.</span></b> «Je suis ici, l'autre est ailleurs et le silence est terrible», <i>Bresson par Bresson</i>, entretiens (1943-1983) rassemblés par Mylène Bresson, Flammarion, 2013.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif; font-size: x-small;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"> </span><span class="Apple-tab-span" style="white-space: pre;"> </span><b style="color: red;">2. </b>«La confrontation de la mort et de la vie», op. cit.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif; font-size: x-small;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b><b><span style="color: red;">3. </span></b><a href="https://sites.google.com/site/margueritedurascineaste/" target="_blank"><span style="color: blue;">Marguerite Duras</span></a>: entretien avec Roger Stéphane, Jean-Luc Godard, Louis Malle et Robert Bresson, <i>Pour le plaisir</i>, ORTF, 1966, «Trouver un truc pour arriver à la vie sans la copier», op. cit.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif; font-size: x-small;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif; font-size: x-small;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>© <a href="http://mubi.com/notebook/posts/movie-poster-of-the-week-une-femme-douce-and-the-posters-of-olga-polackova-vyletalova" target="_blank"><span style="color: blue;">Olga Poláčková-Vyleťalová</span></a> (1944-), peintre et graphiste alors tchécoslovaque, sur une photographie de Bert Stern: <i>Une femme douce</i> de Robert Bresson, 1969. </span></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-88745691326431077162013-11-03T11:35:00.000+02:002015-12-18T20:35:05.639+02:00Marguerite Duras / Benoît Jacquot: les deux derniers entretiens (1993)<div>
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: center;">
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjwmX0s3BOfgkoIj1GV6JcvqwxZzWQN9DDU1SmzlHWLtWc2AqJ8ICa-EueDSupwrTZvuTT0Rb2SvPxox1Xiwi50PSV0Ix8VnfEcUo9nhlSUn9zcvxpNJr_e3wtrFOB0TrYOTh6oeTXRcvmb/s1600/149292_image_52656-crop.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><img border="0" height="239" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjwmX0s3BOfgkoIj1GV6JcvqwxZzWQN9DDU1SmzlHWLtWc2AqJ8ICa-EueDSupwrTZvuTT0Rb2SvPxox1Xiwi50PSV0Ix8VnfEcUo9nhlSUn9zcvxpNJr_e3wtrFOB0TrYOTh6oeTXRcvmb/s1600/149292_image_52656-crop.jpg" width="320" /></span></a></div>
<br /></div>
<div style="text-align: center;">
<span style="color: blue; font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Dans son appartement de la rue Saint-Benoît pour <i>La mort du Jeune aviateur anglais</i> (36'), dans sa maison de Neauphle-le-Château pour <i>Écrire</i> (43'), Marguerite Duras a bientôt quatre-vingts ans. D'innombrables textes, dix-neuf films, elle ne publie plus depuis un an, écrit son journal intime, reçoit peu de monde. Autour d'elle, tous et toutes invisibles, la photographe Hélène Bamberger, Caroline Champetier à la caméra, son compagnon Yann Andrea et le cinéaste Benoît Jacquot réalisent ses deux derniers entretiens, trois ans avant sa disparition. Elle connaît Benoît Jacquot depuis qu'il l'assista pour <i><span style="color: blue;"><span style="color: blue;">Nathalie Granger</span> </span></i>(1972), <span style="color: blue;"><i>La Femme du Gange</i></span> (1973), et qu'il donna sa voix off dans <span style="color: blue;"><i>India Song</i></span> (1974) et dans <i><span style="color: blue;">Le Navire Night</span> </i>(1978).</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Après la trachéotomie subie en 1988, la canule qu'elle ne cache pas vraiment et qu'elle ajuste parfois transforme aujourd'hui modérément sa voix. Elle est accoudée dans un fauteuil le dos à la fenêtre, à Paris entre deux guéridons — parfois un verre trahit la chronologie des séquences —; à Neauphle-le-Château près du piano et là ce sont les bagues, le bracelet, le châle de cachemire pour indiquer l'ordre du temps. Elle se tient droite, le doux visage enfoncé dans les épaules projetées en avant, et quand elle s'adosse: «<i>J'ai fini</i>». Chandail rouge orange ou bleu, jupe beige ou à carreaux, toujours elle découvre son genou, caillou lisse où elle pose ses mains, au centre géométrique et visuel de l'image, ancrée au sol par les magnifiques fuseaux de ses mollets: elle aime ses jambes à l'évidence, j'en trouverai un jour la preuve. Ses cheveux sont retenus par un bandeau. À Paris, souvent la rumeur du proche boulevard Saint-Germain traverse la vitre de ses klaxons: «<i>Il faut continuer, tant pis</i>».</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Ses mains se caressent puis se croisent, flattent longuement son genou nu et quand elles se mettent en mouvement c'est pour signifier l'insistance, la précision du temps et du lieu, cet au-delà que ne peuvent dire les mots ni les silences: «<i>Pourquoi un film de ça, qui est presque rien, presque rien, rien, à peine visible. C'est ça qu'il faut je crois. Je n'ai rien dans les mains, rien». Ses mots: dans son texte Écrire, rédigé après et d'après cet entretien, elle affirme vouloir aller «à l’os, au plus pauvre de la phrase </i><b><span style="color: red;">(1)</span></b>», ce que déplie admirablement cette autre orfèvre des mots et de la diction, Hélène Cixous:</span><br />
<blockquote style="border: none; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px;">
<blockquote style="border: none; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i><br /></i></b>
<b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b><i>Ce que Duras invente, c’est ce que j’appellerai: l’art de la pauvreté. Petit à petit, il y a un tel travail d’abandon des richesses, des monuments, au fur et à mesure qu’on avance dans son œuvre, et je crois qu’elle en est consciente, c’est-à-dire qu’elle dépouille de plus en plus, elle met de moins en moins de décor, d’ameublement, d’objets, et alors c’est tellement pauvre qu’à la fin quelque chose s’inscrit, reste, et puis ramasse, rassemble tout ce qui ne veut pas mourir </i><b><span style="color: red;">(2)</span></b>.</span></blockquote>
</blockquote>
<div>
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><br /></span></div>
</div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Il n'est pas vrai qu'elle s'écoute parler, elle et ses mains écoutent en vérité le temps, les images et les sons qui à ses mots sont liés.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Les yeux droits dans les yeux de ses deux interlocuteurs, Yann Andrea et Benoît Jacquot, parfois des deux femmes aussi. Si rarement ils les quittent c'est pour aller trouver images et souvenirs au plafond ou dans un coin de la pièce, au plancher, au fond de ce couloir où sont tapies ses peurs, ailleurs de toutes façons puisqu'ils se saisissent à leur tour d'autres douleurs — «<i>Une banalité à son sommet, donc c'est une grandeur</i>» —, d'autres étonnements — «<i>Oui j'écris à cause de cette chance que j'ai de me mêler de tout</i>» —, d'autres émotions jusqu'aux larmes, d'autres doux scandales — «<i>Peut-être un amant. De lui. Un homme qui aimait cet enfant</i>». Et parfois, quand tout se calme en éclats de courts silences, le menton se lève comme pour en prendre la mesure ou les dompter un instant.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Voilà maintenant des gros plans qui oublient l'âge, la maladie longtemps mortelle dont elle a différé la fin, la vieillesse, la mort forcément imminente en ces deux derniers entretiens, pour ne plus voir que la ferme douceur, l'aimante volonté de partage de l'indicible, indicible de la mort partout, celle du jeune aviateur, de l'enfant, du petit frère, de la mouche, et de sa propre défaite par l'écriture, toujours provisoire et discrètement triomphante.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Dans <i>La mort du jeune aviateur anglais</i>, la voilà filmant comme par procuration, guidant par la parole la caméra de Caroline Champetier:</span><br />
<div>
<blockquote style="border: none; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px;">
<blockquote style="border: none; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i><br /></i></b>
</span><br />
<div>
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b><i>C'est beau la lumière derrière sur les planches des murs. Et toujours cette couleur de l'église, couleur cendre, bleue. Voilà, on va arriver sous l'arbre, maintenant. Tu vas le chercher en haut l'arbre, il est énorme</i> (…)<i>. Tu peux repartir, très doucement derrière le mur peut-être. Là ici tu peux filmer un tout petit peu, tu peux revenir en arrière, sans bouger. Le mur est complètement cassé, et je crois que ce sont des balles. Tu pars sur la gauche, très doucement, voilà. Tu remontes un peu pour chercher d'autres balles, et tu redescends le long de la colonne, la brique la brique à gauche, et tu arrives à la terre. À la terre tu repars. Tu vas là, là, jusqu'à l'allée. Jusqu'au bruit, encore, encore encore. Jusqu'au bruit — Qu'est-ce qu'il dit? —, qu'elle le cherche ce bruit, qu'elle le regarde.</i></span></div>
<div>
</div>
</blockquote>
</blockquote>
<div>
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><br /></span></div>
</div>
</div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>D'ordinaire sûre de ses mouvements et de ses lumières, ici Caroline Champetier zoome nerveusement, marche, tremblante et indécise, ou hâtive. Pas question de réussir les images à la place de Marguerite Duras, préserver son royaume et sa maîtrise par ce qu'elles peinent à montrer, ouvrir tout le champ de notre imaginaire au rêve de film, quelque chose du cinéma selon Duras qui n'a plus tourné depuis huit ans:</span><br />
<div>
<blockquote style="border: none; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px;">
<blockquote style="border: none; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i><br /></i></b>
<b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b><i>On pourrait le tourner ça, mais jamais refaire l'événement c'est impossible et photographier les faits, le fait de la tombe, le soleil crevé dans les arbres, oui, le ruisseau, les chats, y en a beaucoup </i>(…)<i> On devrait faire un film quand même là-dessus, d'insistances, d'insistances, de retours en arrière, de repars, de redéparts. Essayer d'ex… comment dirais-je? d'exprimer tout, la totalité de la chose, de l'émotion. Et puis casser, abandonner.</i></span></blockquote>
</blockquote>
<div>
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><br /></span></div>
</div>
</div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Alors il lui vaudra mieux écrire finalement: son texte sera à «<i>mener comme un cheval</i>», il décrira par le dehors mieux que le cinéma, en viendra au fait, il lui faudra être plus forte que ce qu'elle écrit: «<i>des émotions de cet ordre très subtiles, très profondes. Très charnelles, essentielles complètement, qui peuvent couver des vies entières dans le corps. C'est ça, l'écriture. C'est le train de l'écrit</i>». À l'opposé du cinéma qui a beau filmer et ne voit rien. Ce cinéma tremble de ne rien avoir vu à Vauville, comme la dame de Nevers n'avait rien vu à Hiroshima, malgré les splendides photographies qu'en ramena Emmanuelle Riva <span style="color: red;"><b>(3)</b></span>.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Dans le film <i>Écrire</i> au contraire, les choses et les gens reprennent leur place, Marguerite Duras dit le livre — «<i>Je sais que je ne suis pas encore morte</i>» —, et le pouvoir de filmer est rendu à Caroline Champetier <span style="color: red;"><b>(4)</b></span> et à Benoît Jacquot. En de courtes séquences séparées au noir, une caméra paisible et stable enchaîne les plans fixes et les imperceptibles approches. Sur la table, le divan, le parc, les baies et les fenêtres, non plus vers les arbres morts mais sur le parc, elle sait alors dérouler d'amples, réguliers et empathiques panoramiques.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Voilà ce que ces deux entretiens ont à voir avec les images et avec le cinéma. Ce qu'elle y dit à présent? On ne résume pas Marguerite Duras, qui, parlant de tout son long, le fait mieux que personne, c'est même là son art. <a href="http://www.editionsmontparnasse.fr/p1210/La-Mort-du-jeune-aviateur-anglais-Ecrire-DVD"><span style="color: blue;">Ce coffret (un DVD et deux CD) des éditions Montparnasse et des femmes / Antoinette Fouque</span></a> nous offre Marguerite Duras par ses mots, avec sa voix, son visage, ses yeux, ses mains et ses genoux, puis par son écriture des textes conséquents et de <i><span style="color: blue;">Roma</span></i>, dans la voix brûlante et ponctuelle de Fanny Ardant.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif; font-size: x-small;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b><b>Notes</b></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif; font-size: x-small;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>1. <i>Écrire</i>, Gallimard, 1993, p. 15.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif; font-size: x-small;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>2. <span style="background-color: white; line-height: 22px;">Hélène Cixous et Michel Foucault: entretien, </span><i style="background-color: white; line-height: 22px;">À propos de Marguerite Duras</i><span style="background-color: white; line-height: 22px;">, Cahiers Renaud-Barrault, n° 89, pp. 9-10. Repris dans Michel Fouchault: <i>Dits et Écrits I</i>, 1954-1975, Gallimard, 1994.</span></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-size: x-small;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i><span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"> </span></i></b><span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;">3. Dominique Noguez et Marie-Christine de Navacelle (dir.): <a href="http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Haute-Enfance-Albums/Tu-n-as-rien-vu-a-Hiroshima"><span style="color: blue;"><i>Tu n'as rien vu à Hiroshima</i></span></a>, photographies d'Emmanuelle Riva, Gallimard, 2009.</span></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif; font-size: x-small;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>4. Caroline Champetier réalisera ensuite en 1996 <i>Marguerite Duras 1914-1996</i> (53'), dans la série <i>Un siècle d'écrivains</i>, dirigée par Bernard Rapp. <a href="https://sites.google.com/site/margueritedurascineaste/2-ses-participations"><span style="color: blue;">Une brève description ici, en section <b>Posthumes</b></span></a>.</span></div>
<div style="text-align: center;">
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><br /></span></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgZvC5EdEtSt2BLw3S5F5AF2Wf8-EJLLms2wzcfSb01-CD4A6OzHKB5irOb9-nR_vTn_zyc5omMPe0Yrf9_4qd7yvRF4iLnmQsOLeVMf2XoXF9Qm9-dO5aLekpe-gePHdxdC2qDiPVzgxDt/s1600/4af2e0250b629-coffret-marguerite-duras-et8719-drjpg.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgZvC5EdEtSt2BLw3S5F5AF2Wf8-EJLLms2wzcfSb01-CD4A6OzHKB5irOb9-nR_vTn_zyc5omMPe0Yrf9_4qd7yvRF4iLnmQsOLeVMf2XoXF9Qm9-dO5aLekpe-gePHdxdC2qDiPVzgxDt/s1600/4af2e0250b629-coffret-marguerite-duras-et8719-drjpg.jpg" /></span></a></div>
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif; font-size: x-small;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>© Texte: Maurice Darmon, 3 novembre 2013. <span style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i>© </i></span>Photogramme: Benoît Jacquot: <i>La mort de l'aviateur anglais</i>, 1993. — © Photographie: Auteur inconnu, tous droits réservés.</span></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-31273794403925334262013-09-29T11:20:00.000+02:002013-09-29T11:42:30.690+02:00Nadejda Tolokonnikova: lettre du camp 14 de Mordovie<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEguWaW7cT1NnK-X1wBWjOvLTIQztcTYgaoKOI1Rwzc5sLPQeteKwGoGuQ-Gw2IoY5lqlZHH9vo2sgI6NQuhJT3mXexen412KAuzexNSLuHJ3BTFPkU_guhIW51_gTBNDoGNJi8gWhHUVso2/s1600/nadhedja.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="265" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEguWaW7cT1NnK-X1wBWjOvLTIQztcTYgaoKOI1Rwzc5sLPQeteKwGoGuQ-Gw2IoY5lqlZHH9vo2sgI6NQuhJT3mXexen412KAuzexNSLuHJ3BTFPkU_guhIW51_gTBNDoGNJi8gWhHUVso2/s400/nadhedja.jpg" width="400" /></a></div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: center;">
<a href="https://sites.google.com/site/libratextu/hommes-et-femmes-libres/lettre-de-mordovie" target="_blank"><span style="color: blue;">Lecture dans dossier, cliquer ici.</span></a></div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span><i>Chacun se souvient des Pussy Riot. On en a beaucoup parlé alors, comme d'une histoire somme toute légère, où ces excitées avaient au fond leur part de responsabilité dans ce qui leur arrivait. Des esprits particulièrement forts trouvaient même très élégant d'écrire dans leurs moyens habituels d'expression (ce qu'on appelle les "réseaux sociaux") qu'il y en avait marre des Pussy Riot, qui avaient sans doute le tort de les éclipser un peu trop à leur goût. </i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i><br /></i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span><i>Heureusement pour eux, tout ça n'a guère duré et, un clou chassant l'autre, ils sont revenus à de plus nobles causes. Deux des trois Pussy Riot sont pourtant aujourd'hui dans des camps en Mordovie, au pays de Gérard Depardieu. Nadejda Tolokonnikova — l'autre s'appelle Maria Alekhina —vient de faire parvenir cette lettre, publiée partiellement dans </i>Le Monde<i> et dans </i>Libération<i>. En voici ici la version intégrale, dans la traduction inédite de Marie N. Pane, reprise du site </i><a href="http://demandezleprogramme.unblog.fr/2013/09/25/lettre-de-mordovie/" style="font-style: italic;" target="_blank"><span style="color: blue;">Demandez le programme</span></a><i>. Espérons simplement que certains ne trouveront pas à présent cette lettre un peu trop longue</i>.</div>
<div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span><b>Nadejda Tolokonnikova, Pussy Riot. Lettre du camp 14 de Mordovie. —</b> Ce lundi 23 septembre, j’entame une grève de la faim. C’est une méthode extrême, mais je suis absolument certaine que, dans la situation où je me trouve, c’est la seule solution.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>La direction de la colonie pénitentiaire refuse de m’entendre. Mais je ne renoncerai pas à mes revendications, je n’ai pas l’intention de rester sans rien dire et de regarder sans protester les gens tomber d’épuisement, réduits en esclavage par les conditions de vie qui règnent dans la colonie. J’exige le respect des droits de l’homme dans la colonie, j’exige le respect des lois dans ce camp de Mordovie. J’exige que nous soyons traitées comme des êtres humains et non comme des esclaves.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>Voici un an que je suis arrivée à la colonie pénitentiaire n° 14 du village de Parts. Les détenues le disent bien — «<i>Qui n’a pas connu les camps de Mordovie n’a pas connu les camps tout court</i>». Les camps de Mordovie, j’en avais entendu parler alors que j’étais encore en préventive à la prison n° 6 de Moscou. C’est là que le règlement est le plus sévère, les journées de travail les plus longues, et l’arbitraire le plus criant. Quand vous partez pour la Mordovie, on vous fait des adieux comme si vous partiez au supplice. Jusqu’au dernier moment chacune espère — «<i>Peut-être, quand même, ce ne sera pas la Mordovie? Peut-être que j’y échapperai?</i>» Je n’y ai pas échappé, et à l’automne 2012 je suis arrivée dans cette région de camps sur les bords du fleuve Parts.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>La Mordovie m’a accueillie par la voix du vice-directeur en chef du camp, le lieutenant-colonel Kouprianov, qui exerce de fait le commandement dans la colonie n° 14: «<i>Et sachez que sur le plan politique, je suis un staliniste</i>». L’autre chef (ils dirigent la colonie en tandem), le colonel Koulaguine, m’a convoquée le premier jour pour un entretien dont le but était de me contraindre à reconnaître ma faute. « <i>Il vous est arrivé un malheur. C’est vrai, non? On vous a donné deux ans de camp. D’habitude, quand il leur arrive un malheur, les gens changent leur point de vue sur la vie. Vous devez vous reconnaître coupable pour avoir droit à une libération anticipée. Si vous ne le faites pas, il n’y aura pas de remise de peine.</i>»</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>J’ai tout de suite déclaré au directeur que je n’avais l’intention d’effectuer que les huit heures de travail quotidiennes prévues par le Code du Travail. «<i>Le Code du Travail, c’est une chose, mais l’essentiel, c’est de remplir les quotas de production. Si vous ne les remplissez pas, vous faites des heures supplémentaires. Et puis, on en a maté des plus coriaces que vous, ici!</i>», m’a répondu le colonel Koulaguine.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>Toute ma brigade à l’atelier de couture travaille entre seize et dix-sept heures par jour. De sept heures trente à minuit et demie. Dans le meilleur des cas, il reste quatre heures de sommeil. Nous avons un jour de congé toutes les six semaines. Presque tous les dimanches sont travaillés. Les détenues déposent des demandes de dérogation pour travailler les jours fériés, «<i>de leur propre initiative</i>», selon la formule employée. En réalité, bien entendu, c’est tout sauf leur initiative, ces demandes de dérogation sont écrites sur l’ordre de la direction du camp et sous la pression des détenues qui relaient la volonté de l’administration.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>Personne n’ose désobéir (refuser d’écrire une demande d’autorisation à travailler le dimanche, ne pas travailler jusqu’à une heure du matin). Une femme de cinquante ans avait demandé à rejoindre les bâtiments d’habitation à vingt heures au lieu de minuit, pour pouvoir se coucher à vingt-deux heures et dormir huit heures ne serait-ce qu’une fois par semaine. Elle se sentait mal, elle avait des problèmes de tension. En réponse, il y a eu une réunion de notre unité où on lui a fait la leçon, on l’a insultée et humiliée, on l’a traitée de parasite. «<i>Tu crois que tu es la seule à avoir sommeil? Il faudrait t’atteler à une charrue, grosse jument!</i>» Quand le médecin dispense de travail une des femmes de la brigade, là encore, les autres lui tombent dessus: «<i>Moi je suis bien allée coudre avec quarante de fièvre! Tu y as pensé, à qui allait devoir faire le travail à ta place?</i>»</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>À mon arrivée, j’ai été accueillie dans ma brigade par une détenue qui touchait à la fin de ses neuf ans de camp. Elle m’a dit: «<i>Les matons ne vont pas oser te mettre la pression. C’est les taulardes qui le feront pour eux.</i>» Et en effet, le règlement est pensé de telle façon que ce sont les détenues qui occupent les fonctions de chef d’équipe ou de responsable d’unité qui sont chargées de briser la volonté des filles, de les terroriser et de les transformer en esclaves muettes.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>Pour maintenir la discipline et l’obéissance dans le camp, il existe tout un système de punitions informelles. «<i>Rester dans la cour jusqu’à l’extinction des feux</i>»: interdiction d’entrer dans les baraquements, que ce soit l’automne ou même l’hiver — dans l’unité n° 2, celle des handicapées et des retraitées, il y a une femme à qui on a amputé un pied et tous les doigts des mains: on l’avait forcée à passer une journée entière dans la cour — ses pieds et ses mains avaient gelé; «<i>Barrer l’accès à l’hygiène</i>»: interdiction de se laver et d’aller aux toilettes; «<i>Barrer l’accès au cellier et à la cafétéria</i>»: interdiction de manger sa propre nourriture, de boire des boissons chaudes. C’est à rire et à pleurer quand une femme de quarante ans déclare: «<i>Allons bon, on est punies aujourd’hui! Est-ce qu’ils vont nous punir demain aussi, je me demande?</i>» Elle ne peut pas sortir de l’atelier pour faire pipi, elle ne peut pas prendre un bonbon dans son sac. Interdit.</div>
<div style="text-align: center;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>À plusieurs reprises, le camp a touché des subsides pour changer complètement les équipements. Mais la direction s’est contentée de faire repeindre les machines à coudre par les détenues elles-mêmes. Nous devons coudre sur des machines obsolètes et délabrées. D’après le Code du Travail, si l’état des équipements ne correspond pas aux normes industrielles contemporaines, les quotas de production doivent être revus à la baisse par rapport aux quotas-type du secteur. Mais les quotas de production ne font qu’augmenter. Par à-coup et sans prévenir.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span class="Apple-tab-span" style="white-space: pre;"> </span>«<i>Si on leur montre qu’on peut faire cent uniformes, ils vont placer la barre à cent vingt!</i>», disent les ouvrières expérimentées. Or, on ne peut pas ne pas les faire — sinon toute l’équipe sera punie, toute la brigade. Elle sera obligée, par exemple, de rester plusieurs heures debout sur la place d’armes. Avec interdiction d’aller aux toilettes. Avec interdiction de boire une gorgée d’eau.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>Voici deux semaines, le quota de production pour toutes les brigades de la colonie pénitentiaire a été arbitrairement augmenté de cinquante unités. Si avant la norme était de cent uniformes par jour, maintenant elle est de cent cinquante. D’après le Code du Travail, les travailleurs doivent être prévenus des changements de quotas de production au moins deux mois à l’avance. Dans la colonie n° 14, nous nous réveillons un beau jour avec un nouveau quota, parce que c’est venu à l’idée de nos «<i>marchands de sueur</i>», c’est comme ça que les détenues ont surnommé la colonie. L’effectif de la brigade baisse (certaines sont libérées ou changent de camp), mais les quotas de production augmentent, et celles qui restent travaillent de plus en plus dur.</div>
<div style="text-align: justify;">
<div style="text-align: center;">
<br /></div>
</div>
<div style="text-align: justify;">
<span class="Apple-tab-span" style="white-space: pre;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>Les mécaniciens nous disent qu’ils n’ont pas les pièces détachées nécessaires aux réparations, et qu’il ne faut pas compter dessus : «<i>Quand est-ce qu’on va les recevoir? Non mais tu te crois où pour poser des questions pareilles? C’est la Russie, ici, non?!</i>»</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span class="Apple-tab-span" style="white-space: pre;"> </span>En quelques mois à la fabrique de la colonie, j’ai pratiquement appris le métier de mécanicien. Par force et sur le tas. Je me jetais sur les machines le tournevis à la main, dans une tentative désespérée de les réparer. Tes mains ont beau être couvertes de piqûres d’aiguilles, d’égratignures, il y a du sang partout sur la table, mais tu essaies quand même de coudre. Parce que tu es un rouage de cette chaîne de production, et, ta part de travail, il est indispensable que tu la fasses aussi vite que les couturières expérimentées. Et cette fichue machine qui tombe tout le temps en panne!</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>Comme tu es la nouvelle, et vu le manque d’équipements de qualité au camp, c’est toi, bien sûr, qui te retrouves avec le pire moteur de la chaîne. Et voilà que le moteur tombe de nouveau en panne, tu te précipites à la recherche du mécanicien (qui est introuvable), les autres te crient dessus, t’accusent de faire capoter le plan, etc. Aucun apprentissage du métier de couturière n’est prévu dans la colonie. On installe la nouvelle à son poste de travail et on lui donne une tâche.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>«<i>Tu ne serais pas Tolokonnikova, ça fait longtemps qu’on t’aurait réglé ton compte</i>» — disent les détenues qui sont en bons termes avec l’administration. Et en effet, les autres prennent des coups. Quand elles sont en retard dans leur travail. Les reins, le visage. Ce sont les détenues elles-mêmes qui frappent, mais pas de passage à tabac dans la colonie qui ne se produise sans l’aval de l’administration. Il y a un an, avant mon arrivée, on a battu à mort une tsigane dans l’unité n° 3 (l’unité n° 3 est l’unité punitive, c’est là que l’administration envoie celles qui doivent subir des passages à tabac quotidiens). Elle est morte à l’infirmerie de la colonie n° 14. Qu’elle soit morte sous les coups, l’administration a réussi à le cacher: ils ont inscrit comme cause du décès une attaque cérébrale.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>Dans une autre unité, les nouvelles couturières, qui n’arrivaient pas à remplir la norme, ont été forcées de se déshabiller et de travailler nues. Personne n’ose porter plainte auprès de l’administration, parce que l’administration te répondra par un sourire et te renverra dans ton unité, où, pour avoir «<i>mouchardé</i>», tu seras rouée de coups sur ordre de cette même administration. Ce bizutage contrôlé est un moyen pratique pour la direction de la colonie de soumettre complètement les détenues à un régime de non-droit.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span class="Apple-tab-span" style="white-space: pre;"> </span>Il règne dans l’atelier une atmosphère de nervosité toujours lourde de menaces. Les filles, en manque constant de sommeil et perpétuellement stressées par cette course inhumaine à la production, sont prêtes à exploser, à hurler, à se battre sous le moindre prétexte. Il n’y a pas longtemps, une jeune fille a reçu un coup de ciseaux à la tempe parce qu’elle n’avait pas fait passer un pantalon assez vite. Une autre fois, une détenue a tenté de s’ouvrir le ventre avec une scie. On a réussi à l’en empêcher.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>Celles qui étaient à la colonie n° 14 en 2010, l’année des incendies (de forêt) et de la fumée, racontent qu’alors que l’incendie se rapprochait des murs d’enceinte les détenues continuaient de se rendre au travail et de remplir leur norme. On ne voyait pas à deux mètres à cause de la fumée, mais les filles avaient attaché des foulards humides autour de leur visage et continuaient de coudre. L’état d’urgence faisait qu’on ne les conduisait plus au réfectoire. Certaines femmes m’ont raconté qu’elles avaient atrocement faim, et qu’elles tenaient un journal pour noter toute l’horreur de ces journées. Une fois les incendies éteints, les services de sécurité ont fouillé les baraquements de fond en comble et confisqué tous ces journaux, afin que rien ne transparaisse à l’extérieur.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>Les conditions sanitaires à la colonie sont pensées pour que le détenu se sente comme un animal sale et impuissant. Et bien qu’il y ait des sanitaires dans chaque unité, l’administration a imaginé, dans un but punitif et pédagogique, un «<i>local sanitaire commun</i>»: c’est à dire une pièce prévue pour cinq personnes, où toute la colonie (huit cents personnes) doit venir se laver. Nous n’avons pas le droit de nous laver dans les sanitaires de nos baraquements, ce serait trop pratique!</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span class="Apple-tab-span" style="white-space: pre;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>Dans le «<i>local sanitaire commun</i>», c’est la bousculade permanente, et les filles, armées de bassines, essaient de laver au plus vite «leur nounou» (c’est comme ça qu’on dit en Mordovie), quitte à se grimper les unes sur les autres. Nous avons le droit de nous laver les cheveux une fois par semaine. Mais même cette «<i>journée de bain</i>» est parfois annulée. La raison — une pompe qui a lâché, une canalisation qui est bouchée. Il est arrivé qu’une unité ne puisse pas se laver pendant deux ou trois semaines.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span class="Apple-tab-span" style="white-space: pre;"> </span>Quand un tuyau est bouché, l’urine reflue depuis les sanitaires vers les dortoirs et les excréments remontent par grappes. Nous avons appris à déboucher nous-mêmes les canalisations, mais la réparation ne tient pas longtemps, elles se bouchent encore et encore. Il n’y a pas de furet pour déboucher les tuyaux dans la colonie. La lessive a lieu une fois par semaine. La buanderie, c’est une petite pièce avec trois robinets d’où coule un mince filet d’eau froide.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>Toujours dans un but éducatif, il faut croire, on ne donne aux détenues que du pain dur, du lait généreusement coupé d’eau, des céréales toujours rances et des pommes de terres pourries. Cet été la colonie a reçu une grosse livraison de tubercules noirâtres et gluants. Qu’on nous a fait manger.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>On parlerait sans fin des conditions de vie et de travail dans la colonie n° 14. Mais le reproche principal que je fais à cette colonie est d’un autre ordre. C’est que l’administration emploie tout son possible pour empêcher que la moindre plainte, la moindre déclaration concernant la colonie n° 14 ne sorte de ses murs. Le plus grave, c’est que la direction nous contraint au silence. Sans reculer devant les moyens les plus bas et les plus vicieux. De ce problème découlent tous les autres — les quotas de travail excessifs, la journée de travail de seize heures etc.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>La direction se sent invulnérable et n’hésite pas à opprimer toujours plus les détenues. Je n’arrivais pas à comprendre les raisons pour lesquelles tout le monde se taisait avant d’avoir à affronter moi-même la montagne d’obstacles qui se dresse en face du détenu qui a décidé d’agir. Les plaintes ne peuvent pas sortir du territoire de la colonie. La seule chance, c’est de faire passer sa plainte par son avocat ou sa famille. L’administration, mesquine et rancunière, emploie tous les moyens de pression pour que le détenu comprenne que sa plainte n’arrangera rien pour personne. Elle ne fera que rendre les choses pires. La direction a recours aux punitions collectives: tu te plains qu’il n’y ait pas d’eau chaude? On coupe l’eau complètement.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>En mai 2013, mon avocat Dmitri Dinze a déposé devant le Parquet Général une plainte visant les conditions de vie dans la colonie n° 14. Le lieutenant-colonel Kouprianov, directeur-adjoint du camp, a aussitôt instauré des conditions intenables dans le camp: fouilles et perquisitions à répétition, rapports sur toutes les personnes en relation avec moi, confiscation des vêtements chauds et menace de confisquer aussi les chaussures chaudes. Au travail, ils se sont vengés en donnant des tâches de couture particulièrement complexes, en augmentant les quotas de production et en créant artificiellement des défauts. La chef de la brigade voisine de la mienne, qui est le bras droit du lieutenant-colonel Kouprianov, incitait ouvertement les détenues à lacérer la production dont je suis responsable à l’atelier, afin qu’on m’envoie au cachot pour «<i>dégradation de biens publics</i>». La même femme a ordonné à des détenues de son unité de me provoquer à une rixe.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>On peut tout supporter. Tout ce qui ne concerne que soi-même. Mais la méthode de responsabilité collective en vigueur dans la colonie a des conséquences plus graves. Ce que tu fais, c’est toute ton unité, tout le camp qui en souffre. Et le plus pervers — souffrent toutes celles qui te sont devenues chères. Une de mes amies a été privée de sa libération anticipée, libération qu’elle essayait depuis sept ans de mériter par son travail, remplissant et dépassant même son quota de production: elle a reçu un blâme parce que, elle et moi, nous avons pris ensemble un verre de thé. Le jour même, le lieutenant-colonel Kouprianov l’a transférée dans une autre unité.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>Une autre de mes connaissances, une femme très cultivée, a été envoyée dans l’unité punitive, où elle est battue tous les jours, parce qu’elle a lu et commenté avec moi le document intitulé «<i>Règlement intérieur des centres pénitentiaires</i>». Des rapports ont été constitués sur toutes les personnes qui sont en contact avec moi. Ce qui me faisait mal, c’était de voir persécuter des femmes qui me sont proches. Le lieutenant-colonel Kouprianov m’a dit alors en ricanant — «<i>Il ne doit plus te rester beaucoup d’amies!</i>». Et il a expliqué que, tout cela, c’était à cause de la plainte de mon avocat.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>À présent je comprends que j’aurais déjà dû déclarer ma grève de la faim dès le mois de mai, dans la situation d’alors. Mais devant la pression terrible que l’administration mettait sur les autres détenues, j’avais suspendu mes plaintes contre la colonie.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>Il y a trois semaines, le 30 août, j’ai adressé au lieutenant-colonel Kouprianov une requête pour qu’il accorde à toutes les détenues de ma brigade huit heures de sommeil. Il s’agissait de réduire la journée de travail de seize à douze heures. «<i>Très bien, à partir de lundi la brigade ne va travailler que huit heures</i>», a-t-il répondu. Je sais que c’est un piège parce qu’en huit heures, il est physiquement impossible de remplir notre quota de couture. Et du coup la brigade n’y arrivera pas et sera punie.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>«<i>Et si elles apprennent que tout ça, c’est de ta faute,</i> — a continué le lieutenant-colonel — <i>plus jamais tu ne te sentiras mal, parce que, dans l’autre monde, on se sent toujours bien.</i>» Le lieutenant-colonel a fait une pause et a ajouté: «<i>Dernière chose: ne demande jamais pour les autres. Demande seulement pour toi. Ca fait des années que je travaille dans les camps, et tous ceux qui viennent me demander quelque chose pour quelqu’un d’autre — ils vont directement au cachot en sortant de mon bureau. Toi, tu seras la première à qui ça n’arrivera pas.</i>»</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>Les semaines qui ont suivi, dans l’unité et à l’atelier, les conditions ont été insupportables pour moi. Les détenues proches de l’administration ont commencé à inciter les autres à la vengeance: «<i>Voilà, vous êtes punies pour une semaine: interdiction de prendre le thé et de manger en dehors du réfectoire, suppression des pauses toilettes et cigarettes. À partir de maintenant, vous serez punies tout le temps si vous ne changez pas de comportement envers les nouvelles et Tolokonnikova en particulier — faites leur ce qu’on vous a fait, à vous. On vous a bien cognées, non? On vous a bien cassé la gueule? Eh bien, défoncez-les, elles aussi. Pour ça, personne ne vous dira rien.</i>»</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>Plus d’une fois on a essayé de provoquer des conflits et des rixes avec moi, mais quel sens ça aurait d’entrer en conflit avec des femmes qui ne sont pas libres de leurs actes et agissent sur ordre de l’administration?</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>Les détenues de Mordovie ont peur de leur ombre. Elles sont terrorisées. Et si hier encore elles étaient bien disposées à mon égard et imploraient «Fais quelque chose pour les seize heures de travail!», après la pression que la direction a fait peser sur moi, elles ont peur même de m’adresser la parole.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span>J’ai proposé à l’administration d’apaiser ce conflit, de mettre fin à la tension artificiellement entretenue contre moi par les détenues soumises à l’administration, ainsi qu’à l’esclavage de la colonie toute entière en réduisant la journée de travail, et en ramenant le quota de production à la norme prévue par la loi. Mais en réponse la pression est encore montée d’un cran. C’est pourquoi, à partir de ce lundi 23 septembre, j’entame une grève de la faim et je refuse de participer au travail d’esclave dans le camp, tant que la direction ne respectera pas les lois et ne traitera pas les détenues non plus comme du bétail offert à tous les arbitraires pour les besoins de la production textile, mais comme des personnes humaines.<i> — Nadejda Tolokonnikova, Pussy Riot. Traduction du russe inédite, par Marie N. Pane.</i></div>
</div>
<div style="text-align: justify;">
<i><br /></i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: georgia; font-size: xx-small; line-height: 22px;"> </span><span style="font-size: x-small;">Photographie: Nadedja Tolokonnikova dans le camp de Mordovie, il y a quelques mois.</span></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-23798084924395707112013-08-29T15:42:00.000+02:002013-11-04T23:59:56.545+02:00Lettre 26: été 2013<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiSsZoj0rxLj8YI24QkOCRacOTohn2G2Au1wYJ-5flpcDcd8vwnnozP2g7ReR7q4pHaBikG5I3LKd-GKsFJMHpe-LzS6_TNWAvt4fkQUAc_y_rBKYK-eJqpqZPVOkttz_2xMbur0yUMAVkP/s1600/05.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><br class="Apple-interchange-newline" /><img border="0" height="300" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiSsZoj0rxLj8YI24QkOCRacOTohn2G2Au1wYJ-5flpcDcd8vwnnozP2g7ReR7q4pHaBikG5I3LKd-GKsFJMHpe-LzS6_TNWAvt4fkQUAc_y_rBKYK-eJqpqZPVOkttz_2xMbur0yUMAVkP/s400/05.jpg" width="400" /></a></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<span style="font-family: Georgia;"></span></div>
<div style="text-align: center;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
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<div style="text-align: center;">
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia;"><br /></span><span style="font-family: Georgia;"><i> </i>— Parution aux Presses Universitaires de Rennes de notre dernier travail: <b><i><a href="https://sites.google.com/site/pourfrederickwiseman/fw-chroniques-americaines-pur-2013" target="_blank"><span style="color: blue;">Frederick Wiseman / Chroniques américaines</span></a></i></b>, dans l'importante collection <i>Le Spectaculaire / Cinéma</i>. <a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fwww.facebook.com%2Fpages%2FFrederick-Wiseman-Chroniques-am%25C3%25A9ricaines-un-livre-de-Maurice-Darmon%2F355955454498187&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzdJ3hCtCQNuFd7SGZutGYJSHquNMQ" target="_blank"><span style="color: blue;"><b>Une page Facebook qui suivra l'actualité de cette parution</b></span></a><span style="color: black;"> donne tous compléments (filmographie, comment voir les films, essais d'autres auteurs, entretiens, etc.) Nous vous invitons à mentionner votre passage en aimant la page, comme dit Facebook.</span></span><span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;"><i> </i>— Ensuite, nous continuons <b>nos films</b>, tous archivés sur Youtube dans </span><a href="http://www.youtube.com/user/The202productions/videos?view=0" target="_blank"><span style="color: blue;"><b>Notre cinéma © 202 productions</b></span></a><span style="color: black;">. Ici une cinquième sélection pour <i>Ralentir travaux</i> visible en plein écran, principalement centrée sur l'orgue:</span></span><br />
<br />
<div style="margin-left: 40px;">
<span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;"><b>• 20.</b></span></span><b style="font-family: Georgia;"> Notes sur le cinématographe III: <a href="http://maurice-darmon.blogspot.fr/2013/05/film-20-notes-sur-le-cinematographe-iii.html" target="_blank"><span style="color: blue;">Des images et des sons: 13 août 2012, sept heures</span></a> (10').</b><span style="font-family: Georgia;"><br /><b>• 21. <span style="color: blue;"><a href="http://maurice-darmon.blogspot.fr/2013/06/film-21-nouvel-orgue-dans-le-mauvais.html" target="_blank">Nouvel orgue dans le mauvais temps, qu'ils avaient donc du courage</a></span> (38').</b></span><span style="font-family: Georgia;"><br /><b>• 22.</b></span><span style="font-family: Georgia;"><b><span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;"> </span><a href="http://maurice-darmon.blogspot.fr/2013/06/film-22-bonus-30-pour-quentin.html" target="_blank"><span style="color: blue;">Trente secondes pour Quentin Blumenroeder et Jean-Marie -Cousset</span></a><span style="color: black;"> (34").</span></span></b><br /><b>• 23. </b></span><b style="font-family: Georgia;"><span style="color: blue;"><a href="http://maurice-darmon.blogspot.fr/2013/06/film-23-gustav-leonhardt-dom-bedos.html" target="_blank">L'orgue Dom Bedos à Sainte-Croix (Gustav Leonhardt)</a></span> (2'33). </b><br />
<span style="font-family: Georgia;"><b>• 24. <a href="http://maurice-darmon.blogspot.fr/2013/08/film-24-stabat-mater.html" target="_blank"><span style="color: blue;">Stabat Mater</span></a> (10'26). </b></span></div>
</div>
</div>
</div>
</div>
</div>
<b></b><br />
<div style="text-align: center;">
<span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;"><b>Dossiers thématiques modifiés ce trimestre</b></span></span></div>
<span style="font-family: Georgia;"><br /></span><span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;"><b>Notre delta fertile:</b></span></span><br />
<div style="margin-left: 40px; text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia;"><b><span style="color: black;">1.<a href="http://www.google.com/url?q=http%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Flibratextu%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzfiVMHEeDmO5WIeOp_64oGiZFEpXQ" target="_blank"><span style="color: blue;"> </span></a></span><a href="http://www.google.com/url?q=http%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Flibratextu%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzfiVMHEeDmO5WIeOp_64oGiZFEpXQ" target="_blank"><span style="color: blue;">Liber@ Te</span></a></b><span style="color: black;">: 1. Smaïn Laacher: </span><a href="https://sites.google.com/site/libratextu/8-des-pays-plus-libres/2013-04-feminisme-radical-en-terre-d-islam" target="_blank"><span style="color: blue;">Nécessaire féminisme radical dans les pays arabes</span></a><span style="color: black;">. — 2. Jean-Pierre Le Goff: </span><a href="https://sites.google.com/site/libratextu/libertes-pour-le-present/2013-05-jean-pierre-le-goff-la-gauche-se-trompe" target="_blank"><span style="color: blue;">La gauche se trompe</span></a><span style="color: black;">. — 3. Abdelwahab Meddeb: </span><a href="https://sites.google.com/site/libratextu/8-des-pays-plus-libres/abdelwahab-meddeb-solidarite-avec-amina" target="_blank"><span style="color: blue;">Solidarité avec Amina</span></a><span style="color: black;">. — 4. L'exception culturelle, les mots et les actes, un article de François Margolin: </span><a href="http://maurice-darmon.blogspot.fr/2013/07/exception-culturelle-les-mots-et-les.html" target="_blank"><span style="color: blue;">La convention collective qui va tuer les films d'auteur</span></a>. — 5. <a href="https://sites.google.com/site/libratextu/8-des-pays-plus-libres/2013-08-des-jours-d-epaules-nues" target="_blank"><span style="color: blue;">Des jours d'épaules nues</span></a>. </span><br />
<span style="font-family: Georgia,"Times New Roman",serif;"><span style="font-family: Georgia,"Times New Roman",serif;"><span style="color: black;"><b>3.<a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fjudaiecas%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzc29LBEurPaAbMDHxP3XhCMhuSIAQ" target="_blank"> </a><a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fjudaiecas%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzc29LBEurPaAbMDHxP3XhCMhuSIAQ" target="_blank"><span style="color: blue;">Judaïca</span></a>:</b></span> 1. <a href="https://sites.google.com/site/judaiecas/2013-05-delphine-horvilleur-en-tenue-d-eve" target="_blank"><span style="color: blue;">Delphine Horviller: En tenue d'Ève</span></a>.</span></span><br />
<span style="font-family: Georgia,"Times New Roman",serif;"><span style="font-family: Georgia,"Times New Roman",serif;"><br /></span></span></div>
<span style="font-family: Georgia;"><b><span style="color: black;">Notre cinéma:</span></b></span><br />
<div style="margin-left: 40px; text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia;"><b><span style="color: black;">6. </span><a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Flestrainsdelumiere%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzeIjcRHQKkPCxn3ZpbMR8YHlXwbNQ" target="_blank"><span style="color: blue;">Les Trains de Lumière</span></a></b><span style="color: black;">, site général: 1. </span><a href="https://sites.google.com/site/lestrainsdelumiere/lifshitz-sebastien" target="_blank"><span style="color: blue;">Sébastien Lifshitz: Bambi (2013)</span></a> — 2. <a href="https://sites.google.com/site/lestrainsdelumiere/arnaud-des-pallieres" target="_blank"><span style="color: blue;">Arnaud des Pallières: </span></a><i><a href="https://sites.google.com/site/lestrainsdelumiere/arnaud-des-pallieres" target="_blank"><span style="color: blue;">Michael Kohlhaas</span></a> </i>(2013). </span><br />
<span style="font-family: Georgia;"><b><span style="color: black;">11. </span><span style="color: blue;"><a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fstraubethuillet%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzca6WFLhO80l4ZV_JOsKmI6dCgOLg" target="_blank">Pour Jean-Marie Straub et Danièle Huillet</a></span>:</b> 1. <span style="color: blue;"><a href="https://sites.google.com/site/straubethuillet/3-nos-notes-critiques/1987-le-bachfilm" target="_blank"><span style="color: blue;">Le Bachfilm</span></a> </span>(Chronique d'Anna-Magdalena Bach, 1968).</span><br />
<span style="font-family: Georgia;"><b><span style="color: black;">12.</span> </b><b><a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fpourfrederickwiseman%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEze4OkO__zOVqPoazi7aIcL0xiHVrA" target="_blank"><span style="color: blue;">Pour Frederick Wiseman</span></a></b><b><span style="color: black;">:</span></b> 1. Maurice Darmon: <a href="https://sites.google.com/site/pourfrederickwiseman/fw-chroniques-americaines-pur-2013" target="_blank"><span style="color: blue;">Frederick Wiseman / Chroniques américaines</span></a>, PUR, 2013.<br /><b>13. </b><a href="http://www.youtube.com/user/The202productions/videos?view=0" target="_blank"><span style="color: blue;"><b>Notre cinéma © 202 productions</b></span></a><span style="color: black;">. Tous nos films sur un site dédié.</span></span></div>
<span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;"><br /><b>14. </b></span><b><a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fpenserparimages%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzdY2LrMNW4ZUi3JlWRIcTjikQdAyA" target="_blank"><span style="color: blue;">Penser par images et par sons</span></a>:</b></span><br />
<div style="margin-left: 40px; text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia;">• <a href="https://sites.google.com/site/penserparimages/photographie/maurice-darmon" target="_blank"><span style="color: blue;">Table complète des diaporamas</span></a>.<br /><span style="color: black;">• </span><a href="https://sites.google.com/site/penserparimages/arts-graphiques/eveline-lavenu" target="_blank"><span style="color: blue;">Éveline Lavenu</span></a><span style="color: black;"> complète régulièrement ses albums d'acryliques et gouaches.</span></span></div>
<span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;"><br /></span><b><span style="color: black;">15. </span><a href="http://sites.google.com/site/reuniondesgouts/" target="_blank"><span style="color: blue;">Les goûts réunis</span></a></b><span style="color: black;">: Nos recettes de cuisine.</span><br /><br /><b><span style="color: black;">16. </span><a href="http://sites.google.com/site/editsetinedits/" target="_blank"><span style="color: blue;">Édits et Inédits</span></a><span style="color: black;">:</span></b></span><br />
<div style="margin-left: 40px; text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;">• Plusieurs textes souvent assez longs, publiés ou non, qu'il convient d'imprimer selon les envies, dont on retrouvera<a href="http://www.google.com/url?q=http%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Feditsetinedits%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzdMPaOemElnrPDRIDHp1fDV73RMmg" target="_blank"><span style="color: blue;"> </span></a></span><a href="http://www.google.com/url?q=http%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Feditsetinedits%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzdMPaOemElnrPDRIDHp1fDV73RMmg" target="_blank"><span style="color: blue;">la liste en accueil</span></a>.</span><br />
<span style="font-family: Georgia,"Times New Roman",serif;">• Une section de notre site est consacrée à <a href="https://sites.google.com/site/editsetinedits/une-revue-le-cheval-de-troie" target="_blank"><span style="color: blue;">notre revue Le cheval de Troie</span></a>, comportant une présentation, les sommaires intégraux, quelques articles disponibles en lien avec nos actuels intérêts, et des notes de lectures sur quelques livres.</span><br />
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia;"><b>17. <a href="https://sites.google.com/site/letheatreetapres/" style="color: blue;" target="_blank">Le Théâtre et après. C'est-à-dire à quoi ça sert? Mais aussi après le théâtre, il y aura quoi?</a></b></span></div>
<div style="margin-left: 40px; text-align: justify;">
<a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fstraubethuillet%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzca6WFLhO80l4ZV_JOsKmI6dCgOLg"></a></div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia;"><b>Dossiers complets: <a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fpourmaximilienvox%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEze3Uc7ICGQ6SaO3pTX4DKulgXzviw" target="_blank"><span style="color: blue;">Pour Maximilien Vox</span></a></b> — <a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fpourbrunodumont%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzdWmqwVF49__J-21_fnPuWXxfyTdA" target="_blank"><span style="color: blue;"><b>Pour Bruno Dumont</b></span></a> — <a href="http://www.google.com/url?q=https%3A%2F%2Fsites.google.com%2Fsite%2Fdossierraphaeelnadjari%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzfR2eqIIUrZi2ln8cK3IkIrEkwEXw" target="_blank"><span style="color: blue;"><b>Pour Raphaël Nadjari</b></span></a> — <a href="https://sites.google.com/site/libratextu/8-ralentir-travaux" target="_blank"><span style="color: blue;"><b>Pour une petite histoire de Ralentir travaux</b></span></a>.</span></div>
<br />
<span style="font-family: Georgia; font-size: xx-small;"><span style="color: black;"><i> </i>© Photographie: Maurice Darmon: <span style="font-size: xx-small;"><span style="font-size: xx-small;"><a href="http://picasaweb.google.fr/maurice.darmon/Safari/photo#s5038494957991891202" target="_blank"><span style="color: blue;">Safari</span></a>, 2005.</span></span></span></span><br />
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<span style="font-family: Georgia; font-size: xx-small;"><br /></span></div>
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<b>En librairie</b></div>
<span style="font-family: Georgia;"></span><br />
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<span style="font-family: Georgia;"><b><br /></b></span></div>
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<div class="separator" style="clear: both;">
<img border="0" height="134" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiSvozzIum9_6VLZ7WMps0MzS5SwFw9xCS1Oe1L-0ao6W5GbaDWVFta9x6SUeasuz_Q2h8mjnQ3rq60U4B8fzOHXP8Boh4mV054A_e9mZOt1G7wEJaElDhlgnAJ3No0hyJLBWnNaeSRwrFK/s200/9782753522084.jpg" width="103" /> <b style="font-family: Georgia;"><span style="font-family: Georgia;"><span style="font-family: Georgia;"><span style="color: black;"><a href="http://www.google.com/url?q=http%3A%2F%2Fwww.letempsquilfait.com%2FPages%2FPages%2520livres%2FPage%2520nouv.553.html&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzdVORmwrdbUr3wwNbcCtIc6Ejieng"><img alt="" border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgrscrjM7aDegGUaMxzkpp-KRvPouYkFh_OzQhl54dqTbmckzGbMxei-CpwMOg41VSUmYmUL2Wa6zQgf74MV4p6C8odOXfawUTgvZEDGauiDtHCLSSgCmU0RTJeNMvQ6rptQBTJygHl_qgI/s400/Godard+%2528C%2529.jpg" style="height: 134px; width: 103px;" /> </a></span><span style="color: black;"><a href="http://www.google.com/url?q=http%3A%2F%2Fwww.letempsquilfait.com%2FPages%2FPages%2520livres%2FPage%2520nouv.552.html&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzf3nX0dL3c_5k8ZMDvYB3HVOXvkpQ"><img alt="" border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEik33edNlXsIAL0niotKSipL9bi5jf21VdKh8Y0JqLPsY2wClpsi-0c33Kko_Efy8oaH5JrWR_VCY6tXZAx13VoQTdLWu3GHHvHeTtDs0UwuMfPa19kuNu8891ThtlTvLACF3z_UtXlttk2/s400/Cassavetes+%2528C%2529.jpg" style="height: 134px; width: 103px;" /></a></span></span></span></b></div>
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</div>
<span style="font-family: Georgia;"><b><span style="font-family: Georgia;"></span></b></span><br />
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<br />
<b>Liens vers les éditeurs</b><br />
<b><br /></b><span style="color: blue; font-family: Georgia;"><a href="http://www.google.com/url?q=http%3A%2F%2Fwww.letempsquilfait.com%2FPages%2FPages%2520livres%2FPage%2520nouv.553.html&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzdVORmwrdbUr3wwNbcCtIc6Ejieng">La question juive de Jean-Luc Godard</a></span></div>
<div style="text-align: center;">
<a href="http://www.google.com/url?q=http%3A%2F%2Fwww.letempsquilfait.com%2FPages%2FPages%2520livres%2FPage%2520nouv.552.html&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzf3nX0dL3c_5k8ZMDvYB3HVOXvkpQ"><span style="font-family: Georgia;">Pour John Cassavetes</span></a></div>
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<div>
<a href="http://pur-editions.fr/detail.php?idOuv=3200" target="_blank"><span style="color: blue;">Frederick Wiseman / Chroniques américaines</span></a></div>
<br /></div>
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<span style="font-family: Georgia;"><br /></span></div>
<div style="text-align: center;">
<span style="font-family: Georgia;"><a href="http://www.google.com/url?q=http%3A%2F%2Fmaurice-darmon.blogspot.com%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFrqEzflE3GYDrlAA7yvSYthmFjDTwXg8w">REVENIR À LA PAGE D'ACCUEIL</a></span></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-79174226629301090762013-08-20T18:34:00.000+02:002019-08-24T16:38:09.213+02:00Arnaud des Pallières: Michael Kohlhaas (2013)<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgzC4em6u-rHbVNcjGqg4naEN4nGi4N8otF0omxte6-VLDj1gKwwk-Y87zKWj0wCH_0TCUAaNH3ksZw775V-wxbTauW9SE-o9WTDbtWrX2w3wkTvEsytzD0YWQZSKZttTFUfIrsEVU3sQl-/s1600/michael-kohlhaas.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><img border="0" height="233" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgzC4em6u-rHbVNcjGqg4naEN4nGi4N8otF0omxte6-VLDj1gKwwk-Y87zKWj0wCH_0TCUAaNH3ksZw775V-wxbTauW9SE-o9WTDbtWrX2w3wkTvEsytzD0YWQZSKZttTFUfIrsEVU3sQl-/s400/michael-kohlhaas.jpg" width="400" /></span></a></div>
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<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><br /></span>
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<a href="https://sites.google.com/site/lestrainsdelumiere/arnaud-des-pallieres" target="_blank"><span style="color: blue; font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;">Lecture dans dossier, cliquer ici.</span></a></div>
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<div class="p1" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><i style="color: #222222; font-size: 18px; font-weight: bold; line-height: 24px;"> </i>Arnaud des Pallières n'est pas de ceux qui gigotent la caméra et font du genre avec la narration pour poser au génie cinématographique. Obstinément et en très peu de films, ce quinquagénaire édifie pour nos yeux et nos oreilles une œuvre singulière questionnant de profonde façon le cinéma, qui a bien besoin qu'on l'aide à marcher sur la tête et nous faire enfin lever les yeux. Ensemble ou divisés.</span></div>
<div class="p2" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><br /></span></div>
<div class="p1" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><i style="color: #222222; font-size: 18px; font-weight: bold; line-height: 24px;"> </i>Sans le savoir, beaucoup ont vu son premier film. Étudiant à la FEMIS, il fait venir Gilles Deleuze le 17 mars 1987 pour en tirer une captation: <span class="s1"><i><a href="http://www.arpla.fr/canal20/adnm/?p=3103" target="_blank"><span style="color: blue;">Gilles Deleuze: Qu’est-ce que l’acte de création?</span></a></i> (1988).</span> <i>Drancy Avenir </i>(1996) son premier long métrage pose sa barre: vigilance civile, travail sur les traces de l'histoire et de la mémoire constitutives de nos consciences présentes, que prolonge <i>Adieu</i> (2003), son second long métrage centré sur la condition des immigrés dans notre société avec des complices aussi dérangeants qu'Aurore Clément ou Michael Lonsdale, ombres qu'auront animées les plus grands cinéastes français de ce siècle. Et, à la télévision, beaucoup d'entre nous encore auront vu de lui <span class="s1"><i>Is Dead / Portrait Incomplet de Gertrude Stein </i>(1999), et <i><a href="http://www.youtube.com/watch?v=76U5DTEwltk" target="_blank"><span style="color: blue;">Disneyland, mon vieux pays natal</span></a></i> (2001). </span>À partir d'un roman de John Cheever, <span class="s2"><i>Les Lumières de Bullet Park</i>,</span><i> </i>son troisième long métrage <i>Parc</i> (2009) transpose la chute d'un monde dans l'enfer feutré d'une banlieue résidentielle, ouvrant par là le genre de l'adaptation romanesque. Et aujourd'hui, après <i>Michael Kohlhaas — Der Rebell</i> de Volker Schlöndorff (1969), Arnaud des Pallières livre sa version, <i>Michael Kohlhaas, </i>de la même nouvelle de Heinrich vont Kleist (1808).</span></div>
<div class="p4" style="text-align: justify;">
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<div class="p3" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><i style="color: #222222; font-size: 18px; font-weight: bold; line-height: 24px;"> </i>Marchand de chevaux au <span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; line-height: 25px;">XVI</span><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: xx-small;"><sup>e</sup></span> siècle au temps de Marguerite de Navarre, Michael Kohlhaas (<span class="s3">Mads Mikkelsen) </span>aime le travail bien fait: en attestent les montures magnifiques qu'il vend aux connaisseurs de la grande ville, au Gouverneur (Bruno Ganz) par exemple. Et il est si bien enraciné dans les hauteurs du Vercors et des Cévennes huguenotes qu'aucune nouvelle pratique de péage ne peut lui barrer la route. Il pliera deux fois néanmoins, pour perdre ses deux plus beaux chevaux et son fidèle valet, puis son épouse Judith (Delphine Chuillot). Submergé d'un chagrin trop immense, il lève une armée de paysans contre le jeune hobereau, tyrannique et manifestement fou (<span class="s3">Swan Arlaud)</span>. Au point de menacer un ordre plus général, puisque la Princesse <span class="s4">(Roxane Duran) </span>et Martin Luther (Denis Lavant) se dérangeront en personne pour le ramener à la soumission féodale, l'une avec des manières de conscience morale, l'autre par des exhortations fondées sur d'insondables bases religieuses, tous deux concourant d'abord au maintien de leur ordre. Pliant une troisième fois, inéluctablement naïf, Michael rend les armes pour aller vers son jugement, accompagné jusqu'au dernier moment par sa fillette et sœur d'armes Lisbeth (Mélusine Mayance), qui saura certainement faire un jour son bien de son histoire familiale.</span></div>
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<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><br /></span></div>
<div class="p3" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><i style="color: #222222; font-size: 18px; font-weight: bold; line-height: 24px;"> </i>Au lieu d'entonner le refrain de la fidélité apparente au livre, interroger les modifications? En réalité, Michael Kohlhaas fut roué. Arnaud des Pallières préfère évoquer une rapide décapitation, qu'il ne montre pas davantage que la dévoration par les chiens de son valet César (<span class="s3">David Bennent, l'enfant </span>Oskar Matzerath<span class="s3"> dans le<i> Tambour</i> en 1979, encore </span>Volker Schlöndorff<span class="s3">)</span>. Le film tout entier est dans cette économie: superbes chevaux, paysages grandioses alternant avec de très gros plans de visages, de même échelle pour ainsi dire sous l'œil de Jeanne Lapoirie chef-opératrice, batailles vues de loin, préparatifs des assauts plutôt que morts tombant en série. Les images les plus dures demeurent sans doute les violences faites aux chevaux et le corps agonisant puis mort de Judith, sauvagement assassinée hors-champ par les mercenaires de la Princesse. Quant au regard du spectateur, son procès en abîme est porté au début du film par la petite Lisbeth devant les ébats amoureux de ses parents, obéissant en cela à sa propre mère d'ailleurs.</span></div>
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<div class="p3" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><i style="color: #222222; font-size: 18px; font-weight: bold; line-height: 24px;"> </i>Autre décisive intervention du cinéaste. Dans la nouvelle, l'épouse Judith s'appelait Lisbeth. C'est justement le prénom donné à cette fillette, inventée de toutes pièces par Arnaud des Pallières et sa co-scénariste Christelle Berthevas. Douze ans tout au plus, Lisbeth est donc le personnage central du film et son véritable secret, caché par les masques héroïques du maquignon devenu chef de guerre. Dans le même geste créateur, elle est l'indispensable support à l'identification proposé aux adolescents et aux adolescentes pour qui ce film reconnaît ainsi être d'abord conçu et réalisé. Voilà la révolution tranquille d'Arnaud des Pallières: tenir son cinéma à l'opposé des divertissements gratuits et bêtifiants des films prédestinés aux supposés jeunes faussement désignés en classe sociale — elle dure cette comédie —; à l'opposé des dérivés de jeux vidéos et leurs surenchères d'effets spéciaux; au plus loin surtout des complaisants miroirs des films générationnels, mimant et codifiant les façons de marcher, de parler, présentant des caprices privés comme les formes les plus abouties de la libération sociale. Bref, tout ce qui aura permis aux critiques et aux soi-disant auteurs de se congratuler en rond au dernier festival de Cannes autour d'un palmarès imposé par les slogans-écrans du moment: du "printemps arabe" au "mariage pour tous". Et d'ignorer scandaleusement <i>Michael Kohlhaas</i> quand ils ne l'éreintèrent pas avec une déshonorante arrogance<b><span style="color: red;"> (1)</span></b>.</span></div>
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<div class="p3">
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><i style="color: #222222; font-size: 18px; font-weight: bold; line-height: 24px;"> </i>Mais voilà que, contre toute attente, ce film qui brasse et embrasse le temps et la durée prend rendez-vous avec son public, et tant mieux si à présent nos mêmes critiques veulent être de la fête. <i>Michael Kohlhaas </i>d'Arnaud des Pallières convie cette jeunesse et ses parents (autre rare révolution que cette profonde réunion du présent et de la mémoire?), à constater par l'écoute et par le regard que le cinéma peut se tenir sur les hauteurs, incarner de vraies réflexions morales et politiques sur les pouvoirs et les abus d'aujourd'hui, et se donner côte à côte le temps de la vision, de l'audition, de la pensée. Ce programme minimum passe tout entier par les yeux et le jugement de Lisbeth aux côtés de Michael puis face à lui. Après cette mise à mort qui la met d'abord en fureur individuelle contre son père, elle devra bien se mesurer à l'ordre viril du fil de l'épée, demeuré encore invaincu.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
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<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"></span><br />
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<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><span style="color: #222222; font-style: italic; font-weight: bold; line-height: 24px;"> </span><b style="font-style: italic;"><span style="color: red;">1. </span></b><i>Exemple parmi dix, cet extrait qui se passe de tout commentaire, d'un article publié par Maxime Pargaud dans </i>Le Figaro.fr<i> le 24 mai 2013, lors de sa projection au Festival de Cannes sous le titre </i><a href="http://www.lefigaro.fr/festival-de-cannes/2013/05/24/03011-20130524ARTFIG00454-michael-kohlhaas-une-place-dans-game-of-thrones-pas-au-palmares.php" target="_blank"><span style="color: blue;">Michael Kohlhaas une place dans <i>Games of Thrones</i>, pas au palmarès</span></a><i>: «</i>Michael Kohlaas<i> [sic] a été projeté hier soir, il faut bien le reconnaître, dans l'indifférence générale. En tout cas sur Twitter. Relativement peu de messages ont été postés sur le réseau social comparativement aux autres films de la compétition présentés jusqu'alors. Il faut dire que le cinéaste français Arnaud Des Pallières, dernier français en compétition, est un presque inconnu au bataillon de la Croisette. Certains se demandent encore comment s'orthographie son nom de famille.»</i></span></div>
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;">
</span></div>
<div class="p3" style="text-align: justify;">
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<div class="p3" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: "georgia" , "times new roman" , serif;"><span style="color: #222222; line-height: 24px;"> © Photographie: </span>Mads Mikkelsen et Mélusine Mayance dans <span style="color: #222222; line-height: 24px;"><i>Michael Kohlhaas</i> d'Arnaud des Pallières, les Films du Losange, 2013, 125'.</span></span></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-30304112376998529682013-08-09T16:33:00.003+02:002013-08-14T16:25:47.623+02:00Des jours d'épaules nues<div style="text-align: center;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: center;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><iframe allowfullscreen="" frameborder="0" height="315" src="http://www.youtube.com/embed/TNXXV7ej248" width="560"></iframe></span></div>
<div style="text-align: center;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: center;">
<a href="https://sites.google.com/site/libratextu/8-des-pays-plus-libres/2013-08-des-jours-d-epaules-nues" target="_blank"><span style="color: blue; font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Lecture dans dossier cliquer ici.</span></a></div>
<div style="text-align: center;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Histoires individuelles se tressant à la grande Histoire: hasards du calendrier, le même jour deux événements concomitants que rien d'autre ne relie.
</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Ce 1<span style="font-size: xx-small;">er</span> août, Silvio Berlusconi est condamné par la Cour de cassation à quatre ans de prison pour <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Silvio_Berlusconi#Affaire_Mediaset" target="_blank"><span style="color: blue;">l'affaire Mediaset</span></a>, dont trois couverts par une amnistie. Ses soixante-seize ans lui permettent de choisir entre une assignation à résidence et des travaux d'intérêt social, confiance en l'homme qui ne manque pas d'une piquante naïveté. Ainsi celui qui aura durant vingt ans fait et défait toutes les lois à sa convenance, y compris d'auto-amnistie avec la bénédiction renouvelée des électeurs et la complicité ouverte ou implicite de toutes les formations politiques à chacune son tour, est enfin rattrapé par son passé. On ne savait pas? Tout était aveuglant dès le début, dès lors qu'on tient à quelques repères simples, puisqu'un touriste comme moi a vu en quelques jours passés à Rome à Noël 1993 la connivence ouverte de toutes les formations politiques, j'en témoigne dans <a href="https://sites.google.com/site/mesitalies/1-darmon-maurice/textes-sur-sciascia/1994-l-hiver-est-pareil-a-l-absence" target="_blank"><span style="color: blue;">L'hiver est pareil à l'absence</span></a>, paru en France dans <i>Les Temps modernes</i> et un an plus tard en Italie dans le dernier numéro de <i>Nuovi Argomenti</i>, avant sa suppression par Berlusconi lui-même qui venait de prendre ses parts chez Mondadori. Un texte sur la seconde mort de <a href="https://sites.google.com/site/mesitalies/nos-auteurs/leonardo-sciascia" target="_blank"><span style="color: blue;">Leonardo Sciascia</span></a> par la gauche et l'extrême-gauche réunies pour tenter une sordide opération </span><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">autour d'un écrivaillon promu pour la circonstance au rang de génie littéraire — Sebastiano Vassalli et son </span><i style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">Cygne</i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">, bien oubliés aujourd'hui alors que Leonardo Sciascia domine le siècle de la tête et des épaules </span><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">—</span><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">, avant les élections qu'elles perdirent, forcément, pour ouvrir la voie à vingt ans de berlusconisme.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Ce même 1<span style="font-size: xx-small;">er</span> août 2013, pas très loin des côtes italiennes, la lycéenne de dix-huit ans Amina Tyler est enfin mise en liberté, pour vices de forme — en fait pour abandon d'accusations si évidemment mensongères et de procédures si truquées que nul, même sur ordre, ne pouvait plus sans ridicule les soutenir. Elle demeure d'ailleurs toujours inculpée pour avoir «profané» du mot <i>Femen</i> le muret d'un cimetière de Kairouan, ville où devait se tenir un rassemblement salafiste interdit par les autorités. Un parapet sur lequel les jeunes gens s'assoient tous les soirs pour boire des bières et autres alcools sans que les fanatiques qui voulaient lyncher Amina lorsqu'elle grisa ses seins sur Facebook, ne trouvent à y redire. Elle échappe donc à des condamnations pouvant aller jusqu'à dix-huit ans de prison et n'en risque plus que deux pour profanation de sépulture, si quelqu'un peut comprendre ici cet extraordinaire chef d'accusation. Quand les salafistes ont brûlé plus de vingt mausolées des saints populaires et assassiné plus ou moins directement des leaders politiques, leurs crimes n'ont soulevé ni semblable zèle ni pareils émois dans les sphères juridiques et policières, manifestement aux ordres quotidiens de <i>Ennahdha</i>, le parti islamiste au pouvoir de façon désormais illégale en Tunisie.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i style="font-weight: bold;"> </i>B</span>ien sûr, Berlusconi ne fera jamais de prison alors qu'Amina y a déjà été enfermée deux mois préventivement où elle aura d'ailleurs — en passant — trouvé la force et le courage de dénoncer aussitôt les mauvais traitements sur ses compagnes de cellule. Oui, Berlusconi a depuis vingt ans le soutien aveugle de millions de ses concitoyens et Amina est poursuivie dans l'indifférence et même l'hostilité quasi générale des siens, y compris de militants et militantes laïques et démocrates, sans parler des féministes, sur lesquels elle a eu l'illusion de penser qu'elle pouvait compter. Ainsi, dans le <i>Huffington Post / Le Monde</i>, dirigé, comme chacun sait, par la grande journaliste Anne Sinclair femme libre s'il en est et vaillante pourfendeuse des "<i>Femen</i>" — comme si partout les <i>Femen</i> s'équivalaient —, <a href="http://www.blogger.com/:http://www.huffingtonpost.fr/saida-ounissi/femen-tunisie_b_3494129.html" target="_blank"><span style="color: blue;">peut-on lire sous la plume de madame Saida Ounissi</span></a>, chercheuse en politiques sociales à Paris-1 et vice présidente du Forum des jeunes musulmans européens, en date du 25 juin 2013, en un français quelque peu approximatif pour une universitaire de cette autorité:</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<blockquote style="border: none; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px;">
<blockquote style="border: none; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i><br class="Apple-interchange-newline" /> </i></b><i>Enfin, Amina vient rejoindre la longue liste des femmes-chouchous de la presse étrangère, comme Lina Ben Mhani </i>[en fait <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Lina_Ben_Mhenni" target="_blank"><span style="color: blue;">Lina Ben Mhenni</span></a>],<i> Aliaa el Mahdy </i>[en fait <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Aliaa_Magda_Elmahdy" target="_blank"><span style="color: blue;">Aliaa Magda Elmahdy</span></a>]<i> ou</i> <a href="https://sites.google.com/site/libratextu/hommes-et-femmes-libres/ayaan-hirsi-ali" target="_blank"><span style="color: blue;">[Ayaan] <span style="font-style: italic;">Hirsi Ali</span></span></a><i> qui ont toutes été érigées, à un moment donné, comme porte-parole officiel</i> [sic] <i>de l'ensemble des femmes arabes et africaines. Des femmes entendues, et respectées à l'étranger, mais très souvent dédaignées par leurs propres concitoyens. Et cela non pas parce qu'elles dérangent, mais parce qu'elles contribuent à faire vivre les clichés sur les femmes du Sud en niant totalement le rôle essentiel que ces dernières jouent dans leurs sociétés respectives. Et à quel prix?</i></span></blockquote>
</blockquote>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; line-height: 24px;"><span style="color: #222222;"><br /></span></span></span>
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; line-height: 24px;"><span style="color: #222222;"> Madame la vice-présidente aurait pu ajouter d'autres noms sans difficulté: </span><span style="color: blue;"><a href="https://sites.google.com/site/libratextu/hommes-et-femmes-libres/taslima-nasreen" target="_blank"><span style="color: blue;">Taslima Nasreen</span></a> ou </span><a href="https://sites.google.com/site/libratextu/hommes-et-femmes-libres/pinar-selek" target="_blank"><span style="color: blue;">Pinar Selek</span></a><span style="color: #222222;"> par exemple pour nous en tenir ici aux seules femmes, ni arabes ni africaines — incroyable réduction du problème par parenthèse —, mais dans l'univers des "musulmans européens" dont notre chercheuse se fait la porte-parole. </span></span>Malgré ces lâches jalousies de parisiennes chouchoutées confortablement dans leur enseignement supérieur et dans la grande presse internationale, Amina Tyler / Sboui — nettement moins chouchoutée dans son corps et dans son âme —, grandira et luttera. Et, malgré les aveuglements symétriques des deux bords, portera encore l'honneur de tous ses frères et sœurs de combat proches ou fourvoyés, celui de son pays et celui de son père qu'elle aura éduqué et instruit au passage et à qui elle aura même rendu un nom.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i style="font-weight: bold;"> </i>On peut le relire, ce père qui </span>s'indigna d'abord des inconduites de sa fille et, avec la mère et la tante, alla jusqu'à la séquestrer en la traitant publiquement de dérangée mentale. Il a suffi d'un mois pour que cet homme écrive cette lucide et courageuse lettre de soutien, après le graffiti de Kairouan:</span><br />
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<blockquote style="border: none; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px;">
<blockquote style="border: none; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px;">
<i style="color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-weight: bold; line-height: 24px;"> </i><i style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">Ma fille a commis un acte «suicidaire» lorsqu'elle a été à Kairouan, eu égard à la présence des </i><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Ansar_al-Charia_(Tunisie)" style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;" target="_blank"><span style="color: blue;">Ansar al-Charia</span></a><i style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">; et pourtant, elle ne s'est pas montrée le corps nu comme il a été dit, mais elle y a été comme n'importe quelle citoyenne.</i><br />
<div>
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i> </b>[...] <i>Ma fille Amina demeurera toujours la fille que j'aime même si elle devait montrer tout son corps nu; car elle est la victime d'une société qui a échoué. Et moi-même comme père et comme responsable j'ai échoué avec elle, car aujourd'hui notre jeunesse s'enrôle dans le </i>Jihad<i> en Syrie, va mourir en mer, et c'est aussi cette même jeunesse qui part faire ses études à l'étranger pour ne plus revenir. Cela cache les maux d'une société, une société qu'il faut soigner et non pas se venger d'elle, et de ses jeunes, comme le déclare <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Samir_Dilou" target="_blank"><span style="color: blue;">Samir Dilou</span></a> («</i>Amina doit être jugée sévèrement<i>»), alors qu'il est Ministre des Droits de l'Homme. Quant à <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Sihem_Badi" target="_blank"><span style="color: blue;">Sihem Badi</span></a>, Ministre des Affaires de la Femme, elle n'a pas bronché et n'a pris aucune position alors que ma fille a dix-huit ans.</i></span></div>
<div>
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i> </b>[...] <i>Il n'est pas normal qu'on appelle à la traduire devant la justice alors qu'elle est le symbole d'une jeunesse livrée à elle-même depuis la révolution. Et face aux très fortes attaques que subit ma fille de la part des hommes, je me demande où sont les femmes de la Tunisie? Ce pays est celui de la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Kahena" target="_blank"><span style="color: blue;">Kahena</span></a>, de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Aziza_Othmana" target="_blank"><span style="color: blue;">Aziza Othmana</span></a>, <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Radhia_Nasraoui" target="_blank"><span style="color: blue;">Radhia Nasraoui</span></a>, et plus d'une femme; et aussi j'ai essayé de joindre plusieurs fois Saïda el-Akremi [avocate, épouse de Noureddine Bhiri, </i>Ministre de la justice et membre du bureau exécutif du parti islamiste <i>Ennahdha</i>]<i>, sans succès </i>[...]<i> J'espère que ma fille aura un procès équitable.</i></span></div>
</blockquote>
</blockquote>
</div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-weight: bold; line-height: 24px;"> </i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Ou ailleurs, sur <a href="http://www.liberation.fr/monde/2013/06/05/mounir-sboui-pere-et-fier-d-amina_908583" target="_blank"><span style="color: blue;"><i>Libération</i> du 5 juin</span></a>, Mounir Sboui encore: «<i>Elle m’a réconcilié avec moi-même, avec mes valeurs. Je n’étais pas trop impliqué, maintenant je sens qu’il faut être plus actif</i>.» Ce n'est pas seulement l'histoire d'une héroïne, et d'une femme combattante comme la Tunisie en a déjà engendré, ce père s'en souvient aussi précisément à présent. Les deux textes que nous avons publiés par ailleurs au fil de l'affaire — <a href="https://sites.google.com/site/libratextu/8-des-pays-plus-libres/2013-04-feminisme-radical-en-terre-d-islam" target="_blank"><span style="color: blue;">Nécessaire féminisme radical en pays arabes</span></a> </span><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">de Smaïn Laacher (27 avril 2013) et </span><a href="https://sites.google.com/site/libratextu/8-des-pays-plus-libres/abdelwahab-meddeb-solidarite-avec-amina" target="_blank"><span style="color: blue; font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Solidarité avec Amina</span></a><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="color: blue;">,</span> de Abdelwahab Meddeb (20 juin 2013) — soulignent à quel point les actes de la jeune fille auront touché aux points les plus névralgiques de sa société en mouvement. Étonnante d'ailleurs et significative, cette façon de changer de visage à chaque moment de son histoire, comme si justement elle parcourait par là celle de toutes les femmes. C'est une des raisons de notre bref hommage visuel op. 76, <a href="http://www.youtube.com/watch?v=TNXXV7ej248&feature=youtu.be"><i><span style="color: blue;">Anima mia Amina</span></i></a> (1'25), en titre de ces lignes.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b>Il y a des jours comme ça, des jours de relative remise en ordre, des jours couleur d'orange jours de palme jours de feuillages au front jours d'épaules nues. Merci, Amina Tyler / Sboui, vous avez dix-huit ans, vous êtes tunisienne et vous nous montrez aujourd'hui ce qu'est penser vers le haut.</span></div>
</div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-24411537993421238102013-07-20T18:15:00.000+02:002013-07-20T18:23:02.310+02:00Exception culturelle: les mots et les actes<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhSJCGzmHSaZisIOhIF3nFoOEf-zESpYPRapVuwji6j1jfOgbNyAOeBXml3PLW1EfZUKCZm251AHbZtxZiILhIXB_XN3s7I3y7Z5E1XuaBEj6TTz1iKCOlQDNg8h4b3SAtqiLHHfuqhZUm-/s1600/godard+weekend+end+title.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="240" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhSJCGzmHSaZisIOhIF3nFoOEf-zESpYPRapVuwji6j1jfOgbNyAOeBXml3PLW1EfZUKCZm251AHbZtxZiILhIXB_XN3s7I3y7Z5E1XuaBEj6TTz1iKCOlQDNg8h4b3SAtqiLHHfuqhZUm-/s320/godard+weekend+end+title.jpg" width="320" /></a></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<span style="color: blue; font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><a href="https://sites.google.com/site/libratextu/libertes-pour-le-present/2013-07-fin-d-un-cinema" target="_blank">Lecture dans dossier, cliquer ici.</a></span></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">«Des décisions que n'aurait jamais osé prendre un gouvernement de droite. Et c'est bien là que le bât blesse: la gauche doit-elle, éternellement, faire pire que la droite?»<i> Beaucoup s'indigneront et crieront à l'alliance objective. Et pourtant, on a beau se frotter les yeux, ce n'est pas sous la présidence précédente mais bien sous celle-ci que cinquante ans d'élaboration d'une politique du cinéma exemplaire sont réduits à néant. Le pire du pire étant que ces soi-disant hommes de progrès dont il était pourtant évident qu'ils n'étaient que des outres pleines de vent clament leurs grands principes. Qu'ils finissent d'assassiner, par la même occasion. En 2017, n'aurons-nous encore le choix qu'entre sauver des redoublants au nom de l'éternel "tout sauf" ou des populistes de tous bords? Nous avons élu Hollande uniquement pour chasser Sarkozy, nous avons dès aujourd'hui Hollande et Sarkozy. Nous devrions en venir à accepter cette évidence: l'élection présidentielle n'est pas l'alpha et l'oméga de la vie politique française.</i></span></div>
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"></span><br />
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><b>La convention collective qui va tuer les films d'auteur. — </b>Comment peut-on avoir réussi à imposer aux Allemands et aux Américains une idée à laquelle ils ne croyaient pas le moins du monde, "l'exception culturelle", et ruiner dans un même mouvement ce qui la constitue, à savoir la diversité du cinéma français? C'est pourtant ce qu'est en train de faire le gouvernement français, ministre de la culture et ministre du travail en tête, en avalisant depuis le 1er juillet la convention collective du cinéma, véritable torpille lancée pour couler la majeure partie du cinéma d'auteur français.</span></div>
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">
</span>
<br />
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Quelle est en effet la logique qu'il y a à affirmer que «<i>le cinéma n'est pas une marchandise comme les autres</i>», et, en même temps, lui faire supporter le même code du travail, la même règle, que les entreprises qui fabriquent des boîtes de petits pois ou qui font de la plomberie?</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">C'est toute l'absurdité des décisions prises récemment, malgré un tollé quasi général dans la profession, malgré le refus de l'essentiel de ceux qui, réalisateurs, acteurs, producteurs et même techniciens, représentent le cinéma français aux yeux du monde.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Des décisions que n'aurait jamais osé prendre un gouvernement de droite. Et c'est bien là que le bât blesse: la gauche doit-elle, éternellement, faire pire que la droite? La gauche doit-elle défendre les "gros", les UGC, Gaumont, Pathé, MK2, — signataires, du côté patronal, de cette convention inique — contre les "petits"? Bien sûr que non!</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">En le faisant, elle ruine cinquante ans de relations et de soutien à des auteurs dont elle est censée partager les combats et le désir de «<i>changer la vie</i>», comme l'on disait aux débuts des années Mitterrand, à l'époque où Jack Lang était ministre de la culture.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Tout cela, pour faire plaisir à des syndicats de techniciens qui, encore plus que dans d'autres professions, ne représentent qu'un minuscule pourcentage de ceux qui travaillent réellement. Tout cela pour préparer, en sous-main, et selon toute vraisemblance, la suppression du statut des intermittents du spectacle, un statut, lui, tout à fait exceptionnel — «<i>une exception sociale</i>», comme dirait Aurélie Filippetti – dans le contexte actuel de crise où la France est plongée.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Cette convention collective, signée en catimini par les grands groupes du cinéma – qui sont plutôt des financiers que de réels producteurs – avec la CGT et trois autres syndicats, suscite un concert de protestations depuis six mois. À tel point que le gouvernement avait fini par nommer un médiateur, Raphaël Hadas-Lebel, pour en étudier les répercussions concrètes et tenter de calmer le jeu.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Il rédige un rapport, publié mi-juin, dans lequel il annonce, chiffres à l'appui, la disparition de près de 80 films par an: les plus petits et les plus fragiles. Le dernier film de Raoul Ruiz, <i>Donoma</i>, prix Louis-Delluc 2012, qui récompense le meilleur film français de l'année, ou le récent <i>La Fille du 14 juillet</i>.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">La raison: l'augmentation de la masse salariale des films à moins de 1 million d'euros de près de 80% et de 25% à 40% pour ceux d'un budget inférieur à 4 millions.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">La cause: la prise en charge des heures supplémentaires, des heures de nuit, forfaitisées jusque-là. Pour des "techniciens" dont les salaires sont déjà, pour certains, de près de 11 000 euros par mois, c'est beaucoup! D'autant qu'un système dérogatoire, un numerus clausus, disqualifiera, à cause de conditions d'accès absurdes, la majorité des films qui pourrait le solliciter.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Le rapport dénonce aussi le risque évident de délocalisation des tournages — surtout vers la Belgique et le Luxembourg —, qui causera un grand nombre de pertes d'emploi chez ceux-là mêmes, les syndicats, qui défendent cette convention. Ce rapport est aussitôt rejeté par lesdits syndicats. Puis, après quelques jours d'hésitation, le gouvernement enterre ce rapport, ni vu ni connu. Un rapport qu'il avait pourtant commandité, mais dont les conclusions lui déplaisaient, puisqu'il le fâchait avec la CGT. Une chose qu'il ne peut se permettre dans un contexte où il n'a qu'une seule peur: des grèves à répétition à l'automne.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Exit donc, d'un coup de plume, tout ce qui fait la richesse du cinéma français, et ce qui permet à de nouveaux (et jeunes) cinéastes et techniciens de renouveler le milieu. Exit la majorité des films français sélectionnés chaque année au Festival de Cannes. Exit l'attrait de la France — et de ses techniciens réputés — pour les productions étrangères qui y regarderont à deux fois, vu les tarifs pratiqués désormais.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">«<i>Observez bien le comportement de ces gens: trouvez-le surprenant, même s'il n'est pas singulier. Inexplicable, même s'il est ordinaire. Incompréhensible, même s'il est la règle</i>», Bertolt Brecht (<i>L'Exception et la Règle</i>).</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">En oubliant l'exception et en imposant la règle, et même des règles, le gouvernement oublie que travailler dans le cinéma n'est pas un travail comme les autres. Que le talent — et la réussite — n'est pas la conséquence du temps passé sur un plateau de tournage ou dans une salle de montage. Il ne s'agit pas de dire, bien sûr, que le cinéma n'est pas un travail d'équipe: il l'est, évidemment, ni que ce n'est pas un travail qui mérite rémunération. Mais le transformer en ce qui a sclérosé les studios américains, ces "unions" surpuissantes qui décident de tout et qui font fuir les esprits indépendants, dans les États "non syndiqués", au Canada ou même en France (!), est une erreur majeure. C'est une erreur qu'a déjà connue le cinéma français d'avant la Nouvelle Vague et contre laquelle celle-ci s'est construite.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Le cinéma français était, dans les années 1950, un cinéma convenu, bien-pensant, dominé par des réalisateurs dont on a oublié les noms. Un cinéma qui se tournait dans des studios où les syndicats régnaient en maître. Le syndicat CGT des techniciens de l'époque s'était alors insurgé contre ces cinéastes de la Nouvelle Vague qui quittaient les studios et «<i>faisaient perdre des emplois</i>». Et il avait qualifié les Truffaut, Godard, Chabrol ou Rohmer de cinéastes «<i>de droite</i>». Une étiquette qui leur a collé à la peau bien longtemps.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Il serait malheureux qu'un président qui nous promettait: «<i>Le changement, c'est maintenant</i>» nous fasse revenir soixante ans en arrière, à l'époque la plus réactionnaire du cinéma français. À l'époque où celui-ci était le moins brillant sur le plan artistique. Les cinéastes et producteurs indépendants français ont, aujourd'hui, l'impression d'être le pauvre coolie de la pièce de Brecht, <i>L'Exception et la Règle</i>: pas écouté et écrasé par le marchand qu'il sert et qui finira par l'assassiner, avant d'être acquitté par une justice d'État complice. À l'époque, en 1930, Bertolt Brecht dénonçait le capitalisme. — </span><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-style: italic;">François Margolin (réalisateur et producteur de Raoul Ruiz, Hou Hsiao Hsien, Olivier Assayas, Catherine Breillat, Raymond Depardon, etc). </span><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">Le Monde</span><span style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-style: italic;">, mercredi 17 juillet 2013.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">© Jean-Luc Godard: <i>Week-end,</i> 1967.</span></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-42905740231063977922013-06-27T16:40:00.001+02:002013-06-27T20:44:26.966+02:00Sébastien Lifshitz: Bambi (2013)<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhhViCLnW68sSA26UgqvAoVLM_GACZPtx1wKR3YV6-xf_sTzhieywLDqDyRxG-J-chU8PzrDGMxAXdA4lSVyBYc5yyWY5l7YOfVFibN_n27qxRqsjvlJ922VF2F9BbbNG4YMiDCPv_DXmf_/s435/photo_05.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhhViCLnW68sSA26UgqvAoVLM_GACZPtx1wKR3YV6-xf_sTzhieywLDqDyRxG-J-chU8PzrDGMxAXdA4lSVyBYc5yyWY5l7YOfVFibN_n27qxRqsjvlJ922VF2F9BbbNG4YMiDCPv_DXmf_/s1600/photo_05.jpg" /></span></a></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: center;">
<span style="color: blue; font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><a href="https://sites.google.com/site/lestrainsdelumiere/lifshitz-sebastien" target="_blank">Lecture dans dossier, cliquer ici.</a></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i>Claire Denis la vagabonde</i>, le premier documentaire de Sébastien Lifshitz date de 1996. <i>Les Corps ouverts</i> (1997), <i>Les Terres froides</i> (1999), <i>Presque rien </i>(2000), son œuvre réfléchit sur les homosexualités, quasiment sans discontinuer. Et c'est avec <i>Les Invisibles</i>, toujours sur ce sujet, et le César 2013 du meilleur film documentaire que le public le connaît plus largement. Il pourrait bien accroître encore son audience avec son dernier film d'une heure, <i>Bambi</i>, et ce ne serait que justice. Ceux qui se souviennent de Capucine ou de Coccinelle auront aussi son nom de scène en mémoire, alors travesti au Carrousel de Paris.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Jean-Pierre est né à Ysser, banlieue d'Alger, en 1935. Né obèse et aussi loin que Bambi se souvienne, dans la haine de son prénom et de son genre et dans l'attente d'un miracle divin. Au sortir de l'adolescence, il part pour Paris vers le seul métier possible en dehors de «<i>vivre de ses charmes</i>», danseur travesti au Carrousel de Paris. Opérée et identifiée enfin en femme — car à la différence de l'homosexualité, la transsexualité est affaire d'identité et on ne comprendrait rien à les confondre ou à les apparenter —, Marie-Pierre Pruvot passe une licence de lettres classiques entre 1972 et 1974 et enseigne une trentaine d'années dans l'Éducation Nationale, dans l'anonymat le mieux protégé. Décorée des Palmes académiques, elle est aujourd'hui à la retraite et vit en compagnie d'Ute Wahl. Une garçonne, comme elle dit.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Presque octogénaire, Marie-Pierre raconte son itinéraire avec une grâce, une intelligence et une force peu communes. Et surtout avec la simple sérénité de celle qui sait exactement le prix de ses choix et de ses libertés. Et qui a depuis longtemps trouvé les mots pour les dire, ne serait-ce que par les livres qu'elle a écrits aussi sur sa vie, bien avant que Sébastien Lifshitz ne la filme et dont les éditions <i>Ex Aequo</i> ont entrepris <a href="http://www.editions-exaequo.fr/shop/catalog/search?shop_param=" target="_blank"><span style="color: blue;">la publication raisonnée</span></a>. Le cinéaste a beau prétendre le contraire dans <a href="http://www.lexpress.fr/culture/cinema/sebastien-lifshitz-bambi-est-une-pionniere-une-aventuriere_1256602.html" target="_blank"><span style="color: blue;">ses entretiens promotionnels</span></a>:</span><br />
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"></span>
<br />
<br />
<blockquote style="border: none; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px;">
<blockquote style="border: none; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"><i> </i></b><span style="color: #222222;"><span style="line-height: 24px;"><i>Avant de faire le film, elle a écrit un livre sur sa vie, elle avait donc déjà formulé les choses dans sa tête. Mon rôle a été de la faire sortir de ce discours réglé. Il fallait qu'elle perde un peu le contrôle. Ce qu'elle déteste. J'ai donc créé des situations pour provoquer des émotions, à l'image de ce moment où elle retourne à l'endroit même où était le garage de son père à Alger.</i></span></span></span></blockquote>
</blockquote>
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span>
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">jamais il ne désarçonne la vieille dame qui mène au contraire à sa guise les réponses et les questions, d'autant plus que, dans la suite de l'entretien, il dit n'avoir pas utilisé la séquence forte ou Marie-Pierre va au cimetière sur les tombes de son père et de sa sœur. En réalité, il lui obéit et là-dessus on lui donnera cent fois raison. L'assemblage des séquences est aussi simple que possible: deux grands entretiens alternent avec des vues d'Alger où Marie-Pierre Pruvot retourne en manière de pèlerinage sur les lieux de son enfance. Sébastien Lifshitz témoigne d'ailleurs des complications rencontrées dans les rues d'Alger aujourd'hui ou dans ce café:</span><br />
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<blockquote style="border: none; margin: 0 0 0 40px; padding: 0px;">
<blockquote style="border: none; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Un cauchemar! Même avec des autorisations, nous étions arrêtés tous les deux mètres! Alors imaginez avec une femme de soixante-dix sept ans, blonde platine, non voilée, en train de marcher dans les rues d'Alger où il n'y a pratiquement que des hommes et pas de blancs! Tout le monde nous regardait […]. Elle flottait! Elle était sidérée de redécouvrir son pays et n'a pas senti les regard des autres. Elle était ailleurs, dans son monde. Un plan du film le raconte très bien. Elle marche, tous les hommes se retournent sur son passage. Elle ne les voit pas.<span style="font-size: x-small;"> </span></span></i></blockquote>
</blockquote>
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Qui n'a pas connu l'Afrique du Nord de ces années-là ne pourra imaginer ce qu'auront été les regards de ces communautés fermées, cloisonnées, et ici d'un milieu relativement populaire: son père était garagiste. Heureusement cette société coloniale prise par ses propres folies produisait aussi des femmes seules ou devenues seules que les conformismes ambiants jugeaient profondément excentriques. Comme la tante Rosette qui accepta de l'appeler Jean-Pi, et l'emmena pour la première fois au Carrousel, où Bambi trouva son avenir.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"> Sébastien Lifshitz alterne aussi par de précieuses et introuvables archives en super-8 tournées souvent par Bambi elle-même au temps du Carrousel, et par quelques extraits de films où elle a joué de petits rôles. </span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Il faut courir voir ce film, on l'aura compris. Cinquante-deux minutes, c'est bien court pour une telle aventure. On rêve à ce qu'aurait pu devenir le film si, au lieu de faire mine de fuir son long travail de verbalisation, y compris sur d'autres sujets que sa biographie (<i><a href="http://www.editions-exaequo.fr/shop/article_9782359622515/France%2C-ce-serait-aussi-un-beau-nom...-de-MP-Pruvot.html?sessid=d3pn8b6S8k3gZ8kwP3u8Z896NbpvnYWazbMIQOGnnrBLT0VvbogGHqvCwgNzhiE2&shop_param=cid%3D1%26aid%3D9782359622515%26" target="_blank"><span style="color: blue;">France, ce serait aussi un beau nom</span></a></i>, sur la défense de la langue française par exemple), Sébastien Lifshitz avait su donner toutes ses chances à <a href="http://www.bambi-lelivre.com/parcours.html" target="_blank"><span style="color: blue;">cette profonde notation de Marie-Pierre Pruvot sur sa vie</span>,</a> qui rappelle furieusement l'inoubliable adresse de Pier Paolo Pasolini à Andy Warhol: «<i>Tu es un homme libre, tu es magnifique, mais ton drame, c'est que ta liberté te suffit</i>»:</span><br />
<blockquote style="border: none; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px;">
<blockquote style="border: none; margin: 0px 0px 0px 40px; padding: 0px;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"><br class="Apple-interchange-newline" /> </i></b><i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">J'avoue, en faisant le bilan, avoir l'impression de ne pas avoir accompli tout ce que je pouvais faire dans ma vie: je me suis tenue à l'écart de la grande querelle de la guerre d'Algérie. C'est que la complexité de mes difficultés m'accaparait entièrement.<span style="font-size: x-small;"> </span></span></i></blockquote>
</blockquote>
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span>
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Centré sur l'enfance et la carrière de chanteuse, danseuse et meneuse de revue, avec autant de discrétion que de retenue, le film escamote pratiquement les trente années de son enseignement. Reste que madame Pruvot, professeur de français, aura par exemple filmé aussi cette élève qui portait comme elle un bandeau indien dans les cheveux. Et cette image mimétique qui pense fortement convoque loin notre imaginaire. Il paraît que l'édition DVD dont la sortie est imminente à <a href="http://www.epicentrefilms.com/Bambi-Sebastien" target="_blank"><span style="color: blue;">Épicentre films</span></a> contient de nombreuses scènes inédites en particulier sur cette dernière période, des images de l'avant-première au Festival de Berlin où le film a remporté le <i>Teddy Award</i>, et deux courts métrages: <i>Vingt-quatre heures dans la vie de Coccinelle</i> et <i>La chambre d'amour,</i> dont nous ne savons rien. Une chance peut-être pour ceux et celles qui sauront continuer pour leur propre compte le bout à bout?</span></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-5073393659939823672013-06-20T11:47:00.000+02:002013-06-20T11:53:10.920+02:00Abdelwahab Meddeb: Solidarité avec Amina<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg84VoZ7JH2Fi4xn8zbGrBs8Zi8EoCyhmbPBrw4SeK8NLd8_FfmL4wC9zeF-EtalJxGdkw5catb-L6I77cndj_nYHK59mz3poNTCyvTCmrO-u5O7gXfyYUqz7aAkYW3a_rusPkXNW1jRcbo/s1600/Tunisian-activist-Amina-Tyler-via-AFP.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="222" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg84VoZ7JH2Fi4xn8zbGrBs8Zi8EoCyhmbPBrw4SeK8NLd8_FfmL4wC9zeF-EtalJxGdkw5catb-L6I77cndj_nYHK59mz3poNTCyvTCmrO-u5O7gXfyYUqz7aAkYW3a_rusPkXNW1jRcbo/s400/Tunisian-activist-Amina-Tyler-via-AFP.jpg" width="400" /></a></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"><br /></i></b></div>
<div style="text-align: justify;">
</div>
<div style="text-align: center;">
<span style="background-color: white; color: blue; font-family: Georgia; font-size: 18px; line-height: 24px;"><a href="https://sites.google.com/site/libratextu/8-des-pays-plus-libres/abdelwahab-meddeb-solidarite-avec-amina" target="_blank">Lecture dans dossier, cliquer ici.</a></span><br />
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia; font-size: 18px; line-height: 24px;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b>Solidarité avec Amina. — </b>Extraordinaire Amina, dont l'acte pose avec éloquence les questions qui comptent. D'avoir diffusé son image aux seins nus où rôde le spectre islamiste nous met face aux enjeux qui orientent le destin d'une société. Amina a explicité sa mise en scène en inscrivant sur son corps les mots qui justifient son geste. Elle a écrit en arabe sur sa poitrine et ses seins: «Ce corps m'appartient, il n'est l'honneur de personne». Son acte se réclame de l'<i>habeas corpus</i> / "Sois maître de ton corps". Amina propose une énonciation qui avalise l'énoncé du droit fondamental à disposer de son corps. L'opération engage le sujet et fait émerger l'individu par l'usage du pronom de la première personne. L'individu souverain n'est plus assujetti à la servitude de la communauté.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Amina se sépare du groupe en niant l'implication de l'honneur de qui que ce soit lorsqu'elle décide de faire de ses seins une arme de combat. Ainsi abolit-elle le crime d'honneur dont se croient investis les mâles qui ont un lien de sang avec le sujet féminin.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">L'acte d'Amina est politique. Il réclame une avancée juridique, celle qui invoque l'<i>habeas corpus</i>, auquel résistent bien des autorités, quand bien même il serait actif depuis 1679.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">À cette revendication s'ajoute celle de la liberté de conscience, que les islamistes refusent d'inscrire dans la Constitution qu'ils sont en train de finaliser. Le geste d'Amina est au cœur du moment historique que vit le pays. Il a pour ambition de s'attaquer à la norme islamique de la <i>'awra,</i> celle qui gouverne le voilement du corps féminin au prétexte qu'il suscite la <i>fitna</i>, cette séduction qui, par la sédition qu'elle provoque, instaure le désordre dans la cité. Telle position implique soit la sortie de l'islam, soit le recours à une interprétation qui l'adapte à l'évolution des mœurs.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Une telle interprétation (dont se réclame Amina) arrache l'islam du sol patriarcal où les femmes sont opprimées et qu'Amina dénonce à travers son refus de céder son corps à l'honneur dont sont gardiens les mâles liés au nom par le sang.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">L'audace et le courage d'Amina se sont de nouveau manifestés lorsqu'elle est allée à Kairouan, le 19 mai, jour où les salafistes ont décidé de tenir congrès (interdit). Elle voulait se confronter à ceux qui sont contre l'<i>habeas corpus</i>, contre la liberté de conscience, pour le patriarcat, pour le crime d'honneur. Elle a été arrêtée après avoir tagué sur le muret du cimetière face à la Grande Mosquée le mot "Femen", le groupe de protestation féminine par seins nus auquel elle est affiliée. Elle est déjà passée devant le juge qui l'a condamnée à une amende de 300 dinars (150 euros) parce qu'elle était en possession d'un aérosol lacrymogène. Ce n'est qu'une arme d'autodéfense dérisoire au vu du risque qu'elle encourait face à des ennemis prompts à lyncher tout contradicteur. D'autant plus qu'un prédicateur salafiste a réclamé qu'Amina soit lapidée à mort. Pire encore: tel juge a refusé de libérer Amina, contrevenant aux dispositions élémentaires de l'habeas corpus selon lesquelles il doit libérer le corps qui s'est présenté à lui en cas d'absence de délit ou de charges insuffisantes. Au lieu de son élargissement, le juge l'a accablée d'accusations graves, celle d'atteinte à la pudeur, de trouble de l'ordre public, d'association de malfaiteurs. Ainsi se prépare un procès inique. Comme au temps de la dictature, le juge assimile à un acte délictueux une action politique, pacifique, en conformité avec la règle démocratique. De surcroît, le juge détourne des dispositions du droit positif, du <i>qanûn</i>, pour conforter la norme héritée de la charia et du <i>fiqh</i>, la casuistique qui en ordonnançait le corpus.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Nous dénonçons cette double manipulation. Et réclamons la libération immédiate d'Amina — qui suscite notre admiration. Non seulement son action fait avancer la cause des femmes dans un milieu où elles sont considérées comme le symptôme du mal, mais encore elle participe au combat pour la liberté et le droit dans une Tunisie laboratoire pour toute la territorialité islamique.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Si nous gagnons un tel combat, le monde gagnera; si nous perdons, avec nous le monde perdra.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">De l'image d'Amina aux seins nus se dégage une étrange proximité avec le portrait de Gabrielle d'Estrées et d'une de ses sœurs, le fameux tableau de l'école de Fontainebleau, «<i>blonde, dorée, d'une taille admirable, d'un teint d'une blancheur éclatante</i>»: autant de traits qu'Amina a en partage avec l'amante d'Henri IV. Le poète baroque Agrippa d'Aubigné (1552-1630) lui attribue un grand rôle politique, c'est elle qui aurait poussé le roi à signer l'Édit de Nantes, destiné à apaiser la guerre des religions et à instaurer la coexistence des croyances; il dit aussi de son image aux seins nus: «<i>C'est une merveille comment cette femme de laquelle l'extrême beauté ne sentait rien de lascif</i>». On peut porter le même jugement sur Amina en réponse à ceux qui assimilent sans discernement la mise à nu au sexe.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Et pour ceux, nombreux en Tunisie, qui estiment que la mise en scène du nu (politique ou artistique) est une intrusion de la société occidentale, je vais leur ouvrir les yeux en les conviant à jouir d'une peinture provenant du même XVI<span style="font-size: xx-small;">e</span> siècle, <i>Shirîn au bain,</i> composée par Soltân Mohammed, à Tabriz, vers 1540, pour illustrer un épisode de la <i>Khamseh</i> du poète Nizami: torse nu, les seins en partie à découvert sur le trajet des tresses, cette œuvre issue du monde islamique croise celle de Fontainebleau et participe à l'esthétique du nu pour en enrichir la longue histoire.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Gloire à Amina, qui, par les moyens d'aujourd'hui, a inscrit son nom et son corps dans cette séculaire tradition iconique. <i>— Abdelwahab Meddeb, écrivain et universitaire. Article paru dans </i>Le Monde<i> du 11 juin 2013.</i></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i><br /></i></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<b style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, Utopia, 'Palatino Linotype', Palatino, serif; font-size: 18px; line-height: 24px;"><i style="font-family: Georgia;"> </i></b><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif; font-size: xx-small;">© Photographie: Amina Tyler, Agence AFP, 2013.</span></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-43469627826336583532013-05-31T16:00:00.000+02:002013-05-31T20:35:47.740+02:00Jean-Pierre Le Goff: La gauche se trompe<div style="text-align: justify;">
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi0lX-F1haC-gR8gjYInQjaTl-qCRCIa3_NEW7RM2bxsm0QYNGbhH1IvbtW-IUYmiZm5BfLJj0QSdT1WfM_GI6lIiKOhPJbjQUiFg6taXo4CZ4pGVgLdspWdBPoNffEDeuAwrb-eJlSifO3/s1600/lusine-renault-occupee-19300_43910.1210618012.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi0lX-F1haC-gR8gjYInQjaTl-qCRCIa3_NEW7RM2bxsm0QYNGbhH1IvbtW-IUYmiZm5BfLJj0QSdT1WfM_GI6lIiKOhPJbjQUiFg6taXo4CZ4pGVgLdspWdBPoNffEDeuAwrb-eJlSifO3/s1600/lusine-renault-occupee-19300_43910.1210618012.jpg" /></a></div>
<i><br /></i></div>
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<div style="text-align: center;">
<a href="https://sites.google.com/site/libratextu/libertes-pour-le-present/2013-05-jean-pierre-le-goff-la-gauche-se-trompe" target="_blank"><span style="color: blue;">Lecture dans dossier, cliquer ici.</span></a></div>
<i><br /></i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><i>Qu'il n'y ait pas méprise. Nous avons souvent écrit ici que Mai 1968 fut certainement la plus importante lutte ouvrière du siècle, ne serait-ce que par son ampleur et sa durée. Par exemple le 4 mai 2008: </i><a href="http://sites.google.com/site/libratextu/liberte-pour-l-histoire/208-04-mai-juin-1968" target="_blank"><span style="color: blue;">Mai-juin 68 valent mieux qu'une messe</span></a><i>, justement contre ces façons de falsifier ou de mythifier les faits pour mieux les détruire en faisant mine de les encenser. Ici, "Mai 68" est certainement à comprendre dans son acception médiatique, qu'avec Jean-Pierre Le Goff certainement, nous refusons de cautionner.</i><br />
<i><br /></i><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><i>D'autre part, nous ajouterions, pour y être aussi souvent revenu que, si les dernières élections présidentielles ont permis d'assainir les conditions d'un débat qui n'était plus gouverné que par la haine anti-sarkozyste, les limites du nouveau président étaient patentes, aussi bien en termes de clarté du projet que de capacité à rassembler des forces qui ne soient pas fédérées uniquement par une sorte de nouveau «tout sauf», qui pour la deuxième fois montre sa nocivité historique. Il n'y a donc probablement pas lieu à désillusions, puisque d'illusions nous pouvions être à même de ne pas en avoir. Notre dossier </i><a href="https://sites.google.com/site/libratextu/libertes-pour-le-present/vers-2012" target="_blank"><span style="color: blue;">Vers 2012</span></a><i>, aujourd'hui clos évidemment, composé de quatorze articles entre le 18 décembre 2009 et le 16 mars 2012 jalonnent la montée de cette évidence.</i><br />
<i><br /></i>
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><i>Les mêmes tours de passe-passe continuent et l'essentiel de ce texte de Jean-Pierre Le Goff paru dans </i>Le Monde<i> du 25 mai dernier est là: </i>«Considère-t-on que les questions sociétales constituent désormais le nouveau marqueur identitaire de la gauche, et ce à un moment où la politique économique menée est difficilement assumée, ou encore que la gauche sociale est désormais inséparable de la gauche sociétale? Si oui, il faut admettre qu'un seuil a été franchi: la question sociale, qui a façonné l'identité historique de la gauche, n'occupe plus la place centrale.»</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><b>Fiasco politique des élites soixante-huitardes. —</b> La gauche se trompe et renoue avec ses vieux démons sectaires: elle se veut la propriétaire attitrée de Mai 68 et de tout mouvement social. Aussi s'empresse-t-elle de ramener La Manif pour tous, qui lui échappe et la déconcerte, à du "<i>déjà connu</i>". Quoi de plus simple que de considérer ce mouvement comme un succédané du fascisme des années 1930, du pétainisme, ou encore comme une des manifestations de l'intégrisme catholique et de l'extrême droite qui ne manquent pas d'en profiter? Bien mieux, ce mouvement a toutes les allures d'un Mai 68 à l'envers, avec des aspects revanchards bien présents.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span>Pourtant, le style de ses principaux initiateurs n'a pas grand-chose à voir avec une droite traditionaliste et collet monté. On peut même y voir les marques d'une dimension décontractée et festive qui n'est pas sans rapport avec Mai 68. Il en va de même des homosexuels qui manifestent, assumant clairement leur différence et s'opposant au mariage gay. La masse des manifestants n'apparaît pas comme de dangereux extrémistes mais plutôt comme des citoyens ordinaires, beaucoup venant de province, et des jeunes pour qui c'est la première manif, beaucoup sont catholiques, d'autres non.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span>Plutôt que d'affronter ces questions, le réflexe premier de la gauche bien-pensante est de se tenir chaud dans un entre-soi sécurisant qui se donne toujours le beau rôle de l'antifascisme. Et pendant ce temps-là, la France se morcelle sous l'effet de multiples fractures qui ne sont pas seulement économiques et sociales, mais culturelles. Et ces fractures ont à voir avec Mai 68 qui, pour une partie de la gauche, est devenu un nouveau sacré, une sorte de marque déposée constitutive de sa nouvelle identité.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span>Face à Mai 68, la société continue d'osciller entre fascination et rejet, sans parvenir à trouver la bonne distance. C'est un événement historique inédit qui n'appartient à personne si ce n'est à l'histoire de la France comme à celle de nombreux autres pays: il a constitué un moment de pause et de catharsis dans une société qui s'est trouvée bouleversée par la modernisation de l'après-guerre. Il a fait apparaître la jeunesse comme nouvel acteur social, ainsi que des aspirations nouvelles à l'autonomie et à la participation. Il a produit des effets salutaires contre les rigidités et les pesanteurs de l'époque, dans le rapport entre la société et l'État comme dans les rapports sociaux.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span>Mais on ne saurait pour autant masquer son "héritage impossible" avec l'idée d'une rupture radicale dans tous les domaines de l'existence individuelle et collective, d'une révolution culturelle qui entend changer radicalement les mentalités et les moeurs, en considérant globalement les couches populaires comme des beaufs et des ringards.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span>Ce gauchisme post-68 abâtardi a de beaux restes: la prise en main de l'éducation des jeunes générations selon ce qu'on estime être le "bien", la notion problématique de "genre" introduite dans les crèches et les écoles, <a href="https://sites.google.com/site/libratextu/libertes-pour-le-present/vers-2012/2012-03-la-politique-en-quarantaine" target="_blank"><span style="color: blue;">l'éradication du mot "race"</span></a>, les réécritures de l'histoire sous un angle moralisant et pénitentiel, le tout agrémenté de dénonciations régulières des réactionnaires anciens et nouveaux.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span>Il faudra bien que la gauche finisse un jour par l'admettre: tout cela est de plus en plus insupportable à une grande partie de la population. C'est dans ce cadre-là qu'il faut resituer l'opposition de masse à la loi sur l'adoption par les couples homosexuels, parce que cette loi entend à sa façon changer les mentalités et, qui plus est, la filiation.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span>Considère-t-on que les questions sociétales constituent désormais le nouveau marqueur identitaire de la gauche, et ce à un moment où la politique économique menée est difficilement assumée, ou encore que la gauche sociale est désormais inséparable de la gauche sociétale? Si oui, il faut admettre qu'un seuil a été franchi: la question sociale, qui a façonné l'identité historique de la gauche, n'occupe plus la place centrale.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span>On peut toujours pratiquer l'art de la synthèse dont le PS est friand, mais le registre de l'économique et du social n'est pas du même ordre que celui des questions anthropologiques et culturelles qui engagent une conception de la condition humaine et qui, comme telles, ne sont pas ramenables à une question d'égalité et d'adaptation. Quand on ne cherche plus à convaincre, mais à gagner dans un débat dont on a d'emblée délimité les contours légitimes, quand le réflexe de défense identitaire l'emporte, il y a de quoi s'inquiéter sur l'avenir d'une gauche qui ne s'aperçoit même plus qu'elle exacerbe une bonne partie de son électorat et de la population.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span>L'extrême droite espère bien en tirer profit en soufflant sur les braises, mais, à vrai dire, elle n'a pas grand-chose à faire: le modernisme à tous crins et le sectarisme d'une bonne partie de la gauche lui facilitent la tâche<i>. —Jean-Pierre Le Goff, </i>Le Monde<i>, samedi 25 mai 2013.</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-size: xx-small;"><br /></span>
<span style="font-size: xx-small;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-style: italic; line-height: 24px;"> © Photographie: auteur inconnu, tous droits réservés. L'usine Renault-Billancourt, 17 mai 1968.</span></span></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-19312630614867924482013-05-24T18:20:00.001+02:002013-05-24T18:36:31.067+02:00Maurice Darmon: Frederick Wiseman / Chroniques américaines, PUR 2013<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhwdP81RRCLkm1M8x5YUwkHAepE8lc2DjTz3qPglN0Pxy-heRD6ZuOpi4qHqT28hGUIxTJ2M09e78tSVEkqPd3W_x0GO1OncCMXL4u87n2pNenVeTjHXPKHOMnbZfpMsyzTsUIY0xvzwisb/s1600/9782753522084.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em; text-align: justify;"><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhwdP81RRCLkm1M8x5YUwkHAepE8lc2DjTz3qPglN0Pxy-heRD6ZuOpi4qHqT28hGUIxTJ2M09e78tSVEkqPd3W_x0GO1OncCMXL4u87n2pNenVeTjHXPKHOMnbZfpMsyzTsUIY0xvzwisb/s320/9782753522084.jpg" width="252" /></span></a></div>
<div style="text-align: justify;">
<div style="text-align: center;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: blue; font-size: 18px; line-height: 24px;"><a href="https://sites.google.com/site/pourfrederickwiseman/fw-chroniques-americaines-pur-2013" target="_blank">Lecture dans dossier, cliquer ici</a>.</span></span></div>
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"><br /></span></span>
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span>J'ai le plaisir de vous annoncer la parution de mon livre <i>Frederick Wiseman / Chroniques américaines</i>, publié aux Presses Universitaires de Rennes, dans la collection <i>Le Spectaculaire Cinéma</i>. Il est disponible dès le 23 mai dans toutes les librairies, qui peuvent également le commander rapidement, sa distribution étant assurée par Sodis / Gallimard. On le trouve dans les librairies en ligne et il peut être <a href="http://pur-editions.fr/detail.php?idOuv=3200" target="_blank"><span style="color: blue;">commandé chez l'éditeur</span></a>, 396 pages, 20 euros.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span>Né en 1930 à Boston (Massachusetts) et de formation juridique, Frederick Wiseman produit, réalise, prend le son et monte tous ses films. Au rythme d'une livraison par an depuis 1967, diffusée par les télévisions publiques, ses quarante opus, dont trente-cinq tournés dans seize États différents et plusieurs lieux de présence américaine, constituent un long film de cent heures sur l'évolution des États-Unis, institutions et lieux de pouvoir, de loisir et de consommation, dans les soixante dernières années. Leur étude aura nécessité l'analyse des conditions économiques, historiques, sociales et esthétiques de leur production.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span>Dès <i>Titicut Follies</i> (1967), interdit durant vingt-six ans, sa méthode est simple et inchangée: ni interviews, ni commentaires off, ni musiques additionnelles, une immersion dans le milieu jusqu'à l'effacement. Il accumule ainsi des centaines d'heures de tournage en quelques semaines, dont il monte le dixième en plusieurs mois, pour des films souvent très longs et d'une construction narrative soutenue. Cette constante ne doit pas cacher l'essentiel que seule l'approche strictement chronologique met en évidence: Frederick Wiseman poursuit un itinéraire raisonné.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span>Après une décennie planifiée de formation où il pénètre les grandes institutions américaines (hôpitaux, lycées, prétoires, bureaux d'aide sociale, monastère, armée, laboratoire de recherches médicales), il s'oriente vers les sociétés privées (agence de mannequins, usine par exemple). Dans les mêmes années, il suit l'armée à Panama, dans le Sinaï et en République Fédérale Allemande, trois lieux névralgiques de la présence américaine. Ensuite, avec la conquête de la couleur, il défie l'étroitesse de la critique militante par l'observation sans a priori des classes possédantes (magasin huppé, champ de courses, station de ski), tout en conférant à ses films leur durée intérieure et l'horizon de vastes communautés humaines. Parallèlement, son attention à la mise en scène de la vie quotidienne, à ses acteurs et sujets tenant leur partie à l'instar de personnages de Beckett, parvient à s'émanciper de son amour pour les plateaux de théâtre et de danse. Singulièrement à Paris où il a signé diverses mises en scène et tourné quatre films, tous de scènes.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span>Vérité enregistrée et fiction construite se fondent en un cinéma exigeant, contradictoire, respectueux des intérêts, ambiguïtés et oppositions de chacun, qui met le spectateur devant son civisme, ses valeurs et ses choix. Se sachant dépassé par ce qui advient devant sa caméra et sa perche, Frederick Wiseman s'instruit ainsi de ceux qu'ils filment, laisse vivre au fil du temps les moments faibles, les corps, les gestes et les silences.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span>Il est très simple de voir des films de Frederick Wiseman en France. La Bibliothèque Publique d'information du centre Georges-Pompidou possède la plupart de ses titres, et les transmet aisément aux services de prêt des médiathèques en régions, quand ils ne les possèdent pas déjà dans leurs collections.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span><span style="background-color: white; color: #222222; font-size: 18px; font-style: italic; line-height: 24px;"> </span>Ouvert ici depuis de nombreuses années, notre dossier <a href="https://sites.google.com/site/pourfrederickwiseman/" target="_blank"><span style="color: blue;">Pour Frederick Wiseman</span> </a>offre de nombreux entretiens, articles, documents et informations sur le cinéaste. Les affiliés à Facebook pourront également consulter notre page <a href="https://www.facebook.com/pages/Frederick-Wiseman-Chroniques-am%C3%A9ricaines-un-livre-de-Maurice-Darmon/355955454498187" target="_blank"><span style="color: blue;">Frederick Wiseman / Chroniques américaines</span></a>, constituée en attente de notre livre. Bonne lecture et surtout beaux films.</span></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-51831072321628600802013-05-19T11:16:00.000+02:002013-05-19T17:06:30.790+02:00Delphine Horvilleur: En tenue d'Ève<div style="text-align: center;">
<span style="color: blue; font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><a href="https://sites.google.com/site/judaiecas/2013-05-delphine-horvilleur-en-tenue-d-eve" target="_blank">Lecture dans dossier, cliquer ici.</a></span></div>
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span>
<br />
<div class="p1" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span class="s1" style="font-style: italic;"> Née en 1974 à Nancy et d'abord mannequin, </span><i>Delphine Horvilleur est l'une des deux seules rabbines françaises. Elle officie au Mouvement juif libéral de France, à Paris dans le XV</i><span style="font-size: xx-small; font-style: italic;">e</span><i> arrondissement. Rédactrice en chef de la revue trimestrielle d'art et de pensée </i><a href="http://www.tenoua.org/" target="_blank">Tenou'a</a><i>, et membre du Conseil National du SIDA, elle participe activement aux contenus du site ici souvent signalé </i><a href="http://www.akadem.org/" target="_blank">Akadem</a><i>. Eelle vient de publier chez Grasset: </i>En tenue d'Ève, féminin, pudeur et judaïsme<i>. La voici présentant son livre, malgré une caméra stupide et prétentieuse qui ne supporte pas de la voir lire:</i></span><br />
<div style="text-align: center;">
<i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></i></div>
</div>
<div style="text-align: center;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><iframe allowfullscreen="" frameborder="0" height="315" src="http://www.youtube.com/embed/5p8JK9hcO2s" width="560"></iframe>
</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div class="p1" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i><span class="s1"><b> </b></span>On peut aussi <a href="http://www.franceculture.fr/emission-les-racines-du-ciel-le-feminin-et-de-la-pudeur-dans-le-judaisme-avec-delphine-horvilleur-20" target="_blank">l'entendre plus longuement s'entretenir ici</a> avec les animateurs de l'émission</i> Les Racines du ciel<i>, sur France-Culture, en date d'aujourd'hui. En écoute directe, elle peut être enregistrée durant un an.</i></span><br />
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i><br /></i></span>
<i style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;"><span class="s1"><b> </b></span></i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i>De même, on peut l'écouter dans l'émission de France-Inter du 17 mai 2013: </i><a href="http://www.franceinter.fr/player/reecouter?play=634914" target="_blank">Les femmes, toute une histoire</a><i>. Il vaut mieux l'enregistrer d'abord, car le sommaire est varié et l'entretien (plus un reportage) de quinze minutes est en fin d'émission (de 31'15 à la fin). </i></span></div>
<div class="p2" style="text-align: justify;">
<i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></i></div>
<div class="p1" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span class="s1" style="font-style: italic;"><b> </b></span><i>Le 29 décembre 2011, elle avait publié une tribune libre dans </i>Le Monde,<i> que nous redonnons à lire ci-dessous. Nous l'avions en effet déjà publiée le 1er janvier 2012, sous le titre: </i><a href="https://sites.google.com/site/judaiecas/memoire/2012-01-01-l-obscenite-du-mot-a-mot" rel="nofollow" target="_blank">L'obscénité de prendre au mot les mots.</a></span></div>
<div class="p2" style="text-align: justify;">
<i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></i></div>
<div class="p1" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b><span class="s1"> </span>Pour un judaïsme sans ségrégation des femmes. — </b>Des femmes à qui on demande d'aller s'asseoir au fond du bus pour ne pas troubler les hommes dans leur voyage, des femmes que l'on fait taire au prétexte que leur voix constituerait, selon les textes religieux, "<i>une nudité</i>", des trottoirs séparés entre les sexes dans certains quartiers, des publicités où des visages de femme sont arrachés, des passantes insultées et humiliées parce que leur chevelure n'est pas assez couverte ou leurs manches pas assez longues.</span></div>
<div class="p2" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div class="p1" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span class="s1"><b><i> </i></b></span>Ces scènes se sont passées dans plusieurs villes israéliennes, Ashdod, Jérusalem, Bet Shemesh... où des groupuscules ultra-orthodoxes tentent d'effacer ou de voiler la présence féminine dans la sphère publique. Le phénomène n'est pas nouveau. Ce qui l'est, c'est l'intensité de cette "offensive" antifemmes, qui pousse toute la société israélienne à s'interroger sur la défense de ses principes démocratiques, et l'égalité entre les sexes.</span></div>
<div class="p2" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div class="p1" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span class="s1"><b><i> </i></b></span>Le président, Shimon Pérès, et le premier ministre, Benyamin Nétanyahou, ont fermement dénoncé ces exclusions de femmes, contraires aux valeurs d'une démocratie israélienne qui a toujours fait de cette égalité un étendard, dans la vie politique ou militaire.</span></div>
<div class="p2" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div class="p1" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span class="s1"><b><i> </i></b></span>Mais il est aujourd'hui essentiel que des voix s'élèvent, non pas au nom d'Israël et de ses choix politiques, mais au nom du judaïsme et de ses idéaux prophétiques. Certains, en Israël, le font déjà. Parmi eux, des associations et des rabbins, des hommes et des femmes qui se mobilisent par milliers et œuvrent remarquablement en faveur du pluralisme religieux, de la modernité juive et d'une quête de justice prônée précisément par la tradition du judaïsme.</span></div>
<div class="p2" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div class="p1" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span class="s1"><b><i> </i></b></span>Ceux qui exigent la ségrégation des genres le font en se réclamant eux aussi de textes de la tradition, et plus particulièrement d'une notion, celle de <i>tzniyout</i>, c'est-à-dire l'exigence d'une attitude modeste et pudique en toutes circonstances. Cette pudeur exigerait, selon eux, de couvrir le corps, la voix et la chevelure des femmes... temples d'une tentation menaçante pour l'homme.</span></div>
<div class="p2" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div class="p1" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span class="s1"><b><i> </i></b></span>Leur interprétation consiste à percevoir tout le corps de la femme et jusqu'à sa voix comme un objet de désir, presque une zone génitale, à voiler pour assurer la paix sociale.</span></div>
<div class="p2" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div class="p1" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span class="s1"><b><i> </i></b></span>Le paradoxe de cette lecture si littérale des sources traditionnelles est qu'en érotisant toute présence féminine dans la sphère publique, on fait des textes une lecture bien impudique. Toute lecture littérale a quelque chose d'obscène, tant elle dénude le texte de ses possibilités de dire autre chose.</span></div>
<div class="p2" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div class="p1" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span class="s1"><b><i> </i></b></span>Leur lecture, comme toute lecture, n'est qu'une interprétation. Elle n'engage pas le judaïsme dans son ensemble. Depuis plusieurs décennies, le judaïsme se nourrit de lectures d'hommes et de femmes qui, penchés ensemble sur le texte, le fertilisent de leur dialogue.</span></div>
<div class="p2" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div class="p1" style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><span class="s1"><b><i> </i></b></span>Le monde juif est un monde de lectures et de commentaires pluriels, qui s'est toujours méfié d'une lecture des textes "<i>dans leur nudité</i>", et a préféré les habiller du voile modeste de l'interprétation. Il s'agit aujourd'hui de rester fidèle à cette tradition.<i> — Delphine Horvilleur, rabbin du Mouvement juif libéral de France (MJLF).</i></span></div>
Unknownnoreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-2243751187069925741.post-89549856374714459242013-04-27T15:18:00.001+02:002013-04-27T16:59:29.357+02:00Smaïn Laacher: Nécessaire féminisme radical en pays arabes<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiBJxKDy62f7oS5QaJlwoCm0xvLSynp2OizNop_eYL0w7Q99CaBZms8D0jjrkJIU-0GODPW9FYGfXR8CemCez3_BhsvsCzLLK77RHHEHU1v1OQvDpKMD06tZAZ2N7QepdkDP2cmcDUxkIwy/s1600/8590458138_82cd0616c5_z.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="299" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiBJxKDy62f7oS5QaJlwoCm0xvLSynp2OizNop_eYL0w7Q99CaBZms8D0jjrkJIU-0GODPW9FYGfXR8CemCez3_BhsvsCzLLK77RHHEHU1v1OQvDpKMD06tZAZ2N7QepdkDP2cmcDUxkIwy/s400/8590458138_82cd0616c5_z.jpg" width="440" /></a></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<br /></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<br /></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<span style="color: blue;"><a href="https://sites.google.com/site/libratextu/8-des-pays-plus-libres/2013-04-feminisme-radical-en-terre-d-islam" target="_blank">Lecture dans dossier, cliquer ici.</a></span></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 19px; line-height: 24px;"> </i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i>Textes politiques sur </i>Ralentir travaux<i>? Inutile d'y aller davantage des nôtres, sinon de temps en temps nous en remettre un en mémoire. Nous n'avons aucune raison de changer ni d'ajouter grand-chose à ce que nous avons ici écrit en ces matières depuis tant d'années et qu'on retrouvera rassemblés dans notre dossier </i><a href="https://sites.google.com/site/libratextu/" style="color: blue;" target="_blank">Liber@ te</a>, et singulièrement pour ces sujets la section <a href="https://sites.google.com/site/libratextu/8-des-pays-plus-libres" style="color: blue;" target="_blank">Des pays plus libres</a><span style="color: blue;">. </span><i>Ce qui nous paraît désormais précieux c'est de garder un certain accès public à des textes souvent parus dans la presse et que nous jugeons essentiels. Aujourd'hui, celui-ci qui nous paraît si bien souligner la nouveauté du geste radical d'Amina Tyler en Tunisie, rapidement cataloguée par nos démocrates et beaux esprits de provocatrice, quand ce n'était pas d'alliée objective des criminels islamistes aux marges du pouvoir dans son pays, quelle honte. J'aurais simplement titré (et précisé davantage dans le texte) "en pays musulmans" ou "en terres d'islam", puisque les premières batailles <span style="color: blue;"><a href="https://sites.google.com/site/libratextu/un-iran-libre" target="_blank">nous sont venues d'Iran</a></span>. Et peut-être les décisives prochaines. Mais c'est une autre histoire. </i></span><i style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif;">Merci à Smaïn Laacher, sociologue, au Centre d'étude des mouvements sociaux (EHESS-CNRS) et à <span style="color: blue;"><a href="http://carolinefourest.wordpress.com/" target="_blank">Caroline Fourest</a></span> qui anime et relaye en France ces combats avec une particulière constance. </i></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 19px; line-height: 24px;"> </i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><b>Nécessaire féminisme radical en pays arabes. — </b>Renverser une dictature, ce n'est pas modifier substantiellement les fondements de l'ordre social et des structures mentales. Les soulèvements qui ont eu lieu dans les sociétés arabes se sont arrêtés à mi-chemin, dans la mesure où la remise en cause radicale des régimes politiques ne s'est nullement accompagnée d'une remise en cause radicale des systèmes qui sont au principe de la domination des hommes sur les femmes. Vouloir abattre la tyrannie et juger par ailleurs comme accessoire la lutte contre les tyrannies qui, au quotidien (du travail à la rue jusqu'à la chambre à coucher), font de la vie des femmes, dans leur grande majorité, un enfer sur terre, c'est reconnaître que la pensée a failli.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 19px; line-height: 24px;"> </i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Ce point de vue est partagé par des femmes arabes ayant activement pris part aux soulèvements populaires dans leur pays. Voilà ce que disait, lors d'un entretien réalisé le 10 mars 2011 par la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH), une militante des droits de l'homme à Manama (Bahreïn) qui fut très active lors des protestations contre le régime : «Les revendications politiques et sociales des manifestants n'incluent pas les droits des femmes. La question des femmes est totalement absente. Personne ne revendique l'égalité ou les droits civiques pour les femmes, pas même les femmes.»</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 19px; line-height: 24px;"> </i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Sans aucun doute est-ce la fin d'un certain monde pour ceux qui ont cru que gouverner, c'était habiter le pouvoir en famille pour l'éternité. Au Maroc, en Égypte, en Tunisie, en Libye, en Algérie (à Alger, le pouvoir n'est pas à l'Assemblée nationale, aussi le nombre important de femmes députées ne change-t-il rien à l'affaire) ou au Yémen, les Parlements nationaux actuels, océans de misogynie, ne laissent aucun espoir aux femmes quant à l'amélioration de leur sort et de leurs droits.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 19px; line-height: 24px;"> </i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Il n'y a nulle raison d'attendre une quelconque aide de l'extérieur. Les "mouvements progressistes" en Occident regardent, avec un mélange de désarroi et d'optimisme béat, les mouvements contre-révolutionnaires agir, d'abord, pour mettre au pas les femmes qui ont osé transgresser les normes religieuses et culturelles en pays musulmans.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 19px; line-height: 24px;"> </i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Pourtant, si les femmes ont été physiquement écartées des derniers soulèvements populaires, l'État et ses diverses polices ont, quant à eux, parfaitement perçu la menace politique que représentaient des corps en liberté dans l'espace public, en particulier lorsqu'il s'agit de celui des femmes. Les exemples sont nombreux. Entre autres, celui de la jeune Égyptienne Aliaa Magda Elmahdy, qui a publié l'image de son corps nu sur son blog, ou celui de cette jeune Tunisienne qui a rejoint le mouvement des Femen, et qui a adopté, en Tunisie même, leur mode d'interpellation publique contre l'oppression des femmes. Le propos n'est pas ici de savoir si elles ont tort ou raison. Il s'agit avant tout de comprendre ces gestes inouïs.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 19px; line-height: 24px;"> </i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">À ma connaissance, c'est bien la première fois que des jeunes femmes arabes montrent publiquement, totalement ou en partie, leur corps nu, événement majeur puisque c'est un corps de femme nu qui échappe à l'enfermement domestique et aux injonctions d'hommes et de femmes soucieux de la légalité traditionnelle et du respect de la norme religieuse. Ce corps nu, quelle que soit sa nationalité, n'est pas n'importe quel corps, il n'est pas un corps parmi des millions d'autres corps, il n'est pas innommable, abstrait, il n'incarne pas tous les corps — une Islandaise n'est pas une Égyptienne — et n'est donc pas sans origine, sans histoire, sans culture, sans désir. Ces corps ont une identité car ils sont identifiables: Aliaa Magda Elmahdy a vingt ans, elle est née en Égypte; Amina a dix-neuf ans, elle est née en Tunisie.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 19px; line-height: 24px;"> </i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Ainsi, ce n'est pas seulement une dimension inconnue des sociétés arabes qui s'expose au monde, et en premier lieu aux regards de tous les Arabes. Ces corps sont des corps qui refusent de se soumettre et par lesquels advient aussi le politique; c'est un corps qui agit contre la violence des hommes et de toutes les institutions gouvernées par des hommes, armés ou non.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 19px; line-height: 24px;"> </i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">C'est un corps qui fait de la résistance, autrement dit qui fait de la politique contre le "souverain" (terrestre et divin), mais aussi contre tous les petits tyrans ordinaires et les millions d'auto-entrepreneurs en morale religieuse. Elles signent, contre leur volonté ou non, par cet acte inouï, une déclaration qui est une exigence politique et morale: la femme et/ou l'homme ont le droit à leur liberté, une liberté non soumise aux impératifs de la communauté politico-religieuse.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 19px; line-height: 24px;"> </i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Cette liberté signifie cet impératif majeur, nullement partagé: agir par soi-même sans être soumis à l'hégémonie du collectif et de ses lois et ne pas se laisser dominer par une quelconque instance transcendante, aussi divine soit-elle.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 19px; line-height: 24px;"> </i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Au fond, peu importe que ce geste fût rare. Il a probablement choqué, même ceux et celles qui ne cessent de s'autoproclamer "démocrates", "laïques", "progressistes", etc. Ce geste n'a pas voulu se décliner sous forme de slogans, encore moins était-il sous-tendu par quelques propositions programmatiques. Cette radicalité, dans son expression protestataire, s'adresse au sens, aux émotions et à l'intelligence.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 19px; line-height: 24px;"> </i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">Ces expériences sont à chaque fois un événement qui n'est pas seulement un fait, mais plus profondément une rupture. C'est de l'inédit qui engage une autre histoire sociale des femmes dont toute la difficulté va être d'en élucider la signification. Les corps nus ou en partie dévêtus d'Aliaa Magda Elmahdy et d'Amina ont cette faculté inattendue de penser ensemble des registres qui ont toujours été tenus séparés dans cette société: la politique, la religion, la liberté, l'art, la pluralité humaine, l'action en commun, etc.</span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></div>
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<i style="background-color: white; color: #222222; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 19px; line-height: 24px;"> </i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;">«Être libre et agir ne font qu'un», disait Hannah Arendt. L'action humaine est capable de miracle, mais seulement par la liberté qui est cette capacité à faire advenir l'imprévisible. Il s'agit maintenant de penser cet événement, car c'est par cette activité, pour paraphraser une nouvelle fois Hannah Arendt, que les normes, les règles rigides et les croyances générales (religieuses, politiques, etc.) peuvent être sapées. — </span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i><br /></i></span></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"> </i><i>Smaïn Laacher vient de publier </i>Insurrections arabes.
Utopie révolutionnaire et impensé démocratique<i>,
Buchet-Chastel.</i></span></div>
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<i><span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><br /></span></i></div>
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<span style="font-family: Georgia, Times New Roman, serif;"><i style="background-color: white; color: #222222; line-height: 24px;"> </i><i>© </i><span style="background-color: white; color: #444444; line-height: 16px;">Photo via Femen France. [</span><a href="https://www.facebook.com/francefemen?fref=ts" style="background-color: white; color: #2f76ae; line-height: 16px; text-decoration: none;">Facebook</a><span style="background-color: white; color: #444444; line-height: 16px;">]</span></span></div>
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