Née en 1974 à Nancy et d'abord mannequin, Delphine Horvilleur est l'une des deux seules rabbines françaises. Elle officie au Mouvement juif libéral de France, à Paris dans le XVe arrondissement. Rédactrice en chef de la revue trimestrielle d'art et de pensée Tenou'a, et membre du Conseil National du SIDA, elle participe activement aux contenus du site ici souvent signalé Akadem. Eelle vient de publier chez Grasset: En tenue d'Ève, féminin, pudeur et judaïsme. La voici présentant son livre, malgré une caméra stupide et prétentieuse qui ne supporte pas de la voir lire:
On peut aussi l'entendre plus longuement s'entretenir ici avec les animateurs de l'émission Les Racines du ciel, sur France-Culture, en date d'aujourd'hui. En écoute directe, elle peut être enregistrée durant un an.
De même, on peut l'écouter dans l'émission de France-Inter du 17 mai 2013: Les femmes, toute une histoire. Il vaut mieux l'enregistrer d'abord, car le sommaire est varié et l'entretien (plus un reportage) de quinze minutes est en fin d'émission (de 31'15 à la fin).
De même, on peut l'écouter dans l'émission de France-Inter du 17 mai 2013: Les femmes, toute une histoire. Il vaut mieux l'enregistrer d'abord, car le sommaire est varié et l'entretien (plus un reportage) de quinze minutes est en fin d'émission (de 31'15 à la fin).
Le 29 décembre 2011, elle avait publié une tribune libre dans Le Monde, que nous redonnons à lire ci-dessous. Nous l'avions en effet déjà publiée le 1er janvier 2012, sous le titre: L'obscénité de prendre au mot les mots.
Pour un judaïsme sans ségrégation des femmes. — Des femmes à qui on demande d'aller s'asseoir au fond du bus pour ne pas troubler les hommes dans leur voyage, des femmes que l'on fait taire au prétexte que leur voix constituerait, selon les textes religieux, "une nudité", des trottoirs séparés entre les sexes dans certains quartiers, des publicités où des visages de femme sont arrachés, des passantes insultées et humiliées parce que leur chevelure n'est pas assez couverte ou leurs manches pas assez longues.
Ces scènes se sont passées dans plusieurs villes israéliennes, Ashdod, Jérusalem, Bet Shemesh... où des groupuscules ultra-orthodoxes tentent d'effacer ou de voiler la présence féminine dans la sphère publique. Le phénomène n'est pas nouveau. Ce qui l'est, c'est l'intensité de cette "offensive" antifemmes, qui pousse toute la société israélienne à s'interroger sur la défense de ses principes démocratiques, et l'égalité entre les sexes.
Le président, Shimon Pérès, et le premier ministre, Benyamin Nétanyahou, ont fermement dénoncé ces exclusions de femmes, contraires aux valeurs d'une démocratie israélienne qui a toujours fait de cette égalité un étendard, dans la vie politique ou militaire.
Mais il est aujourd'hui essentiel que des voix s'élèvent, non pas au nom d'Israël et de ses choix politiques, mais au nom du judaïsme et de ses idéaux prophétiques. Certains, en Israël, le font déjà. Parmi eux, des associations et des rabbins, des hommes et des femmes qui se mobilisent par milliers et œuvrent remarquablement en faveur du pluralisme religieux, de la modernité juive et d'une quête de justice prônée précisément par la tradition du judaïsme.
Ceux qui exigent la ségrégation des genres le font en se réclamant eux aussi de textes de la tradition, et plus particulièrement d'une notion, celle de tzniyout, c'est-à-dire l'exigence d'une attitude modeste et pudique en toutes circonstances. Cette pudeur exigerait, selon eux, de couvrir le corps, la voix et la chevelure des femmes... temples d'une tentation menaçante pour l'homme.
Leur interprétation consiste à percevoir tout le corps de la femme et jusqu'à sa voix comme un objet de désir, presque une zone génitale, à voiler pour assurer la paix sociale.
Le paradoxe de cette lecture si littérale des sources traditionnelles est qu'en érotisant toute présence féminine dans la sphère publique, on fait des textes une lecture bien impudique. Toute lecture littérale a quelque chose d'obscène, tant elle dénude le texte de ses possibilités de dire autre chose.
Leur lecture, comme toute lecture, n'est qu'une interprétation. Elle n'engage pas le judaïsme dans son ensemble. Depuis plusieurs décennies, le judaïsme se nourrit de lectures d'hommes et de femmes qui, penchés ensemble sur le texte, le fertilisent de leur dialogue.
Le monde juif est un monde de lectures et de commentaires pluriels, qui s'est toujours méfié d'une lecture des textes "dans leur nudité", et a préféré les habiller du voile modeste de l'interprétation. Il s'agit aujourd'hui de rester fidèle à cette tradition. — Delphine Horvilleur, rabbin du Mouvement juif libéral de France (MJLF).