Mal nommer
un objet, c'est ajouter

au malheur de ce monde.

Albert Camus.


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dimanche 2 octobre 2011

Ingmar Bergman: Au seuil de la vie (1958)




Dans Images (Gallimard, 1992), page 297 en manière de post scriptum, Ingmar Bergman s'étonne de n'avoir plus jamais pensé à Au seuil de la vie, tourné en 1957, plus parlé de lui ni revu depuis. Ce dix-neuvième film du réalisateur suit immédiatement deux œuvres réputées majeures, Le Septième Sceau (1956) et Les Fraises sauvages, tourné durant le même été 1957. Ne faut-il pas rechercher là l'origine du malentendu frappant ce grand film méconnu? Le réalisateur suédois venait de s'imposer comme l'inventeur d'un nouveau cinéma formel et complexe qui allait nourrir les œuvres d'Antonioni ou de Resnais par exemple, et cette apparente régression à la simple linéarité narrative aura déçu les attentes. Nous savons aujourd'hui au contraire qu'après un formalisme si parfait qu'il devint une impasse, Au seuil de la vie est en réalité le premier d'une maturité conquise, comptant sur les ressources intérieures plutôt que sur les démonstrations esthétiques, si séduisantes soient-elles: Le Visage (1958) et La Source (1959) le suivront immédiatement, et bientôt Le Silence (1962).

En 1991, se rendant compte de cet étrange oubli, Bergman raconte donc:

J'ai fini par me décider à revoir ce film, mais avec répugnance [...] Pourquoi ces soupçons? Oh bien sûr! Je peux reconnaître des faiblesses et des insuffisances plus distinctement aujourd'hui qu'il y a trente ans, mais combien de films des années cinquante tiennent-ils aujourd'hui le coup?

J'avais seize ans en 1959. Comme tous les recoins obscurs à l'époque, Le Paris, salle d'art et d'essai à Marseille, était aussi le lieu des premiers émois amoureux: la relative clandestinité des premières rencontres n'est sans doute pas étrangère à la cinéphilie de notre génération. Comment dire l'immense choc que produisirent alors sur nous ces trois femmes réunies dans une chambre du grand hôpital Karolinska à Stockholm, reconstituée en studio: Cecilia (Ingrid Thulin) anéantie par une fausse couche provoquée selon elle par l'absence d'amour dans son couple; Hjördis (Bibi Andersson) refusant l'enfant qu'elle porte et réchappant à un avortement pratiqué à mains nues par son homme — encore mineures, nos amies du collège voisin commençaient alors à être hantées par ce fléau, échangeaient des recettes et des adresses de faiseuses d'anges; Stina (Eva Dahlbeck) heureuse d'avoir un enfant et la tragédie s'abattra sur elle si fort que les deux autres retrouveront goût à la vie et espoir en l'avenir; et syster Britta la bonne infirmière? Un film tellement nôtre qu'il nous envoûta au point d'en oublier les raisons pour lesquelles, fille et garçon, nous allions aussi au cinéma.

Et comme Bergman aujourd'hui, mais pour des raisons inverses, j'avais une timidité à revoir ce film, méconnu, oublié des rétrospectives, édité enfin en DVD pour la première fois par les éditions Montparnasse. Et comme lui toujours, mais plus d'un demi-siècle après, il m'est revenu, plus beau encore, émouvant, magnifique. Continuons la lecture des injustices coquettes et faussement modestes du maître de Stockholm en critique de films:

Tout est honnête, chaleureux et sage, en gros fort bien joué, trop de maquillage, une perruque lamentable sur la tête d'Eva Dahlbeck, une photo par moments misérable et quelques accents un peu trop littéraires... Quand le film s'est arrêté, je suis resté un peu surpris, un peu fâché: et tout à coup j'ai aimé ce vieux film. C'était un gentil film, bien brave, un peu naïf et il fonctionnait certainement très bien à l'époque où il a fait le tour des salles.
Manifestement, doutant toujours de lui-même dès qu'il ne tourne pas, le solitaire de Farö cherche ici le compliment. «Fort bien joué» est au moins un euphémisme: les quatre actrices y furent si admirables qu'elles obtinrent ensemble le prix collectif d'interprétation féminine au Festival de Cannes 1958 qui décerna à Bergman le prix de la mise en scène; «trop de maquillage», tous les témoignages concordent sur le fait que le metteur en scène en proscrivit formellement tout usage; la «perruque lamentable», on en jugera simplement par notre photogramme; et, en guise de «photographie misérable», visages nus et crus et masques de joie, d'enfance ou de désespoirs servis par une lumière travaillée dans le détail, de savants cadrages où s'impose constamment le hors champ. Bref, corrigeons: un film non point «gentil» — ce mot, Cecilia le renvoie à la face de son mari avant de le chasser de la chambre des espoirs et des douleurs —, mais la force de la bonté et de la solidarité dans la tragédie la plus profonde: «Vous avez fait tout ce qu'il fallait, l'enfant se présentait bien. Mais la Vie n'a pas voulu, aussi cruel que ça puisse être. C'est tout ce que je peux dire»; non point «brave» mais vaillant et courageux; non point «naïf» mais lucide au contraire sur la grande souffrance des femmes dans la seule société à donner statut social aux mères célibataires — une doctoresse rapporte dans le détail les avancées historiques de la Suède en la matière — et sur les terribles mutilations des hommes qui font d'eux des salauds, des menteurs ou des naïfs justement.

L'injustice la plus dure frappe au cœur de la vie la vie la plus joyeuse, en remet mystérieusement d'autres en chemin:

Il faut que je vous dise ce que je vois clairement maintenant. Ça n'a jamais été aussi clair [...] Toute cette bienveillance qui m'attend, quand je serai sortie de l'hôpital. Ici, on ne se comporte pas de la même façon [...] Il n'y a pas que les vagins qui s'ouvrent ici, les êtres humains aussi. Je n'oublierai jamais ce moment. Vous comprenez, jamais je n'ai été si proche de la vie, mais la vie m'a glissé entre les doigts. Elle s'en est allée sans laisser de traces.

De tels «accents un peu trop littéraires», on en désirera tant d'autres.

En bonus, Nguyen Trong Binh, auteur d'un ouvrage précieux et bien illustré, Ingmar Bergman, le magicien du Nord (Découvertes, Gallimard, 1993), ouvre douze portes sur le film avec douze mots-clé si pertinents que je vous laisse les découvrir.
Un DVD indispensable, aux éditions Montparnasse, sortie le 4 octobre 2011.


© Photogramme: Ingmar Bergman, Au seuil de la vie, Eva Dahlbeck (Stina Andersson) et Barbro Hiort af Ornäs (Brita, l'infirmière).

vendredi 14 janvier 2011

Tunisie: journée des dupes?





Après avoir usé et abusé du pouvoir durant vingt-trois ans, le président de la République tunisienne espère étouffer l'insurrection en cours dans le pays qu'il ne dirige plus en promettant de ne pas se représenter en 2014, ce qui signifie implicitement qu'il supplie lamentablement son peuple de le supporter encore deux ans. Au moins car, comme tout citoyen le sait, les promesses n'engagent que ceux qui y apportent foi. Après tout, lui et son clan se retireront fortune faite et, en réalité, il ne se représentera pas, seulement s'il est assuré de perdre. Il promet ensuite de ne plus faire tirer à balles réelles sur ses compatriotes, ce qui montre que, jusqu'ici, cette activité lui paraissait dans la nature des choses. Ou encore, il promet en sanglotant trois cent mille emplois dans les plus brefs délais et montre sa bonne volonté vis-à-vis de la liberté d'expression en débloquant l'accès à Youtube et à Dailymotion, ce qui ne sont pas les uniques sites où se forment les opinions et les consciences politiques. Et d'organiser cyniquement le soir même des manifestations de soutien et de réjouissances parcourant la capitale.

Devant cette évidente volonté de fabriquer une journée des dupes, les représentants de l'opposition ne sont pas loin de se féliciter de ces résultats. Ainsi Ahmed ben Brahim, chef du parti Ettajdid (ex-communiste, un député au Parlement): «C'est positif, le discours répond à des questions qui ont été soulevées par notre parti»; ainsi Mustapha Ben Jaafar, chef du Forum démocratique pour le travail et les libertés, membre de l'Internationale socialiste: «Ce discours ouvre des perspectives»; ainsi Bouchra Bel Haji, militante des droits de l'homme, s'estime devant «un discours historique [où Ben Ali] nous a libérés et s'est libéré lui même». L'un d'eux ou un autre dont j'ai oublié le nom et la fonction, ne faisant plus confiance à Ben Ali, réclame un gouvernement d'union nationale pour appliquer CE programme.

Un peuple adossé à une civilisation si ancienne, si diversifiée et une histoire si riche et si complexe, y compris durant son moment colonial et son temps de construction d'une société démocratique ne peut pas avoir consenti tant de sang en ce terrible mois tunisien, pour simplement retrouver Youtube. Ni même Facebook ou Wikileaks. Ni pour croire à présent en des opportunistes fascinés par l'occasion d'élections générales, a priori lointaine mais qu'ils voudraient rapprocher à peu de frais, en faisant en prime l'économie de réfléchir à tout programme, puisque celui de Ben Ali leur suffit.

Aujourd'hui, c'est la Tunisie qui nous l'enseigne et sans doute bientôt l'Italie en situation fort semblable: un jour après l'autre, rien n'est beaucoup plus grave que la veille, et pourtant les citoyens se retrouvent devant l'insupportable et préfèrent le saut dans le lendemain. Même si, devant l'imminent avenir, ils se savent en grand danger et sont assez grands pour constater que, parmi les composantes et héritages de la dictature moribonde dont ils veulent s'évader, ils sont pour le moins démunis de propositions et de perspectives.



PS. Dans la seconde qui a suivi la mise en ligne de ce billet (14h 39), nous avons été visités par l'Agence Tunisienne Internet. À mettre en liaison avec cette mise en garde sur le Site Geek Passion?

Depuis quelques jours, des rumeurs annoncent que le gouvernement tunisien de Ben Ali espionneraient les utilisateurs de Yahoo, Gmail et Facebook afin de remonter les éventuels meneurs des attaques des sites gouvernementaux ou autres sur internet. En plus de la rumeur qui enfle sur le web, The Tech Herald annonce que le gouvernement tunisien profiterait du Fournisseur d’accès internet ATI ( Agence tunisienne d’Internet) pour tenter de récupérer login et mot de passe des utilisateurs tunisiens de Facebook, Gmail et Yahoo par divers procédés dont l’injection de code javascript. Le gouvernement tunisien de Ben Ali semble en effet prêt à tout pour retrouver la trace des Anonymous qui sévissent sur le web et qui diffusent des vidéos sur Facebook, YouTube pour dénoncer la réalité de terrain en Tunisie et dénoncer les atrocités commises par le gouvernement en place.

Et à se demander aussi si redonner l'accès à Youtube et à Dailymotion aux Tunisiens est bien destiné à servir la liberté d'opinion.

PS 2. 15 janvier 2011. — Ainsi, moins de quatre heures après ce message, le roi nu a donné à nouveau l'ordre à sa police de tirer à nouveau sur les gens, à dix-sept heures trente. Ainsi, sa fille et sa femme sont parties avant lui et s'est-il sauvé vers l'Arabie Saoudite, en catimini, laissant «de façon temporaire» les choses en l'état à son ministre. Ainsi, ses milices et ses gangs ont-ils pillé et mis à sac Tunis durant la nuit, non pas seulement pour le plaisir inassouvi de continuer à se servir, mais surtout pour entretenir une tension qui leur permettra de jouer sur tous les tableaux, y compris celui de forces qui ont été absolument absentes dans cette insurrection, mais qui pourraient bien être tentées d'y nicher leur révolution. Et qui auraient donc besoin du désordre dans les rues, dans les esprits, dans les cœurs, dans les partis et factions dont nous avions noté hier à quel point leurs donneurs d'ordre étaient pris de court, depuis à peine vingt-trois ans.

© Photogramme: Ingmar Bergman, La prison, 1949.

vendredi 21 août 2009

Raphaël Nadjari 1: The Shade (1999)



À la sortie remarquée de The Shade dans la sélection à Cannes d'Un Certain Regard (1999) certains critiques s'y sont trompés: dans ce film, la construction en flash-back ne relève pas d'une audace particulière à Raphaël Nadjari, cinéaste que nous connaissons ici depuis notre note sur Téhilim. Elle est déjà dans le texte même de Dostoievski Krotkaïa ("La Douce", 1876), qu'on pourra lire ici dans son intégralité.
C'est donc tout naturellement qu'on la trouvait déjà en 1969 dans le film de Robert Bresson, Une femme douce, avec Dominique Sanda, tiré de la même nouvelle (plusieurs extraits et photogrammes ici), et, en 2007, dans une BD, La Douce, de Mikhael Allouche et Loïc Dauvillier, éditions Carabas.

Cette abondance d'adaptations en dit suffisamment sur le caractère spontanément cinématographique et visuel du récit russe, lente mise au point des représentations intérieures qu'un homme se fait de cette année qui vient de s'écouler, comprise entre la rencontre d'une femme et son suicide. Lisons Dostoievski:

Ce n’est point un conte; ce ne sont point non plus de simples notes. Imaginez un mari en présence du cadavre de sa femme étendu sur une table. C’est quelques heures après le suicide de cette femme, qui s’est jetée par la fenêtre. Le mari est dans un trouble extrême et n’a pu encore rassembler ses pensées. Il marche à travers l’appartement et s’efforce d’élucider cet événement, «de concentrer ses pensées sur un point unique». De plus c’est un hypocondriaque incurable, de ceux qui pensent à haute voix. Aussi se parle-t-il, se raconte-t-il à lui-même l’affaire et tâche-t-il de se l’expliquer. Malgré le semblant d’esprit de suite de ses paroles, il se contredit souvent, dans la logique et dans les sentiments. Et il se justifie, et il accuse sa femme; il se perd dans des explications accessoires où l’on sent les rudesses de la pensée et du cœur, en même temps qu’un sentiment profond. Peu à peu le fait s’éclaircit effectivement pour lui et il réussit «à concentrer ses pensées sur un point unique». La série des souvenirs qu’il provoque finit par l’amener inéluctablement à la vérité: cette vérité élève son esprit et son cœur. À la fin le ton même du récit s’éloigne du désordre du commencement. La vérité apparaît au malheureux claire et précise, du moins à ses yeux.

Les deux films et la BD lui sont si fidèles que ces lignes peuvent leur servir à tous de commun synopsis. Au point même qu'on peut se demander si, en enfant du cinéma né à Marseille en 1971 et pour son premier long métrage réalisé avec trois dollars six pence, Nadjari est vraiment reparti du récit de Dostoievski ou bien du premier film en couleurs de Bresson: davantage un remake qu'une adaptation, malgré les crédits du générique? D'autant que, toujours en fils du cinéma, Nadjari s'y affiche ouvertement en héritier de John Cassavetes, disparu dix ans auparavant.

Comme John Cassavetes en effet: toujours à Manhattan, mais dans Spanish Harlem plus qu'à Greenwich Village, où Simon (Richard Edson, issu de Stranger than Paradise de Jim Jarmush et qui suivra Nadjari dans les deux autres films de sa trilogie new-yorkaise) va tout de même acheter des fleurs le temps d'un pèlerinage; un portrait sensuel et amoureux d'une âme faible et vaincue d'avance par la jungle des villes: Anna, interprétée par Lorie Marino, dont le père a joué un barman dans The killing of a chinese bookie (1976-1978) de John Cassavetes, et qui en 1992 a elle-même tourné dans un hommage à Jean-Luc Godard, Jo-Jo at the Gate of the Lions de Britta Sjogren, 1992, et depuis plus grand-chose.

Anna, l'évidence saute aux yeux, est la petite sœur de Jess Polanski dans Too late blues, de Maria Fost de Faces, ou peut-être surtout de Mabel Longhetti, la femme sous l'influence, film qui, d'une certaine façon, traite du même sujet que The Shade: situations conjugales et dialogues jumeaux; une caméra portée, mais d'une main sûre comme on tient un scalpel et non un fouet (oubliez définitivement et comme par avance les impostures emphatiques des images des frères Dardenne dans Rosetta par exemple); des cadrages au plus près jusqu'au demi-visage, mais sans se cacher ni se perdre dans de bergmaniennes sublimations; le mâle médiocre, égoïste, mesquin, et pourtant fraternellement filmé dans l'empathie de ses laideurs, l'équivalent en quelque sorte de la volonté dostoievskienne: «La série des souvenirs qu’il provoque finit par l’amener inéluctablement a la vérité: cette vérité élève son esprit et son cœur»; le saxophone enfin, envoûtant et sinueux, du musicien de jazz John Surman. Voilà pour l'ascendant Cassavetes.

Mais si Cassavetes filme le bruit, les onomatopées, les rires et les toux, les barricades mystérieuses que les sons opposent aux mots, Nadjari ouvre tout son temps aux silences, aux regards évités ou aux surveillances furtives, aux offenses discrètes, et tout d'un coup — qui s'y attend? ni elle ni nous: «Voulez-vous devenir ma femme?», avant l'estocade finale avec une tablette de vrai chocolat. Quand, à travers les rues et dans les appartements, John Cassavetes poursuit et traque la fièvre et la convulsion, ici ce sont les immobilités prostrées des après-midi d'Anna, écrasée du perpétuel étonnement de vivre douloureusement parmi les autres ou figée en postures fugitivement altières, et celles de Simon pétrifié par l'orgueil ou ses catalepsies du deuil. Et toujours la pantomime d'Anna, — The shade, l'ombre, un rebond de Shadows? — silhouette gracile et frêle à la démarche volontaire mais indécise (on pense au jeu de la regrettée Katrin Cartlidge dans Claire Dolan de Lodge Kerrigan, 1998). Et régulièrement revient son corps étendu sur le lit, obstinément mort, forcément silencieux. Soudain quelques explosions, la pluie de dollars quand il faudrait les ranger en piles par valeur et tous les billets dans le même sens, les brusques violences de Simon dans son commerce, dans la rue, dans sa maison. Et voilà le compte pour Bresson, encore que l'auteur d'Une Femme douce avait tout de même gardé de Dostoïevski la voix off, le "Je" «de ceux qui pensent à haute voix».

Et Nadjari, dira-t-on? D'abord, il n'est pas si anodin qu'un premier film éveille tous ces maîtres: Bresson, Cassavetes, Bergman, et se hisse d'un seul geste, et par avance au-dessus de tous les actuels faiseurs. Cette volonté ouverte d'appartenir d'abord à la famille du cinéma le dispense de toute tentation du film d'initiation, toute escapade / échappatoire autobiographique. S'il implante son film dans une famille juive, c'est sans doute qu'un prêteur sur gages juif à New York en 1999 rencontre au mieux un personnage d'usurier de Saint-Petersbourg en 1876. Et s'll confie le rôle de la fidèle servante Loukérïa du récit dans le personnage de la compréhensive et prégnante mère de Simon (Barbara Haas), c'est, bien sûr, pour figurer mieux qu'avec une servante aujourd'hui, une symétrique femme douce, et surtout nous rendre visible du film son occulte clé de voûte: après tout, cette mère si proche d'Anna (le prénom vient ici en hommage au film de Bresson, et non de la nouvelle de Dostoievski), est-elle si bonne, est-elle cette spectatrice si innocente, elle, le seul témoin du suicide d'Anna, indiscutable en soi, puisque le fait est donné à voir? Dostoievski soulevait ce doute à sa façon: «Car enfin: "vous étiez seule avec elle, c’est donc vous qui l’avez poussée" voilà l’accusation possible»: l'invention de Nadjari révèle en fait la compréhension fidèle de cette notation. Plus intelligente, osons le blasphème, que l'initiative de Bresson de baptiser les protagonistes de ce drame conjugal — "Elle", une femme simple livrée aux naïvetés de l'amour dans le lit pervers d'un "Je", Procuste violent — de ces noms, Anna et Luc. C'était en 1969, venait de déferler la nouvelle vague du cinéma, comprenne qui voudra, François Truffaut vous expliquera le reste. Et voilà en tous cas un deuxième quizz autour de Raphaël Nadjari, qui prolonge si bien notre premier de naguère, que nous le remontons ici en post scriptum.

Mais revenons aux fidélités profondes: la russe se défenestrait, la new-yorkaise se suicide avec le revolver qu'elle a un instant brandi contre son mari, qui feignait de dormir. Cette scène — d'une formidable sobriété: Simon se retourne vers les spectateurs et ouvre l'œil — traduit en images mieux qu'une fidèle illustration ce que Fedor écrivait:

Le silence se prolongeait. Je sentis près de mes cheveux l’attouchement froid du fer. Vous me demanderiez si j’espérais fermement y échapper, je vous répondrais, comme devant Dieu, que je n’avais plus aucune espérance. Peut-être une chance sur cent. Pourquoi alors attendais-je la mort! [...] Vous me demanderez pourquoi je ne lui ai pas épargné un assassinat! [...] Cependant mon sang bouillait, le temps s’écoulait, le silence était funèbre. Elle ne quittait pas mon chevet, puis,... à un moment donné... je tressaillis d’espérance! j’ouvris les yeux: elle avait quitté la chambre. Je me levai; j’avais vaincu... elle était vaincue pour toujours!

Ainsi, Raphaël Nadjari aura vu juste dans la façon de forcer les jeux de John Cassavetes et, du même geste, aura lu Dostoïevski au moins aussi bien que Bresson, la discrétion côté métaphysique en prime.

PS. Quizz autour de Tehilim (8 juin 2007):

Qui est Raphaël Nadjari? L'autre est Godard, bien sûr!

On peut voir ici un extrait du film The Shade, de Raphaël Nadjari.
Voir aussi l'analyse de Téhilim, bande-annonce et trois extraits.

En librairie



La question juive de Jean-Luc Godard
Pour John Cassavetes
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Photogramme © Raphaël Nadjari: Richard Edson et Lorie Marino, dans The Shade, 1999.
Images du Quizz: © auteurs non identifiés. Tous droits réservés.

mardi 13 janvier 2009

Abdelwahab Meddeb: Pornographie de l'horreur (texte intégral inédit en français).




Le Monde
du 13 janvier 2009 a publié Pornographie de l’horreur, article de l'écrivain Abdelwahab Meddeb.
Le site
signandsight.com indique une version de ce texte, visiblement plus complète, dans le journal allemand
Frankfurter Rundschau du 9 janvier 2009. Nous remercions l'auteur de nous avoir aimablement autorisé à reproduire ici le texte français dans sa présentation originale et dans son intégralité. Abdelwahab Meddeb prononce l'état premier de ce texte dans une chronique radiophonique, diffusée le 3 janvier 2009 sur les ondes de Médi-1, radio internationale du Grand Maghreb émettant à partir de Tanger. Pour l'entendre, il suffit d'accéder aux archives sonores de ses Points de vue depuis janvier 2003 (ouvrir la fenêtre correspondante à l'auteur puis à cet article sous le même titre). Sans nous attarder à des variantes secondaires, dues sans doute à des corrections et mises à jour de l'auteur, nous indiquons en caractères gras les passages supprimés par la rédaction du journal pour l'édition française de ce texte, qui l'ampute donc d'un tiers, sur des points très clairement identifiables.

Pornographie de l'horreur. — En ce passage d’une année à l’autre nous avons vécu de tristes journées. Cette tristesse émane des événements qui proviennent de Gaza et qui illustrent ce que les hommes portent de moins glorieux. M’apparaît dans sa nudité l’horreur qui caractérise l’humain.
Horreur de ceux qui se présentent d’une manière intolérable en victimes.
Horreur de ceux qui usent de la guerre électronique passant par l’abstraction pour préserver ceux qui la mènent de la culpabilité suscitée par la mort qu’ils sèment.
Horreur de cette même guerre, qui, aussi précise dans la programmation de ses cibles, n’évite jamais la mort des enfants et des innocents.
Horreur du
Hamas qui a multiplié ses provocations en interrompant la trêve par le lancement de fusées futiles, d’une nuisance infime et qui savait qu’il allait recevoir une terrible réplique sans en préparer la parade: le jour même où l’attaque israélienne a été suscitée une école de police du Hamas célébrait la sortie d’une promotion de cent cinquante membres offrant ainsi à l’ennemi une cible profuse qui ne fut pas ratée; le raid des fusées a anéanti soixante des cent cinquante promus.
Horreur d’Israël qui prend le prétexte des fusées palestiniennes dérisoires pour réagir par une expédition punitive féroce confiant plus que de mesure dans la haute technologie pour détruire un ennemi aux moyens archaïques. Je dis bien fusées dérisoires, futiles, archaïques, de nuisance infime
car il suffit de se référer aux statistiques pour que ces qualificatifs gagnent leur authentification: ces dernières années, les milliers de fusées lancées par
Hamas sur Israël à partir de Gaza n’ont causé que trois dizaines de morts et quelques autres de blessés.
Me voilà moi-même contaminé par l’horreur en me découvrant user d’arguments puisés dans le décompte macabre.
Horreur du discours de Nasrallah qui accable l’Égypte parce qu’elle ne laisse pas libre le passage de Rafah, ce qui ferait du Sinaï un refuge palestinien élargissant le champ de bataille.
Horreur du même Nasrallah dans ses allocutions répétées depuis le début des opérations terrestres où il appelle les gens du
Hamas
à tuer le plus grand nombre de soldats hébreux pour obtenir une autre «victoire divine» tout aussi factice que sa propre «victoire» déjà déclarée «divine» pendant la guerre qui, l’été 2006, a ravagé le Liban.
Horreur de l’Égypte qui invoque la légalité pour voiler son apathie: l’accord international stipule en effet que le poste de frontière Rafah ne peut accueillir les passagers que sous le contrôle de l’Autorité palestinienne de concert avec les représentants de l’Union Européenne et le consentement d’Israël. Or, le
Hamas, suite à son coup d’État, a chassé de Gaza l’Autorité palestinienne, ce qui a conduit l’Union Européenne à retirer ses agents.
Horreur de la surenchère entre certains États arabes, Égypte, Arabie Saoudite, Émirats qui ont envoyé à Rafah des équipes médicales se distribuant les blessés palestiniens pour compenser leur impuissance afin de s’acquérir
une bonne conscience à peu de frais.
Horreur de la
fetwa scandaleuse émise par des docteurs de la loi autoproclamés qui dessaisissent du statut de martyre l’officier égyptien tué par balles palestiniennes à Rafah.
Horreur de la manière avec laquelle l’Égypte célèbre son mort désacralisé en en habillant la dépouille des oripeaux sacrés du martyr.
Horreur du débat régressif sur la notion de
shahîd, de martyr. Tout le monde arabe et islamique y participe alors qu’en vérité, il s’agit de morts et de blessés de guerre qui ne sont pas les sacrifiés de Dieu mais les victimes des hommes, leaders piètres, incompétents ignorant les rudiments de la technique de guerre comme de la politique.
Horreur que suscitent les télévisions arabiques (et particulièrement
Al-Jazira) filmant avec complaisance des gros plans et des zooms sur les faces ensanglantées, défigurées, tantôt se contorsionnant de douleur, tantôt inertes; images qui s’enchaînent selon le choc d’un montage morbide destiné à exciter une opinion arabe inconsolée dans son identification palestinienne. De tels médias escamotent par le recours à l’émotionnel l’analyse politique et stratégique qui devrait montrer qu’une grande part du mal provient du Hamas, de son coup d’État, de son mélange de religion et de politique, de sa volonté de s’exhiber en victime expiatoire, de la théâtralisation involontaire de son incompétence militaire et politique, de son inconscience à exposer ses troupes et son peuple à la mort. Mort qui veut entretenir le potentiel de légitimité par le culte du martyre, faisant de sa mise en scène un instrument de conquête obscurcissant l’horizon de la modernité politique construite sur la concertation qui tempère la coercition, la concession qui facilite la conciliation sinon la réconciliation.
Cette horreur du martyre connaît sa plus lugubre illustration avec la décision d’un des chefs du
Hamas Nizâr Rayyân de rester dans sa maison avec ses quatre épouses et ses onze enfants bien qu’il fût informé que sa résidence était inscrite parmi les centaines de cibles répertoriées par Tsahal. Malgré l’avertissement, il décida de s’exposer avec toute sa famille pour obtenir en compagnie des siens le martyre. Sa maison fut de fait soufflée par les redoutables fusées qui, après leur trajectoire horizontale, piquent en angle droit vers une descendante verticale pour s’enfoncer jusqu’à plus de trente pieds sous terre avant d’exploser et tout pulvériser de ce que porte le site perforé.
Horreur de Mahmûd az-Zahhâr, un des chefs militaires du
Hamas, promettant la «victoire» au troisième jour de l’offensive terrestre, dans l’attente des combats de rue. Cette victoire qui, selon ses dires, «est à venir avec la permission de Dieu» (bi-izhni ’llâh) ne viendra pas car ce Dieu qu’il invoque n’est pas facile à convoquer; il ne sera pas au rendez-vous comme il ne l’a pas été dans les pires désastres qui ont dérouté ceux qui y croient, quel que soit leur credo. Sachez que tel Dieu ne fera rien de plus que ce que font les hommes; et de nouveau il se manifestera par l’abandon pour que ceux qui l’adorent se mesurent à l’épreuve et au doute auxquels ils seront soumis dans l’intensité de leur foi.
Horreur du culte de la technologie, symétrique au culte du martyre, qu’illustre le sourire comme apaisé de Tzipi Livni au palais de l’Élysée, à côté du Président Nicolas Sarkozy et de son collègue Bernard Kouchner, sourire de mondanité politique pendant qu’enfants et femmes meurent sous les bombes de haute précision;
dans la circonstance, Madame Livni a estimé qu’il n’est point nécessaire d’accepter «la trêve humanitaire» proposée par ses hôtes.
Une autre horreur accable la même Tzipi Livni qui, après l’intervention terrestre de son armée, a considéré qu’il est impossible d’éviter les victimes civiles du fait que les combattants du
Hamas se meuvent au sein de la population.
Telle horreur se surajoute à l’horreur du
Hamas qui opte pour la stratégie qui prend en otage la population en faisant d’elle ce que leur référence au jihâd, à la «guerre sainte» appelle «le recours au bouclier humain».
Horreur que ne tempère pas la presse israélienne critiquant par avance l’inefficacité de cette guerre, déjà comparée à celle du Liban contre le
Hezbo’allâh; certains chroniqueurs pensent en effet que le but de cette guerre (la déligitimation sinon l'affaiblissement du Hamas) ne sera pas atteint. Il est vrai que la défaite du Hamas exige une guerre d’une autre nature, celle des idées et de la confrontation idéologique qui sont, hélas! à peine entamées et loin d’être gagnées.
Horreur de la déclaration tchèque faite au nom de l’Union Européenne pour affirmer qu’Israël est en légitime défense, ce qui l’absout de tout crime de guerre: que dire alors des
256 enfants qu’on recense parmi les 850 victimes palestiniennes dénombrés au terme de quinze jours de guerre ?
Horreur de plus à mettre sur le compte du président G. W. Bush (peut-être l’ultime parmi celles qu’il accumula en son double mandat de huit ans) lui qui, en associant ces opérations à une «mesure de protection», épargne d'Israël le soupçon.
De tels événements actualisent le cri que Conrad mit dans la bouche de sa créature Kurtz par quoi finit
Au cœur des Ténèbres: «horror! horror!» Décidément des empires coloniaux aux temps de la mondialisation, du XIXe siècle finissant au XXIe dont nous achevons la première décennie, c’est toujours l’horreur que les humains ont en partage.
Pornographique est cet étalage de l’horreur
, celle qui couronne Thanatos en destituant Éros, celle qui privilégie le principe de mort en éclipsant l’amour de la vie, celle qui suspend le renoncement et la rétention qui font la civilisation pour précipiter l’avènement de la barbarie mue par l’instinct destructeur qui, dans la primauté accordée à la violence, diffuse la mort et transforme les aires de peuplement en ruine et en cimetière.

Photogramme: © Ingmar Bergman, La Mort dans
Le septième sceau (1957).

mercredi 12 novembre 2008

1965: Louis Aragon a vu Pierrot le fou




1965 n'est pas une année comme les autres. Les trois grands pouvoirs qui se sont jusqu'ici partagé l'opinion française tremblent sur leurs bases. Le pouvoir américain d'abord: la guerre du Vietnam à son comble va faire écrire à Jean-Paul Sartre dans le Nouvel Observateur du 1er avril qu'avec les Américains, y compris ceux qui s'opposent à cette guerre, "il n'y a plus de dialogue possible", traduisant ainsi une fureur anti-américaine assez générale. Le pouvoir gaulliste ensuite est atteint de façon vitale par deux fois: l'enlèvement de Ben Barka avec l'implication évidente des services secrets français d'une part, et, en décembre, l'éberluement du général de Gaulle lui-même, mis en ballottage à la première élection présidentielle au suffrage universel par le socialiste François Mitterrand, élection qui consacrera bientôt la mise à mal du troisième pouvoir, celui du Parti communiste, au moment même où sa stratégie d'union paraît porter ses fruits, mais qu'on commence à discerner dans les débats théoriques et politiques internes qui le traversent et se prolongent dans ses mouvements de jeunesse et le monde syndical dans son ensemble.

Et justement, c'est aussi l'année où Jean-Luc Godard livre son
Pierrot le fou. Vous pourrez lire ici l'intégralité de Qu'est-ce que l'art, Jean-Luc Godard?, un texte de Louis Aragon paru dans Les Lettres françaises n° 1096 des 9/15 septembre 1965 (pp. 1 et 8) et reproduit sur le site de Julien d'Abrigeon en annexe d'un mémoire sur le cinéaste-écrivain, qui salue chaleureusement l'événement. Ce texte rejoint notre documentation et réflexion sur le cinéaste.

Ajoutons que ce que nous avons jamais lu de meilleur sur ce film est un chapitre du livre indispensable d'Alain Bergala aux éditions des
Cahiers du cinéma, 1999: Nul mieux que Godard, (comment ne pas voir que la raison d'un titre aussi contourné et aussi périlleux est d'être l'anagramme de "lumineux", lumineux comme l'est tout le cinéma de Jean-Luc Godard) un chapitre intitulé: La réminiscence. Texte de 1996 en réalité où nul mieux que Bergala n'aura démontré de façon convaincante et définitive l'étroite parenté entre Pierrot le fou et Monika d'Ingmar Bergman et, plus profondément encore, en quoi Godard filme déjà et pour toujours ensuite la mémoire du cinéma.

En librairie


La question juive de Jean-Luc Godard
Si vous préférez le commander aux éditions Le temps qu'il fait,
cliquer ici.

Photogramme: © Jean-Luc Godard, Pierrot le fou, 1965.

samedi 1 novembre 2008

Ingmar Bergman: Laterna magica



Qui s'est toujours promis de lire un jour
Laterna magica (Gallimard, 1987, Folio) d'Ingmar Bergman sans l'avoir encore jamais fait doit savoir qu'un grand et rare bonheur l'attend. Bien mieux qu'une autobiographie, une confession, ou des mémoires du cinéaste, une œuvre à part entière: sa construction d'abord, qui s'émancipe de toute chronologie pour confronter (les monter ensemble, devrions-nous dire) des moments de sa vie adulte à des réminiscences de son enfance. Les premiers sont clairement rédigés après coup, à partir d'un journal de travail (1) qu'il a tenu probablement durant toute sa vie de créateur; les secondes engendrent sur l'instant des chocs verbaux (et de quelle force simple le verbe!), des fulgurances concrètes, en forme de jaillissement d'images, de sons présents à nos oreilles et de mille odeurs, qui embaument chaque page.

Ces deux pays, le texte les habite et les peuple différemment: l'adulte analyse, raconte, juge les autres et lui-même avec une lucidité que la tendresse n'altère pas, et une lapidaire et impitoyable ironie; mais quand il se retrouve face aux geysers de son enfance, le voilà armé — ou démuni — de sa seule émotion, de ses effrois d'une convaincante et terrible réalité, de ses expériences sensorielles et sensuelles, de l'étau de la conscience, qu'il connaît et reconnaît si bien, mais sans pouvoir empêcher qu'ils le dominent et l'empoignent, tout au long. Chaque séquence balise son champ et pourtant la continuité s'établit: la qualité de l'écriture, la puissance des images, la force du montage sont au rendez-vous.

Et le miracle de ces pages est que, rencontrant notre mémoire de tous ses films, elles nous projettent celui-là, jamais tourné. Riches de tous ces aveux, ces demi-mensonges, ces conversations familiales et professionnelles, ces tableaux de la nature et ces portraits et silhouettes de gens connus ou croisés, de son oncle à Hitler, ces rêves récurrents — mais sont-ils vraiment des rêves? — ces souvenirs ou trop claires illusions, ces obscurités des armoires et des êtres qui ne se déprennent jamais de la réalité de leurs fantômes, nous nous surprenons à trouver en nous le facile génie de tourner sans lui son dernier film, quand c'est la seule magie des mots de l'artiste aux cinquante films et aux cent soixante mises en scène de théatre qui le déroule enfin sous nos yeux.

1.
Plusieurs extraits de ce journal sont reproduits tels quels dans Images, soixante heures d'entretiens révisés par le cinéaste, centrés de façon plus documentaire sur ses films, et qui ravira les cinéphiles, également chez Gallimard, 1992.

Image: © Ingmar Bergman:
Monika
(Harriet Andersson), 1952.

lundi 6 août 2007

Écouter voir Ingmar Bergman




En fidélité à cet homme disparu, un mot de lui, parmi d'autres:
"Cette sinistre prison dont les geôliers sont nos mensonges, nos remords, nos terreurs, notre désarroi".
Un site exemplaire (en anglais), consacré à l'artiste (informations, citations, séquences, commentaires, photographies,
tout Bergman, sa troupe, ses proches, ses films, ses livres, sans oublier, de Liv Ulmann, Infidèle, dont nous reparlerons un jour).
D'où l'idée d'indiquer de grands sites, à gauche:
Le cinéma:
celui sur Paul Carpita, réalisé par son fils: découvrir un très grand cinéaste pour ceux, nombreux, qui le méconnaissent; un site pédagogique consacré à R. W. Fassbinder par la revue Cadrage, qui dispose d'autres dossiers intéressants (sur Maurice Pialat par exemple); un beau site en italien sur Luchino Visconti [désormais en vente! 6 juillet 2010], un autre enfin, exhaustif, animé et utile, sur Alfred Hitchcock. Mais, malgré mes recherches, à part les bonnes pages de Wikipédia, rien de satisfaisant pour l'instant sur Chantal Akerman, John Cassavetes, Bruno Dumont ici Flandres), Jean-Luc Godard (notre Pour Jean-Luc Godard), Anne-Marie Miéville, Yasujiro Ozu, Jacques Rivette. Ça viendra: alors en aurai-je peut-être fini avec le sujet.
Les écrivains: en plus du
joli site sur Jean Giono déjà signalé dans nos tables, ceux (en italien) des amis de Leonardo Sciascia et sur C. E. Gadda. L'amateur de Gustave Flaubert sera comblé par le site de l'Université de Rouen, textes et manuscrits numérisés, etc. et celui de Marcel Proust par le site en français de l'Université de l'Illinois. Ainsi sont-ils là, à peu près tous.

PS. Signalons la proche sortie en avril 2011 de nos essai "Filmer après Auschwitz / La question juive de Jean-Luc Godard", et "Pour John Cassavetes" aux éditions Le Temps qu'il fait.


Image: © Ingmar Bergman,
Persona, 1965.