Dans ce jugement faisant de la virginité d'une citoyenne française une "qualité essentielle" aux yeux d'un autre citoyen français, son mari devant la loi de leur pays en l'occurrence, il ne devrait y avoir aucune place pour les convictions religieuses personnelles, ni pour les consentements privés: la notion de contrat léonin fait par exemple justice de ce genre d'arguties. Le mariage est uniquement affaire publique, acte d'état civil passé, de façon libre et égale entre deux personnes de mêmes droits et de mêmes devoirs, devant témoins, édiles (et parfois notaires), au nom da la loi du peuple français. Deux questions valent seules la peine d'être posées et d'être élucidées, au moins par notre réflexion:
1. Pourquoi toutes les parties, officielles, juridiques, médiatiques, se sont-elles empressées, pour se justifier et parfois s'en satisfaire, de souligner que ce couple était musulman, comme si telle conviction religieuse, fût-elle fraîche et ardente, prenait le pas sur le droit de tous?
2. Pourquoi ce couple n'a-t-il pas recouru au divorce par consentement mutuel (assorti au besoin d'une annulation devant leurs autorités religieuses, c'était leur affaire), qui permettait justement aux consentements de s'exprimer de façon paisible puisque l'accord était parfait sur ce point, qui aurait eu l'avantage de ne rien coûter ou presque, et d'être à coup sûr prononcé bien plus rapidement. L'épouse eût été libre de refaire sa vie depuis fort longtemps, le mari n'eût plus eu de raison de blêmir devant sa glace et ses proches, la loi commune n'eût pas été écornée, et les Autorités suprêmes confuses n'eurent pas été renvoyées à leurs chères études. De droit public, s'entend.
En partant de ces questions, et si on peut s'imaginer que les métiers d'avocat-conseil, de procureur, de juge ou de ministre d'État préservent de la naïveté, qui est peut-être la qualité essentielle de ce couple, le fait divers devient plus cohérent: d'une façon ou d'une autre, une sphère religieuse et culturelle, en l'occurrence musulmane, entend faire prévaloir sa législation propre, ses prétentions sexistes, ses ostracismes et discriminations sexuelles, sur la loi de la république, dont elle attend d'elle qu'elle s'annule — le mot est ici à sa place — d'elle-même.