Mal nommer
un objet, c'est ajouter

au malheur de ce monde.

Albert Camus.


jeudi 11 février 2010

Pour Robert Redeker, suite




11 février 2010. — Soyons rassurés, Robert Redeker est toujours vivant: nous avons pu l'entendre le 30 janvier 2010 s'entretenir avec Jean-Baptiste Urbain sur France-Info. On trouvera l'accès sonore à cet entretien sur le site de la chaîne, à cette adresse: Jean-Baptiste Urbain avec Célyne Bayt-Darcourt.

Dès la publication de son article sur
Le Figaro du 19 septembre 2006: Face aux intimidations islamistes, que doit faire le monde libre?, voilà donc plus de trois ans que nous tentons de garder ici aussi présent le fil d'une affaire à méditer à bien des égards. Nous renvoyons à notre dernière note du 11 mai 2009 ci-dessous, et plus généralement à l'ensemble que nous avions réuni en dossier dès septembre 2006.

Au-delà de ces 4' 12" dont le mérite est surtout de continuer à nous donner à entendre un instant une voix lasse mais toujours vibrante, nous voudrions vous renvoyer à son texte: Réfugié politique dans mon propre pays, à télécharger depuis son site, ainsi que d'autres textes et témoignages de divers auteurs, sur l'affaire. Mais le site de Robert Redeker est riche de mille trésors et sujets sur la philosophie, sur le sport et sur l'actualité politique entre autres, qu'on ne se lasse pas de découvrir. Sans compter les textes des gens qu'il aime nous donner à lire.



11 mai 2009. —
Bien sûr, le nom nous fait encore un petit quelque chose, il reste dans un coin de nos mémoires mais, dans la réalité, qui sait exactement comment il va?

Tout d'abord, le mieux est de faire quelques révisions, en allant feuilleter notre florilège médiatique d'alors, recueilli entre le 28 septembre et le 3 octobre 2006, temps de «l'affaire». Après la publication de son article, reproduit en tête de notre florilège: Face aux intimidations islamistes, que doit faire le monde libre? sur
Le Figaro du 19 septembre 2006, nous vîmes alors de quels complémentaires émois furent conjointement capables le Ministre de l'Éducation nationale d'alors, le MRAP, la LDH, les journalistes du Monde et de L'Humanité, le maire PCF et le proviseur de Saint-Orens-de-Gameville (Haute-Garonne). Seul Soheib Bencheick (nommons l'homme qui parla en son propre nom) ex-mufti de Marseille, aujourd'hui remisé par la communauté dans son placard phonique du Conseil Français du Culte musulman, sauva l'honneur de la démocratie en France et de la République laïque. Dans Il faut tenter de vivre (Seuil, 2007) Robert Redeker fait le récit de ses heures sombres.

Et aujourd'hui? Dans son nouveau site, qui s'appelle toujours Traversées philosophiques, Robert Redeker nous en donne. Ou du moins, il nous laisse le soin de les recueillir, au fil des articles qui y sont réunis. Aujourd'hui, affecté au CNRS, il n'enseigne plus. Ses enfants ont été scolarisés ailleurs sous des noms d'emprunt; il a déménagé dans une maison que nul ne connaît et va chercher son courrier à quarante kilomètres dans une boîte postale anonyme; il porte à la ceinture une balise reliée à la police et se déplace sous escorte, ou voyage sous haute sécurité.

Quand il s'est agi d'enterrer son père, il a fallu que — "comme un bandit" dit-il — son nom, Redeker, ne paraisse nulle part. Prévenu par un ami commun, le maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc (autre homme autre nom) a pu au moins envoyer une gerbe.

Toujours sur son site, on peut l'écouter parler durant une vingtaine de minutes [
apparemment devenu indisponible, 11 février 2010] de son livre Dépression et philosophie (Pleins feux, 2007), et retrouver un ensemble d'articles, en particulier sur ses lectures, sur le sport, à propos de quoi il a fait récemment paraître Le sport est-il inhumain? (Panama, 2008), sur la philosophie, sur notre monde et ses politiques, sur l'extermination.

En étrange pays dans mon pays lui-même.




17 juin 2008. — Robert Redeker vient de restructurer son site Traversées philosophiques. Quand l'affaire éclata, en septembre-octobre 2006, notre site Ralentir Travaux n'existait pas. Mais à sa création en mars 2007, j'y ai reproduit quelques textes précédents, dans Liber@ Te en particulier. Parmi eux, j'avais collationné un petit florilège médiatique sur l'affaire Redeker, qui n'a rien perdu de son actualité. D'autant que les nouvelles de sa situation sont rares, sauf que sa vie professionnelle et privée en ont été anéanties. Une recherche sur le Net donne beaucoup moins de résultats sur sa situation actuelle que sur des sites où la haine le dispute à l'insulte. Nous pouvons au moins lire le philosophe, proscrit en sa terre même, dans ses textes, conférences, comptes rendus, articles, essais, extraits de livres. Et apparemment même lui écrire. Et pour nous amuser un peu, cliquons, pour l'agrandir, sur cette tête de Voltaire (dont, non sans quelque naïveté, nous invoquons mythiquement la mémoire en matière de liberté d'expression) par Salvador Dali, et y voir aussi autre chose!

© Salvador Dali: Marché aux esclaves avec disparition d'un buste de Voltaire (1940).